Le retour de Wagner pour la saison lyrique 2020 du Teatro Colón
L’information majeure à retenir de cette nouvelle saison au Teatro Colón est le retour, planifié sur quatre ans, de Wagner. 2020 verra en effet, au mois d’août, quatre représentations de L’Or du Rhin, Prologue du Ring dans la mise en scène du Français Arnaud Bernard et sous la direction musicale d’Enrique Arturo Diemecke, Directeur artistique du Colón et de la Orquesta filarmónica de Buenos Aires, tandis que les trois saisons suivantes (2021-2023) programmeront chacun des trois épisodes de la Tétralogie. L’Or du Rhin présentera les Argentins Sergio Spina (Mime), Guadalupe Barrientos (Fricka), Fernando Radó (Fasolt), Lucas Debevec Mayer (Fafner) et Carla Filipcic Holm (Freia), qui côtoieront les Américains Greer Grimsley (Wotan), Denyce Graves (Erda) et Andrew Cummings (Donner).
La saison lyrique aura débuté en mars (en Argentine, contrairement à l’Europe et à l’Amérique du Nord, la saison coïncide avec le calendrier civil) avec Nabucco de Verdi, dans la mise en scène de Stefano Poda et le retour de Renato Palumbo à la tête de l’Orchestre Permanent du Colón qu’il avait déjà dirigé pour Norma en 2018. Sebastián Catana sera Nabucco, Rebeka Lokar Abigail, Abramo Rosalen Zaccaria, Sergio Escobar Ismael et Guadalupe Barrientos Fenena.
Mis en scène par Rubén Szuchmacher et dirigé par le chef d’orchestre britannique Justin Brown, The consul de Gian Carlo Menotti sera donné en mai, après avoir été présenté pour la dernière fois au Colón en 1999 sous la direction scénique du compositeur lui-même. Cette reprise comptera une distribution de chanteurs argentins et de jeunes artistes de l’Institut Supérieur d’Art du Teatro Colón : Leonardo Neiva, Carla Filipcic Holm, Adriana Mastrángelo, Alejandra Malvino, Héctor Guedes, Carlos Ullán, Marisú Pavón et Marina Silva interpréteront respectivement les rôles de John Sorel, Magda Sorel, la Secrétaire du Consul, la Mère, l’Agent secret, Nika Magadoff, la Femme étrangère, Anna Gomez.
Les Pêcheurs de perles de Bizet (représenté une seule fois au Teatro Colón, en 1913 !) sera enfin à l’affiche fin mai, dans la mise en scène de Michal Znaniecki et sous la direction de Srba Dinić (entendu cette année au Colón pour La Damnation de Faust et Don Pasquale). Zurga sera chanté par Fabián Veloz, Nadir par Lawrence Brownlee / Sergey Romanovsky, Leïla par Hasmik Torosyan / Jaquelina Livieri.
En juin, les neuf représentations de Tosca de Puccini ressusciteront pour la sixième fois la production créée par Roberto Oswald en 1992 d’un opéra qui a par ailleurs été joué quarante fois depuis 1908, date de l’inauguration du bâtiment actuel ! Comme il l’avait fait en 2019 pour Turandot, Aníbal Lapíz se charge de la reprise de cette mise en scène et c’est Keri-Lynn Wilson qui mènera l’Orchestre Permanent. La première des trois distributions, exclusivement issue de la région du Rio de la Plata (Uruguay et Argentine), sera portée par María José Siri (Floria Tosca), Marcelo Puente (Mario Cavaradossi) et Erwin Schrott (Baron Scarpia), tous trois menant actuellement carrière en Europe, mais aussi l’expérimenté Luis Gaeta (le Sacristin), ainsi que Mario de Salvo (Cesare Angelotti).
Après Verdi et Puccini, l’Italie sera également représentée en septembre par Donizetti avec Lucia di Lammermoor mais aussi avec Nicola Berloffa qui en assura la mise en scène et Evelino Pidò qui retrouvera un répertoire et un pupitre qui lui sont familiers (voir notre compte-rendu de sa prestation au Colón en 2019 pour le Requiem de Mozart). Le personnage éponyme sera chanté par la soprano russe Albina Shagimuratova. Saimir Pirgu, ténor italien d’origine albanaise, sera Edgardo. Andrei Kymach, baryton ukrainien, interprétera Enrico. George Andguladze, basse géorgienne, chantera le rôle de Raimondo. David Astorga, ténor costaricien, complétera enfin cette distribution très internationale en incarnant Arturo.
Xerxès de Haendel, en novembre, ravira les amateurs de baroque. Alejandro Tantanian en signera la mise en scène tandis qu’Iñaki Encina tiendra la baguette. Cette production sera l'occasion de retrouver des chanteurs qui se sont illustrés dans des productions du Colón en 2019 : Raffaele Pe (Xerxès), Verónica Cangemi (Romilda), Luigi De Donato (Ariodate), tous trois dans L'Incoronazione di Poppea de Monteverdi, ainsi que Constanza Díaz Falú (Atalanta), remarquée dans Mitridate de Mozart. Ce casting sera complété par Paola Gardina (Amastre) et Nidia Palacios (Arsamene).
La Vida breve de Manuel de Falla, en version de concert, fermera ce programme d’opéras fin novembre. Le chef argentin Carlos Vieu (qui accompagnait Aida Garifullina dans son récital au Colón en août dernier) partagera la vedette avec Nancy Fabiola Herrera (Salud), Andeka Gorrotxategi (Paco), Anabella Carnevali (la Grand-mère), Ricardo Seguel (Sarvaor) et… la grande Lucero Tena, aux castagnettes, comme invitée spéciale !
Ces huit titres de répertoire, pivots de la saison lyrique, sont complétés par un cycle d'opéras de chambre, refondé autour de trois œuvres contemporaines suite au départ contraint de Marcelo Lombardero. Ezequiel Fautario mettra en œuvre la partition de The Second Violinist de Donnacha Dennehy (2017) et c’est sa collègue Natalia Salinas qui assumera cette charge pour La Hija de Rappaccini de Daniel Catán (1991), sur un livret inspiré d’une pièce d’Octavio Paz. Le troisième titre retenu sera, en toute fin d’année, la reprise de Bureau 470 de Tomás Bordalejo (2016) qui figurait déjà au programme 2019. Cette œuvre sera donnée en espagnol et c’est Mariano Moruja (remarqué en 2018 dans sa direction du chœur pour la première argentine du Requiem de Ligeti) qui dirigera les musiciens. La distribution de ces trois titres n’a pas encore été dévoilée.
Le Centre d’Expérimentation du Teatro Colón proposera également au mois d’août Le Corbeau de Toshio Hosokawa, « monodrame » pour mezzo-soprano (ce sera Adriana Mastrángelo) et ensemble, d’après le célèbre poème d’Edgar A. Poe (mise en scène de Federico Lamas et direction d’orchestre de Natalia Salinas).
"The Raven" m'a fait penser à une histoire de théâtre Noh japonais, explique Toshio Hosokawa. La vision du monde dans cette tradition n'est pas anthropocentrique. Certains personnages principaux peuvent être des animaux ou des plantes, certains des esprits. Poe décrit la chute du monde moderne rationnel comme la conséquence d'une invasion par un étrange animal :
Deux titres lyriques seront enfin dédiés aux enfants : Le Barbier de Séville de Rossini, en juin (direction musicale de César Bustamante et mise en scène de Carlos Trunsky). Le second, en septembre, Théodore et le robot sans nom, œuvre de théâtre musical sur une musique de Mozart comprenant des devinettes ayant trait à l’opéra. Elle est écrite et dirigée par Gonzalo Demaría.
D’autres pièces, hors du champ de l’opéra, viennent enfin agrémenter cette saison lyrique. Dès la mi-mars, le baryton Víctor Torres chantera les Huit Chansons pour un roi fou de Peter Maxwell Davies (répertoire d’une troublante continuité avec le rôle titre du Roi à l’écoute de Luciano Berio qu’il a interprété en 2019). Les mois de mai et juin seront ceux de deux récitals de sopranos : l’Italienne Mariella Devia, qui fera ses débuts sur la scène du Colón, ainsi que la Sud-africaine Pretty Yende. En juin également, le Stabat Mater de Pergolèse sera donné par la soprano Verónica Cangemi et la mezzo Sonia Prina, accompagnées par l’Orchestre Permanent dirigé par César Bustamante. Sera également entendu à pareille époque Le Chant de la Terre de Mahler (Orchestre Permanent dirigé par Enrique Arturo Diemecke avec la soprano Hannah Ludwig et le ténor Norbert Ernst).
Le Requiem de Schnittke sera célébré début août (Camerata Vocal du Chili dirigée par Juan Pablo Villarroel). En septembre, les Ancient Voices of Children de George Crumb résonneront sous la baguette d’Enrique Arturo Diemecke. Le Concert de la Loge accompagnant un récital du contreténor français Philippe Jaroussky, est programmé en octobre.
Le mois de novembre sera copieux et alléchant. L’Orchestre permanent sous la baguette de Ramón Tebar y jouera le même soir le Poème de l’amour et de la mer d’Ernest Chausson ainsi que les Chansons tristes du compositeur argentin Gerardo Gandini (avec le Chœur des Enfants du Teatro Colón et la mezzo María José Montiel). Le chef suisse Charles Dutoit interprétera également à cette période sous la direction de Miguel Martínez le Songe d’une nuit d’été de Mendelssohn ainsi que Les Noces de Stravinsky dont le plateau vocal sera formé de Jaqueline Livieri, Guadalupe Barrientos, Santiago Martínez et Hernán Iturralde. Ironie de la programmation, prendra place parmi les quatre pianistes des Noces… l’ex-femme de Dutoit, Martha Argerich. Le Magnificat en ré majeur de Bach et L’Ode au Tonnerre de Telemann (Orchestre philharmonique de Buenos Aires et Coro Orfeón de Buenos Aires dirigés respectivement par Mario Videla et Néstor Andrenacci) seront réunies pour un concert produit par le Colón mais délocalisé à la Usina del Arte de Buenos Aires. En décembre enfin, l’Orchestre Permanent (direction Diemecke), Mónica Ferracani (soprano), Florencia Machado (mezzo), Darío Schmunck (ténor) et Ricardo Seguel (basse) interpréteront la 9e Symphonie de Beethoven, deuxième hommage lyrique (après la Messe solennelle) au 250e anniversaire de la naissance de l’auteur musical de l’Hymne à la joie.
Enfin, le Teatro Colón festoie aussi en 2020, comme il se doit, le 250e anniversaire de la naissance de Beethoven. Les Porteños pourront ainsi assister à un festival qui lui sera entièrement consacré avec la collaboration de prestigieux invités (Martha Argerich, Charles et Annie Dutoit, Arta Arnicane, Dong Hyeck Lim, Lars Vogt, Homero Francesch…) et à un cycle « Connexion Bach / Beethoven ». Sur l’ensemble de la programmation et des cycles, ils écouteront nombre de sonates, les cinq concertos pour piano et les neuf symphonies. Les amateurs de chant lyrique ne seront pas en reste. Si Fidelio, programmé en 2016, n’est pas repris, la Messe solennelle sera donnée en juillet (chef : Luiz Fernando Malheiro, chanteurs : Mónica Ferracani, María Luján Mirabelli et Darío Schmunck). En décembre, l’Orchestre Permanent (direction Diemecke), Mónica Ferracani (soprano), Florencia Machado (mezzo), Darío Schmunck (ténor) et Ricardo Seguel (basse) interpréteront la 9e Symphonie, deuxième hommage lyrique à l’auteur musical de l’Hymne à la joie.