Mozart et Beffa pour commémorer le Bicentenaire Napoléon aux Invalides
Lors de la cérémonie du retour des cendres de Napoléon Ier, le 15 décembre 1840, la Messe de Requiem de Mozart résonnait en la Cathédrale Saint-Louis des Invalides. L’œuvre est donc de nouveau entonnée ici, précédée par deux œuvres contemporaines de Karol Beffa, dont l’une est une commande du Musée de l’Armée pour cette occasion particulière.
Nuit obscure pour mezzo-soprano et orchestre sur quatre poèmes de Saint Jean de la Croix, introduit le recueillement et le retour de la lumière sous la direction attentive et souple, voire parfois caressante, du colonel François Boulanger. Les cordes de l’Orchestre Symphonique de la Garde Républicaine font entendre des nuances feutrées, proposant ainsi un accompagnement coloré et plein de finesse pour soutenir le chant, souvent tendre, de la jeune et fraîche mezzo-soprano Valentine Lemercier. La conduite de ses phrasés est également lumineuse et soyeuse, au point de prendre le dessus sur la diction (le manque de consonnes ne permet pas d’apprécier la poésie des textes en espagnol).
Près de la moitié des artistes amateurs du Chœur de l’Université Paris – Sciences et Lettres, soient trente chanteurs, se place devant l’orchestre pour interpréter, en création mondiale, le Tombeau de Napoléon (de Karol Beffa toujours). Les étudiants ou membres des équipes pédagogiques et administratives de l’université proposent un son peu timbré et assez vert, mais qui lui donne un aspect fort touchant, tout en s’appuyant sur une connaissance musicale indéniable. Pour eux aussi, la tendresse et l’attention amoindrit la précision des consonnes (même lorsque le texte est en français et malgré un travail rigoureux de la prosodie, très claire).
Tous les musiciens se réunissent pour le Requiem de Mozart. La grande préparation se manifeste par la rigueur des passages en fugue dont les entrées sont limpides tout en restant vives. Le caractère touchant demeure aussi appréciable dans les prières et François Boulanger sait aussi insuffler quelques nuances plus marquées. La soprano Armelle Khourdoïan impressionne dès sa première intervention soliste, pourtant courte, par la maîtrise du souffle et l’articulation du phrasé, la chaleur de son timbre mais également son regard intense en direction de l’auditoire (la détachant souvent de sa partition). Valentine Lemercier charme de son timbre lumineux, bien que les graves pourraient être plus présents et sonores. Le ténor Kévin Amiel pose son timbre éclatant, ses phrasés fluides et déploie encore davantage son grand soin de la diction. Enfin, le baryton-basse Julien Véronèse fait entendre une voix pleine, et charnue, aussi élégante que la conduite de ses lignes vocales.
Cet hommage touchant et grandiose résonne ainsi de nouveau, plus de deux siècles plus tard, dans l’écrin qu’est cette Cathédrale Saint-Louis, tout proche du Dôme des Invalides sous lequel reposent désormais les restes de Napoléon Ier.