Scintillement Wagnérien à la Philharmonie avec Marie-Nicole Lemieux
Le programme de la soirée, à l’image de la contralto québécoise, mêle grandiose, légèreté, grâce et élégance dans une énergie qui tient sans mal en haleine l’auditoire. L'ouverture du concert sur Jeux, poème dansé composé par Debussy, est interprétée avec espièglerie par l’Orchestre Symphonique de Montréal. L'ensemble s'engouffre pleinement, en deuxième partie, dans la joyeuse folie du Sacre du printemps de Stravinsky en ne faisant aucune concession à la précision d’exécution, face à la baguette acérée, exigeante et intransigeante de Kent Nagano.
Rayonnante, Marie-Nicole Lemieux sert une performance dominée par la sobriété et laisse sporadiquement place à plus d'expressivité et de lyrisme, trouvant ainsi un équilibre qui sied à l'art du concert. Sa voix profonde, chaude et homogène de contralto dessine des reliefs riches. Les piani sont détendus, spacieux et audibles sur toute sa tessiture et elle offre quelques aigus aux couleurs de mezzo-soprano qui conservent la facilité et la richesse de timbre de ses médiums. Les graves sont assumés, épais et pourtant d'une clarté naturelle. Sa gestion du souffle solide et sa capacité respiratoire lui permettent d'assumer des phrases particulièrement longues sans aucun effort visible ou audible.
Elle est plus à son aise lorsque la musique impose un long phrasé legato laissant le temps à sa voix de s’installer entièrement dans l'espace pour résonner pleinement, que pendant les moments plus rapides et tourmentés (notamment le quatrième Lied, Douleur) où l’auditoire peut percevoir, dans le déploiement de force et de puissance, une infime diminution d'efficacité. La voix perd quelque peu en détente, au profit d’une interprétation plus engagée dans le texte et l’émotion.
Une histoire contée ce soir, tout en nuance, avec une illusion réussie de simplicité et de facilité qui signent le travail impeccable de l’orchestre, du chef et de la chanteuse sur un répertoire qui ne l'est assurément pas.