Rétrospective de la saison 2016/2017 au Théâtre des Champs-Élysées
Le TCE accueille en début de saison 2016 un récital 100% baroque centré sur le répertoire de Haendel. Cette production réunit des spécialistes de ce répertoire : Sandrine Piau et Christophe Dumaux, dirigés par Emmanuelle Haïm avec son ensemble Le Concert d'Astrée. En octobre, Jérémie Rhorer sort de son répertoire habituel pour diriger un Requiem de Verdi impressionnant, avec l'Orchestre national de France et le Chœur de Radio France. Quatre prestigieux solistes prennent part à cette représentation : Vannina Santoni, Alisa Kolosova, Jean-François Borras et Ildebrando d'Arcangelo. L'Opéra de Quat'Sous de Kurt Weill, mis en scène par Bob Wilson et exécuté par le Berliner Ensemble, créé par Brecht lui-même, est produit le même mois pour ce qui reste l'un des événements de la saison.
Vient le tour du contre-ténor Franco Fagioli de se produire dans un récital rossinien, avec l'ensemble orchestral grec Armonia Atenea et sous la direction de George Petrou. La curiosité attire le public parisien, ce répertoire étant habituellement dévolu à une mezzo-soprano ou une contralto. Le mois suivant, L'Enlèvement au Sérail de Mozart est joué en version concert avec l'Orchestre La Scintilla et son chef Maxim Emelyanychev. Les chanteurs Pavol Breslik, Olga Peretyatko, Claire de Sévigné et Nahuel Di Pierro apportent leurs timbres mozartiens à cette représentation.
Alberto Zedda, accueilli chaleureusement, dirige peu après Ermione de Rossini, pour ce qui restera sa dernière prestation, le maestro étant décédé le 6 mars 2017. Michael Spyres explore son registre vocal en Pyrrhus, aux côtés d'Angela Meade, Eve-Maud Hubeaux, Dmitry Korchak et Enea Scala. Autre événement majeur de la saison, Cecilia Bartoli conquiert le théâtre avec ses Musiciens du Prince-Monaco dont elle est Directrice artistique. Ses intenses pianissimi résonnent probablement encore dans les oreilles des spectateurs présents. Fin 2016, Jaroussky chante du Bach et du Telemann, poursuivant ainsi sa collaboration fidèle avec le Théâtre de l'avenue Montaigne. Le récital est placé sous la direction du violoniste et chef d'orchestre Julien Chauvin, à la tête de l'ensemble du Concert de la Loge.
Don Giovanni revient au TCE dans la mise en scène créée en 2013 par Stéphane Braunschweig. L’œuvre est une fois de plus dirigée par Jérémie Rhorer avec l'ensemble du Cercle de l'Harmonie, jouant sur des instruments d'époque. Le baryton-basse Robert Gleadow interprète le rôle important de Leporello qui tient les premières et dernières notes solistes de l'opéra et Jean-Sébastien Bou tient le rôle-titre.
Kožená et Haïm offrent une nouvelle collaboration avec leur programme intitulé Héroïnes Baroques. Cette représentation refait vivre des airs et symphonies, extraits de tragédies lyriques françaises des 17ème et 18ème siècles comme les souffrances de Phèdre, Médée, Phani, Émilie, Télaïre et Diane dans des œuvres de Rameau et Charpentier. L'incontournable Oratorio de Noël de Bach répond présent à l'approche des fêtes de décembre, exécuté par l'Orchestre et le Chœur de l'Âge des Lumières et dirigé par Masaaki Suzuki. Le célèbre Messie de Haendel clôt l'année 2016, dirigé par Hervé Niquet à la tête de son ensemble Le Concert Spirituel. Sa direction non conventionnelle produit un Messie énergique et plein de surprises.
Hervé Niquet (© Eric Manas)
Au premier mois de l'année 2017, Roberto Alagna et Aleksandra Kurzak s'affichent ensemble pour un concert placé sous la direction de Gogrio Croci avec l'Orchestre de Picardie, régalant le public de leur complicité et de leurs voix assurées. L'Arpeggiata de Christina Pluhar interpréte le Stabat Mater de Pergolèse en compagnie de la soprano Emöke Barath et du contre-ténor Tim Mead.
Carmen de George Bizet, mis en espace par Laurent Delvert, donne l'occasion à deux chanteurs d'exception, Marie-Nicole Lemieux et Michael Spyres de prendre les rôles mythiques de la cigarière et de Don José. Cette représentation est dirigée par l'australienne Simone Young avec l'Orchestre National de France. Vannina Santoni en Micaëla et Jean-Sébastien Bou en Escamillo complètent un casting exceptionnel. La semaine suivante, c'est au baryton Matthias Goerne et au pianiste Leif Ove Andsnes de donner trois récitals de Lieder de Schubert. La première soirée est consacrée à La Belle Meunière, la dernière au Chant du Cygne.
Au mois de mars, Le Retour d'Ulysse dans sa Patrie de Monteverdi est mis en scène par Mariame Clément. Elle choisit de mixer les esthétiques : le décor est construit sur trois niveaux (celui des simples mortels, celui des demi-dieux et celui des dieux). Des références à l'art sont parsemées dans cet opéra, en passant de Tarantino aux dessins animés d'Ulysse et Batman.
Le Stabat Mater de Rossini vient également se joindre au programme du TCE avec l'Orchestre National de France et le Chœur de Radio France, sous la direction de James Gaffigan avec Patrizia Giofi, Roxana Constantinescu, Paolo Fanale et Nahuel Di Pierro. Simon Boccanegra de Verdi donne l'occasion à Ludovic Tézier de prendre le rôle-titre sous la direction de Pinchas Steinberg avec l'Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo. Le contre-ténor Andreas Scholl et l'Accademia Bizanta bâtissent un récital autour de musiques italiennes du XVIIIème siècle comme celles de Vivaldi, Porpora, Ragazzi, ou encore Anfossi, sous la direction d'Alessandro Tampieri. Le mois de mars s'achève avec une adaptation pour enfants de La Belle-Hélène d'Offenbach, interprétée par Alix Le Saux dans le rôle-titre ainsi que des solistes et membres du chœur Unikanti.
Vient l'un des événements de la saison, joué à guichet fermé : Andrea Chénier de Giordano chanté par le ténor Jonas Kaufmann et la soprano Anja Harteros ! La représentation est dirigée par le jeune Omer Meir Wellber avec l'Orchestre de la maison Munichoise. Au mois d'avril, La Passion selon Saint-Matthieu de Bach est servie par l'Orchestre et le Chœur du Collegium Vocale Gent. Orlando Furioso de Vivaldi, une œuvre rarement donnée, est interprétée par Clémence Tilquin, sous la direction de Jean-Claude Malgoire.
Pelléas et Mélisande de Debussy est dirigé par le chef d'orchestre Louis Langrée dans une mise en scène d'Eric Ruf, qui a obtenu le prix de la critique. La distribution, presque exclusivement française, inclut Patricia Petibon (Mélisande) et Jean-Sébastien Bou (Pelléas). L'Orchestre National de France vient apporter un accompagnement luxuriant. Un remarquable travail d'équipe se fait ensuite entre le ténor Cyrille Dubois, le baryton Florian Sempey et la soprano Julie Fuchs, ainsi que le chef d'orchestre Alexandre Bloch pour la version concert des Pêcheurs de Perles de Georges Bizet.
Le compositeur Donizetti est également à l'honneur par l'Orchestre de chambre de Paris : la soprano russe Aida Garifullina et le ténor américain Lawrence Brownlee explorent en effet ce répertoire sous la direction de Speranza Scappuci, avec l'Orchestre parisien. Malgré l'annulation de Joyce DiDonato Ariodante de Haendel est un succès grâce à Alice Coote qui remplace la mezzo, DiDonato qui présente toutefois par la suite un concert-spectacle d'Art total, mêlant musique, danse et projection vidéo, en un répertoire composé d'airs baroques de compositeurs comme Haendel, Leonardo Leo ou encore Strauss (mais arrangé en orchestre baroque !) et conçu à la manière d'une réponse au choc des attentats de novembre 2015 à Paris.
Au mois d'avril, le TCE donne une œuvre rare de Jacques-Fromental Halévy : La Reine de Chypre. La prestation est compliquée par l'insoluble équation du remplacement du ténor Marc Laho à quelques jours de la représentation, pour un rôle totalement inconnu : après Cyrille Dubois lui-même obligé d'annuler, Sébastien Droy prend le relais la veille du concert, mais perd sa voix dès les premières minutes après un intense travail. Le concert marque néanmoins l'ouverture du cinquième Festival Palazzetto Bru Zane.
Le mois de juin est l'occasion d'une version concert : Il Signor Bruschino de Rossini, porté par le chef Enrique Mazzola, ainsi que Domenico Balzani, Alessandro Corbelli, Joalo Pedro Cabral ou encore Chantal Santon-Jeffery. Pretty Yende répond présente avec son récital, quelques mois après son triomphe en Lucia sur la scène de Bastille.
Pretty Yende (© Sebastien-Mathe)
Enfin, Douglas Boyd réunit son Orchestre de chambre de Paris dont il est Directeur musical et le Garsington Opera dont il est Directeur artistique pour une prestation des Noces de Figaro de Mozart. La forme concert permet de recentrer l'attention des spectateurs sur la musicalité de l’œuvre. Le Théâtre des Champs-Élysées clôt sa saison avec deux dates d'un concert de gala dédié à l’œuvre de Verdi, avec la soprano Vannina Santoni, le ténor Julien Dran, la mezzo Marie Karall ainsi que le baryton André Heyboer, sous la direction de Giampaolo Bisanti.