(Re)Découverte interactive de la musique baroque en son Centre de Versailles
Si les encouragements et des fonds débloqués par le Ministère de la Culture dans le cadre du programme de l’été culturel et apprenant ont suscité doutes et critiques, ils ont toutefois été appréciés par le Centre de Musique Baroque de Versailles qui a su en faire bon profit*. Soutenu également par la ville de Versailles, le CMBV propose une expérience immersive d’une demi-journée qui plonge petits et grands dans l’univers fascinant de la préparation d’un spectacle au temps du Baroque, aux côtés de Monsieur l’intendant des Menus-Plaisirs à la cour de Louis XV, Denis Papillon de la Ferté.
Enfants de centre de loisirs, pensionnaires d’EPAHD, réfugiés politiques et familles purent s’inscrire à différents ateliers animés par des comédiens, des musiciens, des danseuses et des peintres-décorateurs. Toutes et tous, passionnés et passionnants, ont su transmettre l’art de leurs métiers, la beauté des arts baroques et leur bonheur de retrouver des moments forts de partage avec les spectateurs.
C’est avec l’intendant des Menus-Plaisirs en personne, incarné par le comédien Thierry Péteau, que le public apprend les anecdotes, le vocabulaire du théâtre et les élégants codes de la gestuelle baroque. Afin de conclure l’expérience de façon mémorable, sa récitation de la célèbre fable de Molière Le Corbeau et le Renard est absolument fascinante. Le baryton Arnaud Marzorati, Directeur artistique des Lunaisiens, incarne Michel Corrette (1707-1795), compositeur et pédagogue qui accompagne les participants dans l’apprentissage de la même fable sur un air populaire, toujours avec les gestes baroques magnifiant la présence scénique d’un chanteur-comédien du XVIIIe siècle.
Le jeune comédien Alexandre Laval, assisté de la costumière Michelle Josset, se glisse dans la peau du costumier et décorateur Louis-René Boquet (1717-1814) pour présenter d’étincelants costumes de scène, baroques et classiques. Ces sublimes et fidèles reproductions sont fournies par la société Midnight-Première, qui habille également tous les chanteurs et comédiens de l’événement, ce qui aide particulièrement le spectateur à imaginer la vie de ce haut lieu d’organisation des spectacles de la cour qu’est l’Hôtel des Menus-Plaisirs et qu’occupe aujourd’hui le CMBV.
C’est également un jeune artiste, peintre et décorateur, Adrien Dauvillier, qui partage sa passion pour les décors. Les visiteurs peuvent approcher au plus près les éléments qu’ils ne voient d’habitude que de loin. Les plus chanceux ont même l'occasion de dessiner sur les grandes toiles de lin avec les longs outils de l’artiste. Évidemment, cette découverte de la scène baroque française serait incomplète sans un atelier de danse, animé par les danseuses et chorégraphes Gudrun Skamletz et Sarah Berreby.
Après une belle et impressionnante démonstration de duel au fleuret, les fringants de la Garde française, personnifiés par les comédiens Jimmy Leroy-Schneiter et Lorenzo Bello, invitent les participants à gagner la cour haute de l’hôtel -lieu historique où furent réunis les Etats-généraux en mai 1789- pour retrouver les artistes qui donnent une petite représentation conçue par Arnaud Marzorati et ses 8 musiciens des Lunaisiens.
Fidèle à ses habitudes, le Directeur artistique crée une représentation parodique mêlant airs et compositeurs afin de proposer un spectacle adapté, toujours vivant et assurément baroque. L’attention constante des plus jeunes, malgré leur active participation à plus d’une heure et demie d’ateliers, manifeste l’efficacité et le succès de la formule.
Le spectacle est certes relativement court, mais il permet d'y apprécier les talents de comédien d’Arnaud Marzorati, la douce voix de la soprano Jenny Daviet et la simplicité du ténor Arnaud Ghilardi. Leur duo larmoyant est particulièrement touchant. L’espace en extérieur n’aide certainement pas au premier abord à apprécier les sons rêches des instruments baroque et d’origines populaires, comme le flageolet ou la vielle à roue, mais l’oreille finit par s’y habituer et à goûter ces timbres qui peuvent sembler particuliers.
Grâce à cette belle expérience, le CMBV s’est montré à la hauteur du défi, permettant non seulement à plusieurs publics de découvrir une partie de ses locaux et, surtout, la musique baroque, mais également à divers corps d’artistes de retrouver leur travail auprès des spectateurs. Une réussite qui promet des suites (baroques)...
*une enveloppe spécifique d'environ 100.000 euros a été allouée à ce projet dans le cadre de l'été culturel et apprenant : soutenu par l'Etat à hauteur de 60% (50% du Ministère de la Culture, + 10% par la Préfecture de Région Ile-de-France), 10% par la Ville de Versailles, 3% par le Ministère de l'Education nationale via le Rectorat et le projet "Cités éducatives", le reste par le CMBV