Réouverture des lieux de culture vivante : vers un baromètre à 6 niveaux ?
Le monde de la Culture vivante attend depuis le tout début de la crise un discours précis et une transparence quelconque sur les critères qui pourraient éventuellement permettre sa réouverture (sans même parler du fait que ces critères devraient idéalement correspondre à une logique factuelle et scientifique).
Il faudra attendre encore un peu car si le Ministère de la Culture communique sur le fait qu’il travaille dans cet objectif, il refuse toujours de communiquer le moindre détail (calendrier de travail et de communication des décisions, identité des interlocuteurs, éléments nourrissant la réflexion, etc.).
La Ministre Roselyne Bachelot affirme certes qu’elle refuse de s’enfermer dans un calendrier en raison de l’incertitude sanitaire (en cette période de pandémie extrêmement variante), mais des éléments de prévision indispensables à l’organisation du monde de la culture et à l’information des citoyens existent néanmoins, dont un document de travail auquel ont eu accès nos confrères du quotidien Le Parisien.
Précisément, c’est un système évolutif sur lequel planche la rue de Valois depuis plusieurs semaines : une échelle graduée nationale en 6 niveaux (de 0 inclus à 5), selon les secteurs. Les musées pourraient ainsi rouvrir avant les salles de spectacle vivant (comme l’indiquait la Ministre en interviews), mais apparemment sans différenciation de situation individuelle et locale (qui permettrait de différencier une grande salle moderne avec un système de ventilation performant dans un territoire où le virus circule moins, par rapport à une petite salle confinée et sans aération dans un département en forte tension hospitalière). Ce baromètre viendrait donc soit en complément soit en opposition avec le projet de labellisation des salles de spectacles qu’évoquait la Ministre. Cette logique de baromètre ne semble donc pas très claire au final, notamment en ce qu’elle différencie sans vraiment différencier (si la réouverture des musées est prioritaire, ceux-ci auront-ils un ou deux échelons d’avance sur les autres ? chaque secteur aura-t-il sa propre échelle et/ou ses effets de cliquets particuliers ?). D’autant que ces effets de seuils ne laissent au final que très peu de visibilité aux lieux de culture, ou pour le moins beaucoup d’incertitude tant la situation sanitaire peut empirer en très peu de temps (en raison de tout ce qui est autorisé aux dépens du monde culturel).
Un tel baromètre permettrait toutefois de donner un début de visibilité aux lieux de culture vivante, d’autant plus que cette échelle graduée serait basée sur des données objectives et publiques fixées en concertation avec le Ministère de la Santé (circulation du virus et taux d’occupation en lits de réanimation) : évitant le tout ou rien (fermé ou ouvert), annoncé dans l’attente anxieuse des conférences de presse du jeudi soir pour le samedi. Voici les 6 niveaux envisagés :
Stade 0 (le stade actuel) : fermeture des établissements culturels, maintien des seules activités de travail (création, répétitions) et de captation
Stade 1 : service minimum de la culture pour les jeunes (accueil de groupes scolaires et périscolaires en demi-classes ou groupes constitués)
Stade 2 : Réouverture avec couvre-feu à 18h
Stade 3 : Réouverture avec couvre-feu à 20h ou 21h
Stade 4 : Réouverture sans couvre-feu hors “configurations debout” pour les concerts
Stade 5 : Réouverture dans toutes les configurations
Toutefois, même ce Stade 5 maintiendrait de nombreuses contraintes et notamment en termes de jauge (des taux de remplissage qui correspondraient aussi au niveau atteint). Un Stade 6, 7, 8 ou autres (synonyme de retour vers la situation pré-Covid) n’est pas encore envisagé.
D’autant que les décisions du monde de la culture risquent comme les autres de devoir encore infiniment varier selon les variants du virus et les arrivages changeants des livraisons et administrations de vaccins. Surtout, ce modèle doit encore passer à travers les mailles du Ministère de la santé et du Premier ministre (qui avaient par exemple refusé en octobre un aménagement du couvre-feu pour permettre l’ouverture des salles de spectacle, malgré l'appui du Ministère de la Culture à la proposition).