Samson et Dalila, Opéra Côté Chœur à la Madeleine
Cette compagnie consacrée spécifiquement à faire découvrir l'art lyrique à de nouveaux publics a fait le choix ambitieux du Samson et Dalila de Camille Saint-Saëns, opéra biblique (dans son sujet et ses dimensions).
La version est réduite et ici concentrée aux dimensions d’un théâtre de 700 places, à trois solistes, petit chœur et piano. Ces choix ne permettent certes d'apprécier que bien partiellement les dimensions et caractéristiques de cette musique grandiose où le timbre instrumental (et les grands chœurs) jouent un rôle essentiel pour la dramaturgie. Le Directeur musical et chef de chœur Antoine Terny génère pourtant des climax d’intensités et de couleurs sonores en accompagnant tout le spectacle au piano, suivant l’esprit de chaque scène et s’accordant pleinement à l’accompagnement des chanteurs solistes et du chœur à tout moment.
La participation du chœur, capitale pour cette œuvre basée sur la confrontation entre les peuples, recueille les grands efforts du chœur amateur Vox Opéra : impliqués dans le jeu, au point de fatiguer une intonation imprécise mais composant une atmosphère dans chaque scène, grâce aussi à une chorégraphie précise de Delphine Huchet et à des repères nets sur cet espace réduit.
La mise en scène d’Adrien Jourdain et la scénographie d’Isabelle Huchet travaillent ensemble la petite scène du Théâtre de la Madeleine, avec peu d’éléments, d’autant plus symboliques : donnant l’idée des lieux de chaque acte et guidant le jeu d’acteur (notamment par cette grande roue utilisée de différentes manières tout au long de l'opéra, comme un centre de gravité scénique et dramatique).
Olivier Trommenschlager possède une voix de ténor lyrique avec un centre bien sonore et des harmoniques robustes. Il incarne Samson de manière très engagée sur le plan du jeu mais connaît quelques problèmes dans son registre aigu à des moments importants de l'œuvre.
La mezzo-soprano franco-brésilienne Yete Queiroz interprète avec une grande aisance et un grand professionnalisme le rôle difficile de Dalila. Sa voix lyrique et veloutée, maniée avec une grande agilité, rend les airs délicats et fameux du personnage avec une évidente sûreté technique : la voix est ferme dans toute l’ambition et l’intonation d’une grande justesse. L’aigu est aisé, comme le jeu d’actrice qui pose la crédibilité de son personnage.
Enfin, le baryton Kristian Paul marque le plateau par sa présence et sa voix en Grand Prêtre. Le chant empli d’harmoniques et puissant remplit entièrement la salle, traduisant et transmettant la force du personnage. Le timbre très présent dans le registre central et le grave montre le travail effectué sur le texte (d’autant plus essentiel dans cette version à trois protagonistes).
La salle comble du Théâtre de la Madeleine est visiblement comblée.