De l’Auvergne à l’Espagne, en passant par l’Opéra de Nice
C’est en effet un voyage à travers les traditions et les couleurs musicales que proposent en fil conducteur ce concert et ses interprètes. La longue voix de la mezzo-soprano Sophie Koch se colore ainsi de différentes teintes correspondant aux pays traversés avec pour guide la baguette du chef italien, Daniele Callegari.
Les Chants d’Auvergne de Joseph Canteloube, El amor brujo de Manuel de Falla (récemment à l’affiche de l’Opéra national du Rhin, la précédente maison du Directeur niçois Bertrand Rossi) et Capriccio espagnol de Nikolaï Rimski-Korsakov montrent comment et combien trois compositeurs abordent avec modernité le voyage musical et exotique en s’appuyant sur leurs trois compétences complémentaires et respectives : l’ethnomusicologie, l’orchestration chorégraphiée, et l’organologie. Autant de spécificités qui sont rendues et différenciées par l’orchestre, avec une saveur néo-rurale et néo-classique, chambriste-ensorcelante puis enflammée.
La chanteuse différencie et déploie elle aussi cette riche palette d'émotions. Ses cantilènes se coulent sur un vibrant satin mais les timbres et registres sont modulés avec un caractère franc, direct et vif. Chaque section est comme une petite scène, une brève intrigue portée par une sensibilité et une élégance, troubadouresque ou pastourelle.
La chanteuse et certains pupitres (notamment les instruments à vent, et au premier chef le hautbois solo) engagent ainsi de longs dialogues, s'inspirant mutuellement : les instruments par leur souffle, la mezzo par ses couleurs. Les aigus des trilles et le vibrato miroitent ainsi, à travers la précision évoquant les travaux manuels ou la rudesse pour les travaux dans les champs.
La direction musicale de Daniele Callegari déploie sa cohérence gestuelle et rythmique, traversée par l’énergie et la scansion du feu, qui s’épanouit encore, et même se déchaîne. Dans tout le programme et le travail du chef, le symphonique et le chambriste se nourrissent mutuellement, sur la base solide qu’est la précision des attaques. Les alternances entre les parties solistes et les nappes sonores vivifient tout le discours musical.
Le public applaudit crescendo, à l'image de ce grand programme, et remercie son nouveau guide orchestral pour ce voyage en-chanté de la steppe russe à la péninsule ibérique.