Lancement de Chœur, Lanceur d’alerte : “Cassandra” à La Monnaie
En cette après-midi de pré-rentrée, lançant ce chœur et ce chemin vers un nouvel opéra, les participants ont été accueillis dans les Ateliers de La Monnaie pour une présentation générale et déjà pratique à laquelle succéderont trois répétitions mensuelles jusqu’en juin 2023, avant de dévoiler Cassandra en septembre (La Monnaie marque ainsi désormais chacun de ses débuts de saisons par de la création mondiale : cette année ce sera On purge bébé du récemment disparu Philippe Boesmans).
La maison espérait une centaine de participants pour cette séance inaugurale formant ce Chœur Cassandra, mais plus de 200 amateurs se sont inscrits pour l’occasion, femmes et hommes de tous âges, francophones et néerlandophones, aux formations musicales variées : autant de raisons d’étonnement et de réjouissances pour la cheffe de chœur Laurence Renson.
Les participants sont alors divisés en deux groupes pour organiser au mieux les activités prévues : un premier groupe commence par le chant, l’autre par la visite des Ateliers (et inversement). Avant cela, Sophie Briard (responsable des publics) et Laurence Renson prennent la parole afin de présenter les enjeux du projet et d’en préciser le déroulement. Trois grandes idées se détachent de ce programme : premièrement, la volonté d’impliquer via le chœur un public extérieur le plus diversifié possible (une forme de sélection devra néanmoins être établie afin d’obtenir une certaine parité dans l’harmonisation des voix mais en conservant leurs richesses). La diversité se fera aussi musicalement : la cheffe de chœur annonce que les chants pourront comprendre aussi bien de l’opéra que de la pop, du reggae, de la chanson française… Elle précise d’ailleurs être ouverte à toute autre suggestion, et reçoit dans l’instant quelques propositions de compositions personnelles, de la part d’un public déjà enthousiasmé.
Ecouter les Cassandre
Ce projet Cassandra, chœur et opéra, s’articule comme son nom l’indique sur la figure mythique de Cassandre (fille du roi de Troie Priam, annonciatrice ignorée de dangers imminents) et en particulier autour de l’urgence climatique : faisant ainsi résonner antiquité et actualité, art et contemporanéité. C’est d’ailleurs ce rôle de lanceur d’alerte que jouera le chœur : pour le public, depuis la place de La Monnaie, avant chaque représentation.
Ce projet -où de nombreux membres de Youth for Climate sont d’ailleurs à l’initiative- s’inscrit également dans un enjeu plus vaste de “politique green” à La Monnaie, qui tend vers l'éco-responsabilité (notamment via l’éco-conception des décors et l’adaptation des modes de transport).
À 14h30, le premier groupe se rassemble dans la salle de chant du 6ème étage, où Laurence Renson place les chanteurs en cercle autour d’elle avant de les faire démarrer par différents exercices de respiration et de voix. Accompagné par le pianiste Andrés Soler Castaño, aussi enjoué que le chœur et leur cheffe, et sous les caméras de la RTBF présente pour l’évènement, l’échauffement se dirige très naturellement vers les chants qui seront abordés lors des représentations. Les exercices se lient peu à peu aux thématiques d’engagement écologique, à travers des paroles telles que “Hit the road people, and never cease to act”, sur l’air Hit the Road Jack de Ray Charles, ou encore “Sometimes I feel like a voiceless citizen, alone in my fight” d’après le Spiritual Sometimes I Feel Like a Motherless Child. Les choristes entament même le Chœur des esclaves du Nabucco de Verdi, avant de terminer par la reprise poignante d’une partie du fameux discours de Greta Thunberg à l’ONU, en 2019 : “How dare you continue to look away and come here saying that you're doing enough when the politics and solutions needed are still nowhere in sight”.
Au terme d’une heure et demie de chant, le groupe continue l’après-midi avec une visite guidée des Ateliers. L’écoute de l’épisode “Ruche” du podcast Ec(h)o réalisé par La Monnaie permet d’introduire au travail fourmillant des différentes salles de couture, de peinture, de tapisserie, de menuiserie, de ferronnerie, de sculpture, sans oublier les nombreux lieux de stockages qui font la richesse de ce lieu où tout est conçu sur place. Devant l’étonnement des visiteurs face aux matériaux employés dans la fabrication des décors, la guide explique qu’il faut “concevoir de l’extrêmement faux pour faire de l’extrêmement vrai” : le public ne doit avoir aucun doute quant à la véracité des éléments scéniques.
C’est après avoir été plongés dans les entrailles d’un lieu qu’ils fréquenteront au cours de l’année à suivre que les participants remontent, excités par ce projet placé sous le signe de la diversité, de la défense des droits humains, et de la sensibilisation aux catastrophes écologiques, de plus en plus difficiles à ignorer.
De quoi ouvrir les voix et la voie, les yeux et les oreilles.