Fairy Pretty Yende au Théâtre des Champs-Élysées
La disparité des œuvres présentées ce soir galvanise le public qui n’aura de cesse d’acclamer les artistes tout au long du concert. Dans le grand chaudron du programme, quelques airs célèbres d’opéra de Rossini (Le Barbier de Séville), de Gounod (Faust et Roméo et Juliette) et de Donizetti (Lucia di Lammermoor), auxquels s’ajoutent l’Exsultate, jubilate de Mozart, le tout saupoudré de quelques ouvertures du répertoire lyrique léger français (Le Cheval de bronze d’Auber, Mignon d’Ambroise Thomas, Zampa, ou La Fiancée de marbre d'Hérold et La Princesse jaune de Saint-Saëns).
Pretty Yende arrive radieuse à l'image du programme et de l'effet féerique produit, dans une immense robe couleur de lune (à l’instar de celle de Peau d’Âne avec Catherine Deneuve) dont la traine recouvre parfois les pieds des premiers violons. Son histoire elle-même évoque les contes, celle d'une fille issue des townships d’Afrique du Sud embrassant aujourd’hui une carrière internationale éclatante. Dans le programme figure son compositeur porte-bonheur, Rossini, avec lequel elle a débuté dans plusieurs maisons prestigieuses et notamment Le Barbier de Séville qui marqua ses débuts triomphants à l’Opéra de Paris. Donizetti est aussi présent avec un extrait de Lucia di Lammermoor, rôle pour lequel le public parisien lui réserva une standing ovation à chaque représentation. Les deux airs de Gounod, la valse de Juliette et l’air des bijoux de Marguerite, ainsi que l’Exsultate, jubilate de Mozart sont souvent inscrits à ses programmes de récital et ses admirateurs fidèles du Théâtre des Champs-Élysées ont pu déjà les apprécier.
Les atouts principaux de l’en-chanteuse résident dans une voix richement colorée, des aigus flamboyants et une agilité époustouflante (elle vocalise comme elle respire). Ainsi la pièce de Mozart est-elle servie par une joie vocalisée sans réserve, s’achevant en éclat de rire (contre ut) contagieux. Elle ne fait qu’une bouchée de l’air de Rosine aux coloratures tourbillonnantes ("Una voce poco fa") dosant intelligemment les intentions théâtrales, faisant rire le public, la tenue vocale demeurant sans faille.
Dans les deux airs de Gounod, son français demeure flottant et sa voix peine quelque peu à passer l’orchestre dans le médium. Cependant, elle exprime avec grâce l’exaltation de Juliette dans sa valse virtuose ainsi que l’émerveillement virevoltant de Marguerite découvrant les bijoux, recueillant l’approbation du public visiblement conquis. Enfin, l’air du premier acte de Lucia déploie son legato et l’intensité émotionnelle de son interprétation.
L’Orchestre des Frivolités Parisiennes réjouit également le public avec les différentes Ouvertures d’un répertoire peu connu dont ils sont spécialistes, à savoir l’opéra-comique et l’opéra bouffe. L’ensemble dirigé par Giacomo Sagripanti en exprime les contrastes, tantôt teinté de nostalgie, tantôt exaltant la fête et la danse, préservant la précision et l’équilibre sonore.
Le public, debout, salue les artistes et ovationne Pretty Yende qui le récompense à quatre reprises : O mio babbino caro tout en délicatesse et I feel pretty clin d’œil malicieux. Exprimant son lien particulier avec la France et rendant hommage à Joséphine Baker la veille de son entrée au Panthéon, la soprano interprète J’ai deux amours et, ne résistant pas aux rappels du public, elle chante a cappella une chanson traditionnelle ainsi que Somewhere over the rainbow, achevant la soirée dans une émotion emplie d’espoir.
Hier soir avait lieu @TCEOPERA le récital de Pretty Yende qui après avoir chanté Mozart, Rossini, Gounod a fait un rappel en hommage à #JosephineBaker pic.twitter.com/w6SpxoNwIM
— Joan (@Joan_LF) 30 novembre 2021