Cet orchestre atypique, émanant d’une étroite collaboration entre l’Agence pour l’Enseignement Français à l’Étranger (AEFE) et l’Orchestre Philharmonique de Radio France, a néanmoins offert une prestation virtuelle qui a vu la somme de ses instrumentistes exécuter, depuis leur lieu de confinement, une valse témoignant de la valeur symbolique et musicale d’une formation ni démunie, ni désunie.

Ce samedi 25 avril à 15H00 à Paris, il est 7H00 du matin à San Salvador, 10H00 à Buenos Aires, 13H00 à Lomé, 14H00 à Lisbonne, 16H00 à Damas, 21H00 à Hong-Kong et à Singapour, 23H00 à Sydney. Soixante-douze jeunes musiciens de trente nationalités différentes ont à cet instant précis, tout autour de la planète et sur de multiples fuseaux horaires, un rendez-vous virtuel avec leur chef d’orchestre, Adriana Tanus, professeur au Lycée français de Madrid à l’origine de la création de cette formation planétaire. Cette rencontre rassemble des élèves des lycées français de l’étranger de tout âge, de la sixième à la terminale. Leurs établissements dépendent de l’AEFE, structure sous tutelle du Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères fédérant un réseau sans équivalent dans le monde qui scolarise les quelques 370.000 enfants (dont 60% sont étrangers) de 522 écoles, collèges et lycées dans 139 pays.

Cette date aurait dû faire coïncider le point d’orgue du trentième anniversaire de la création de l’AEFE, en 1990, avec la Semaine de la langue française et de la francophonie ainsi que le concert public clôturant la sixième saison de l’Orchestre des lycées français du monde et du chœur international qui lui est adossé. La chorale du Collège Pierre Mendès France de Marcoussis (Essone), des élèves du Lycée international de Saint-Germain-en-Laye ainsi que d’autres chanteurs provenant de plusieurs lycées français d’Afrique (Cotonou, Ouagadougou, Yaoundé) forment cette cohorte vocale riche de ses 120 membres dirigée par Claire Perez-Maestro et Jean-Baptiste Cougoul. Le chant choral est effectivement inscrit au cœur de ce projet, notamment comme vecteur d’apprentissage de la langue française. 

Il était prévu que musiciens et choristes se réunissent à cette occasion à la Maison de Radio France et y interprètent un programme aussi ambitieux qu’éclectique : un extrait de La Vie Parisienne de Jacques Offenbach (« La Vapeur nous amène », chœur et orchestre), « Je te veux » d’Érik Satie (chœur et piano), un Te deum-jazz d’après Marc-Antoine Charpentier (pour chœur), le quatrième mouvement de la Symphonie n°9 « Du Nouveau Monde » d’Anton Dvořák, des chants africains arrangés pour chœur et orchestre (« Tshosholoza », « Tuendi oko komunda »), le premier mouvement du Concerto pour contrebasse et orchestre d’Andres Martin, des pièces de Karl Jenkins pour chœur et orchestre (Lament for the Valley ; The Peacemakers – 6. Healing light : A Celtic Prayer), ainsi que la chanson d’Édith Piaf « La Foule » (dans un arrangement pour chœur et orchestre). 

On imagine aisément la déception de cette jeunesse mondiale, de leurs formateurs et de leurs tuteurs artistiques, contraints d’annuler momentanément ce projet d’envergure, alors que les répétitions menées en février dernier au Lycée français de Vienne semblaient prometteuses. Durant une semaine, les musiciens de l’Orchestre des lycées du monde ont été encadrés et conseillés par des professionnels confirmés émanant des rangs de l’Orchestre Philharmonique de Radio France : Emmanuel André et Anne Villette (violons et altos), Jean-Claude Auclin (violoncelles et contrebasses), Cyril Ciabaud (bois) et Alain Manfrin (cuivres). Si les membres de l’orchestre de collégiens et lycéens du monde entier sont restés séparés par la distance en ce 25 avril, les miracles de la technologie ont tout de même pu les réunir virtuellement le temps d’un montage vidéo les montrant, chacun sur leur lieu de confinement, accompagnant l’Ambassadeur François Saint-Paul exécutant lui-même au piano l’une de ses compositions, la « Valse première pour Aude ». Si l’on peut se réjouir de voir un haut-fonctionnaire mélomane et musicien à la tête du poste diplomatique de la France en Autriche, il peut paraître plus surprenant, au regard de la finalité du projet de promouvoir le talent artistique de la jeunesse des lycées français, de voir apparaître ce dernier à l’écran au milieu de cet orchestre juvénile, comme ce fut d’ailleurs déjà le cas lors de la répétition générale à Vienne le 7 février dernier. 

   Concert de l'Orchestre des lycées français du monde, le 7 février 2020 (saison VI) au Lycée français de Vienne en podcast radio :

Quoi qu’il en soit, la prouesse technique de cette vidéo saura faire patienter jusqu’au 16 mars 2021 cette jeunesse légitimement impatiente, date à laquelle les membres actuels de l’Orchestre et de son chœur se retrouveront physiquement cette fois-ci, comme cela était prévu cette année, à l’Auditorium de Radio France pour enfin interpréter le programme pour lequel ils se sont tant investis.