Copland et Corigliano, Rhapsody 2020 à La Monnaie
Le programme est savamment orchestré, entre musique populaire, jazz et musique savante. D’une Rhapsody in Blue jusqu’aux grands airs de West Side Story, les mélodies enthousiasmantes de l’Amérique viennent à Bruxelles comme un rappel, entre folie douce, nonchalance et surtout légèreté. Décomplexée, riche, vibrante et sensible, l’aventure américaine continue pour La Monnaie, qui s’était teintée d’un esprit très Hollywoodien avec Les Contes d’Hoffmann. Ici, moins de spleen, moins de blues mais surtout plus de Jazz, la rentrée artistique du plat pays sonne comme un boost musical, une impulsion pleine de bonnes résolutions pour un public émerveillé.
Fidèle aux indications du compositeur, le chef musical met ce grand concert sous l'exergue de la rare Promenade Ouverture de John Corigliano (compositeur qui vient de faire l'événement en France avec la création continentale de son opéra Les Fantômes de Versailles). Devant un orchestre absent, le suspens laisse chaque musicien venir à son rythme, s’asseoir sur scène. Leur malice laisse au public la magie de découvrir la beauté de chaque instrument qui vient sonner et s’ajouter peu à peu, pour finalement s'unir en apothéose.
Pour la Rhapsody in Blue, Alain Altinoglu dirige même du piano, avec la performance d’un dialogue passionné mais surtout millimétré entre l'instrument et la phalange. L’air si connu semble sonner nouveau, plus palpable et proche encore, précis d’une technique nourrissant l’exaltation en deuxième partie de concert. Si la première partie mettait à l'honneur l’orchestre, la seconde souligne les voix des Chœurs de La Monnaie, préparés par Christophe Talmont. Les chanteurs ajoutent une part de nostalgie non négligeable. L'uniformité entre les voix renforce la puissance avec des pupitres féminins très précis (un peu moindre chez les voix masculines graves car amples). Le plaisir transparaît dans la réactivité des chœurs et l'attention dans le dialogue avec l’orchestre. Les Old American Songs d’Aaron Copland sonnent plus country et narratifs grâce aux airs Ching-a-Ring Chaw, Simple Gifts, At the River, I Bought Me a Cat, plus cinématographiques encore, nourris d’une amplitude de chant et d’orchestre vibrant.
Chacun parmi l'assistance se retrouve à siffloter silencieusement les airs les plus connus de West Side Story, marque d’une époque dorée et d’une ferveur de chant universel. Car c’est l’alliance entre musique savante, classique et grandiose avec la légèreté d’un jazz entraînant et frénétique qui sonne comme un médicament contre le spleen hivernal.
Son public dit Merci à La Monnaie et Bonne Année.