Concerts-tests avec public, enfin en France mais pas encore
La France aura donc été décidément en retard sur tout : masques, vaccins et études scientifiques (surtout en retard sur les décisions, actions et clarifications politiques).
Le Gouvernement aura donc fait subir à la culture en France une double peine injuste : refusant de considérer les études sérieuses à l'étranger et ne mettant pas en place les siennes propres. Les résultats de concerts-tests organisés dans l'Hexagone, attendus pour ces prochains mois (au mieux) risquent donc d'arriver tellement tard qu'ils viendront au mieux confirmer ce que la pratique empirique aura déjà démontré dans les autres pays.
Alors que nos voisins de l'autre côté du Rhin (entre autres) ont non seulement lancé mais déjà publié depuis longtemps les résultats concordants d'études menées par des sommités scientifiques, autant d'études qui prônent la réouverture comme l'ont fait nos voisins de l'autre côté des Pyrénées (ou des océans), la France s'apprête enfin à mettre en œuvre des études, à Marseille (probablement), Paris (peut-être), Saint-Malo et en Aquitaine (si possible). Car si des études sont annoncées pour mars-avril au plus tôt, reste à savoir quand leurs résultats seront communiqués et surtout le temps qui sera nécessaire pour que l'Etat agisse en conséquence.
Assis, Debout, les deux
Le premier concert test est envisagé depuis octobre dernier mais il n'est plus certain qu'il puisse se tenir d'ici avril (le commencement à été retardé par les autorités et “à cause du virus” [sic] comme le relate Le Parisien). Organisé par le Prodis (syndicat des producteurs et salles de concerts) avec l'AP-HP, il doit réunir entre 3.000 et 5.000 spectateurs debout et masqués dans l'arène de Bercy, soit entre 11 et 18 m² par personne en théorie, sauf que par définition les concerts debout ne sont pas distanciés et n'apporteront donc pas d'information sur les événements assis. Chaque invité aura fait un test PCR lors des trois jours précédents et fera un test salivaire avant d'entrer en salle si les résultats sont négatifs. De quoi donc tester davantage la fiabilité des tests car si tous les spectateurs sont déjà négatifs, ils ne seront pas infectés, ce qui n’est utile que si le gouvernement envisage d’autoriser les spectacles à ne se jouer que devant des spectateurs testés (or la Ministre de la Culture Roselyne Bachelot invoque dans ce cas les coûts prohibitifs qui seraient supportés par l'Assurance Maladie). L'enquête se veut randomisée (les résultats des spectateurs de ce concert-test étant comparés à ceux d'un autre groupe test n'assistant pas au concert), mais cela reviendra en fait surtout à montrer combien les autres activités peuvent être sources d'infection (à l'inverse d'un test clair qui aurait placé les spectateurs en quatorzaine).
Au contraire du barrage filtrant dans ce premier concert-test et du concert-test mené en décembre dernier à Barcelone, le deuxième protocole prévu (lui aussi randomisé), à Marseille, laissera entrer les cas positifs. Deux concerts réuniront chacun 1.000 personnes parmi la population étudiante (de 20 à 30 ans) sans pathologie ni comorbidité, testées la veille ou l’avant-veille du concert puis re-testées 6 et 13 jours après. Ces concerts organisés par le SMA (Syndicat national des Musiques Actuelles) et l’Inserm au Dôme de Marseille installeront un "canon à neige" diffusant du produit désinfectant et imposeront le port du masque FFP2 durant le concert mais distribueront un sac avec boisson et nourriture (en l'absence de buvette évidemment, mais laissant comprendre que les masques seront ôtés pour boire et manger). Chacun de ces concerts semble toutefois pouvoir apporter des résultats différenciés puisque chacune des jauges de 1.000 personnes sera divisée entre 500 non distanciés et 500 distanciés, sauf que ceux-ci auront le droit de se lever (et donc aussi de parler, chanter, danser, ce qui n’a donc là encore rien à voir avec la configuration des spectacles assis).
D'autres séries de tests souhaitent également être autorisés. Le festival No Logo BZH avec le CHU et l'École des Hautes Études en Santé Publique de Rennes veulent mesurer le risque d'infection en plein air et en camping avec un événement sur un week-end (2.000 spectateurs sur une jauge de 12.000, avec deux tests sur deux week-ends pour deux échantillons de spectateurs). L'Aquitaine mise quant à elle sur un logiciel bien-nommé Opéra (Outil Probabiliste d’Évaluation du Risque par Aérosols) évaluant le risque d'infection selon une trentaine de paramètres liés à la configuration de la salle et de son aération. De quoi confirmer les résultats déjà publiés des études en Allemagne.
Le médecin urgentiste Vincent Estornel interrogé sur Europe 1, agissant en porte-parole de l'étude marseillaise et rappelant l'état du calendrier scientifique en France, conclut par le souhait de "présenter tous ces résultats d’études et de travaux faits en France comme à l'étranger, lors d'un congrès qui se tiendrait à Marseille. L'idée étant de synthétiser ces travaux pour présenter des solutions au gouvernement dans le but de la réouverture des salles de spectacle." La date souhaitée pour ce faire ? "On l'espère avant la tenue des Festivals de l'été."