Un alphabet américain au 50ème Festival de Saintes
Carolyn Sampson, soprano parcourant un répertoire complet du baroque au XXe siècle, en passant par classicisme et romantisme, est une artiste bien connue du public du Festival de Saintes (depuis sa première présence remarquée en 2009), qui a aussi marqué le Festival dans les moments de convivialité d'après-concert. Les lieux résonnent en effet traditionnellement jusqu'au cœur de la nuit avec les moments de partage musicaux improvisés et conviviaux des artistes à la générosité commune et spontanée. C'est précisément lors de ces moments que Carolyn Sampson explorait le soir un répertoire différent de ses concerts le jour dans l'abbaye. Le Directeur du Festival, comme il nous le confiait en interview, a ainsi eu l'idée de faire passer ce off dans le in.
La chanteuse propose ainsi un répertoire de compositeurs américains, Gershwin, Copland, Barber, ou encore Porter et Garner. Par l'incontournable Summertime et une interprétation sobre, d'une voix chaude, la soprano lyrique entraîne ainsi le public dans une parenthèse, une respiration, un ailleurs, une autre temporalité dans laquelle jusqu'ici il s'était installé. Joseph Middleton, pianiste, récemment récompensé, premier accompagnateur à recevoir un Young Artist Award de la Royal Philharmonic Society, dévoile un jeu subtil et complice avec la chanteuse.
C'est avec une voix mature, puissante, pleine d'harmoniques, une coloration parfois plus dramatique, que le public apprécie l'interprétation de Knoxville : Summer of 1915 de Samuel Barber, écrit en 1948. La musicalité, la conduite mélodique porte l'émotion, une nostalgie, une résilience sur le temps qui passe.
Une note d'humour et de charisme ne réjouit pas moins les spectateurs avec I hate the music, la musique d'un jeune Bernstein, écrite en 1943 suivie d'une des chansons les plus poignantes du répertoire américain Send in the clown. Le public est suspendu, la chanteuse fait appel à la mémoire collective, réminiscence des grands interprètes dont Barbra Streisand.
Enfin, I've got you under my skin, chanson des années 30 de Cole Porter, permet à Carolyn Sampson de boucler ce tour de chant, de répertoire et d'émotions par une note de gaieté, de légèreté, complété par The Physician, avec humour et sous-entendus au programme.
Un voyage musical empreint de nostalgie, mais aussi d'espoir : le chemin accompli d'une artiste qui ne l'est pas moins.
« J'entends de la musique quand je touche ta main, une belle mélodie venue de pays enchantés »
The song is you, Jerome Kern, 1932
Retrouvez notre interview du Directeur Stephan Maciejewski à l'occasion du 50ème Festival de Saintes