La Culture proteste et conteste
Lorsque le Président de la République Emmanuel Macron annonce le 24 novembre dernier la réouverture des commerces non-essentiels pour le 28 novembre, les lieux de culture vivante (mieux préparés, mieux protégés et sans cluster), parce qu’ils n’en font toujours pas partie, vivent une nouvelle fois cette humiliation comme une injustice. Moins que non-essentiels, les théâtres, opéras et musées, les salles de concerts et de cinéma attendaient donc la date du 15 décembre pour rouvrir (une "attente" qui exige une activité de préparation, de production, de communication aussi intense que jamais). Sauf qu'une condition était imposée pour cette réouverture : la baisse du nombre de cas positifs quotidiens détectés (à moins de 5000). Il semblait (ou il aurait semblé) toutefois logique que le Gouvernement ait choisi ces chiffres comme la suite prévisible de l'évolution sanitaire, or cette prévision s'est avérée complètement fausse (la courbe ne baissant nullement). Des responsables gouvernementaux laissaient pourtant entendre encore une semaine avant l’échéance que l'objectif chiffré s'adapterait à la situation (comme il l’avait déjà fait) pour permettre au déconfinement, y compris culturel, d'avoir lieu. La douche fut donc d'autant plus froide, lors des annonces du Premier Ministre le 10 décembre, que les directeurs de salle étaient encore convaincus l'avant-veille qu'ils rouvraient. Douche devenue glacée le lendemain 11 décembre avec l'interview de Roselyne Bachelot se confinant à la discipline gouvernementale contre la culture et faisant même des annonces encore plus pessimistes.
La Culture est donc en colère face à sa précarité et cette injustice (les autres secteurs qui ont eu le droit de rouvrir pour faire empirer les chiffres, tout comme les prochains relâchements des fêtes le feront, concourent à maintenir fermés les théâtres où les consignes sont mieux respectées qu'ailleurs).
La colère s'est traduite dans la rue par des manifestations à travers la France le 15 décembre (qui aurait dû être le jour de réouverture des salles).
Cette injustice ressentie, la Culture veut la faire reconnaître comme une injustice, littéralement. Un "référé liberté" a ainsi été déposé, pointant quatre libertés fondamentales que la décision gouvernementale viendrait bafouer : liberté artistique, liberté d'association, liberté d'entreprendre, principe d'égalité avec les autres commerces.
Le référé liberté étant une procédure d'urgence, un jugement doit être prononcé dans les 48 heures, déterminant "si une décision administrative porte une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale." La décision peut ensuite être contestée devant le Conseil d'État.