Le programme 2019 avait étonné par sa nouveauté (notamment Tosca pour la première fois au Festival) mais aussi l'abandon des marqueurs du festival que sont les opéras baroques et mozartiens. Si ce style et ce compositeur seront bien représentés cette année, Aix poursuit sa mue constante vers la modernité musicale.

Le Festival s'ouvrira ainsi au Grand Théâtre de Provence le 30 juin sur le premier chef-d'œuvre d'opéra moderne : Wozzeck d'Alban Berg, mis en scène par Simon McBurney (avec vidéos de William Duke et chorégraphie de Leah Hausman). Sir Simon Rattle dirigera le London Symphony Orchestra, le Chœur de Chambre de la Philharmonie d'Estonie et la Maîtrise des Bouches-du-Rhône avec des grandes voix solistes : Christian Gerhaher (dans le rôle-titre), Anja Kampe (sa tragique femme Marie), Daniel Brenna (Tambour-Major), Evan LeRoy Johnson (l'ami Andres), Peter Hoare et Brindley Sherratt (les ennemis, Capitaine et Docteur) ainsi que J’Nai Bridges en Margret.

La modernité XXe siècle regarde vers l'Allemagne ainsi que vers la Russie, avec Le Coq d'or de Rimski-Korsakov créé de manière posthume en 1909, ici mis en scène par le très moderne Barrie Kosky (qui prolonge son exploration du répertoire slave, peu après son Prince Igor à Bastille). Sabine Devieilhe aura l'occasion de revenir au Festival qui l'a formée dans son Académie et programmée depuis. Elle sera Reine aux côtés du Tsar Dmitry Ulyanov, et de L'Astrologue Andrei Popov, sous la baguette d'Aziz Shokhakimov.

En parallèle également au Théâtre de l'Archevêché, un Mozart comme il sied, mais choix étonnant et très moderne. Il s'agira en effet de Cosi fan tutte, qu'Aix a pourtant proposé il y a quatre ans seulement, mais c'était sous une autre direction et dans une autre mise en scène : la sulfureuse version de Christophe Honoré qui cède le plateau à celle de Dmitri Tcherniakov. Thomas Hengelbrock dirigera l'Ensemble Balthasar Neumann, le Chœur de l'Opéra de Lyon (qui a désormais un partenariat annuel, reprenant chaque saison dans son théâtre une production d'Aix) avec les solistes Véronique Gens (Fiordiligi), Claudia Mahnke (Dorabella), Richard Croft (Ferrando), Russell Braun (Guglielmo), Georg Nigl (Don Alfonso) et Nicole Chevalier (Despina).

L'autre pilier de l'identité aixoise, le baroque sera accueilli au Théâtre du Jeu de Paume avec Le Couronnement de Poppée. Leonardo García Alarcón dirigera Jacquelyn Stucker et Jake Arditti (Poppée et Néron), Fleur Barron et Paul-Antoine Bénos-Djian (Ottavia et Ottone). La mise en scène est confiée à Ted Huffman dont la lyricographie très riche va jusqu'aux créations contemporaines. 

La création mondiale justement, sera la nouvelle œuvre de la compositrice cardinale de sa génération : Kaija Saariaho présentera Innocence (fruit de trois années de composition). Un spectacle assurément polyglotte (en anglais, finnois, tchèque, roumain, français, suédois, allemand, espagnol et grec -heureusement surtitrés) mis en scène par Simon Stone (venant du théâtre mais de plus en plus en vu à l'opéra). Susanna Mälkki dirigera Magdalena Kožená (Serveuse), Anna Prohaska et Markus Nykänen (fiancés), Tuomas Pursio et Sandrine Piau (beaux-parents), Jukka Rasilainen (Prêtre), Lucy Shelton (enseignante), Vilma Jääskeläinen, Beate Mordal (Lilly), Camilo Delgado Diaz (Jeronimo) ainsi que les mêmes forces instrumentales et chorales que pour Wozzeck.

Leonardo García Alarcón dirigera également L'Orfeo (premier chef d'œuvre d'opéra, composé par Monteverdi) avec ses chœurs, orchestres et solistes habituels (fortement similaires à ceux programmés pour Versailles). Initialement annoncée dans la mise en espace de Jean Bellorini, la représentation aura lieu en version concertante.

Les récitals mettront en vedettes deux étoiles montantes, aux voix diamétralement opposées. La soprano Marie-Laure Garnier, Voix des outre-mer 2019, Lauréate de l'Académie d'Aix 2018 comme sa pianiste Célia Oneto Bensaid donnera à l'Hotel Maynier d'Oppède un programme "Voix de la Finlande". Le contre-ténor Jakub Jozef Orlinski (qui multiplie toujours les récitals) dans un programme "Baroque-Star" accompagné par le pianiste Michał Biel au Conservatoire Darius Milhaud. 

Toujours au Conservatoire, et juste après leurs prestations dans les opéras mis en scène, Sabine Devielhe et Christian Gerhaher offriront eux aussi des récitals : la soprano avec Mathieu Pordoy "Quand Richard rencontre Amadeus" (programme Mozart et Strauss dont elle chantait Zerbinetta en ouverture d'Aix 2018) ; le baryton avec Gerold Huber pour "La Bonne chanson" (Schubert, Berg, Fauré).

Enfin, une installation monumentale, sonore et visuelle dont Pierre Audi a présenté en juin 2019 une version condensée (seulement 15 heures) permettra de découvrir dans la Grande Halle du Parc des Ateliers, le cycle dantesque Aus Licht de Stockhausen (dont Le Balcon produit par ailleurs une série de mises en scène).