Requiem pour Krzysztof Penderecki (1933-2020)
Né en 1933 dans les Basses-Carpates au sud-Est de la Pologne, dans une famille d'origine arménienne et musicienne (quoiqu'avocat et Directeur de banque, de père et grand-père), Krzysztof Eugeniusz Penderecki apprend la musique grâce à eux et en autodidacte (Guerre mondiale oblige), ce qui l'incite même dès 8 ans à tenter de premières compositions (dès ses 26 ans il remportera le premier prix du concours de Varsovie). Dès qu'il le peut, il s'inscrit au Conservatoire de Cracovie, où il reviendra comme professeur puis comme Directeur en 1972.
Krzysztof Penderecki va à rebours de l'évolution musicale contemporaine, mais contribuant en cela à tracer une nouvelle voie pour la modernité. En effet, alors que la musique du XXe siècle était allée en se complexifiant vers l'atonalité (refus de la tonalité) jusqu'au sérialisme (principe de composition où chaque paramètre sonore -hauteur, rythme, timbre etc.- est considéré comme le paramètre d'une série à répéter selon des procédés mathématiques), Krzysztof Penderecki qui compose d'abord une musique atonale et sérielle, en glissandi et clusters (grappes d'accords) revient ensuite à la tonalité notamment par la musique religieuse : dans la tradition d'un Jean-Sébastien Bach, il laisse une Passion selon saint Luc (1965-1966 et qui ouvrait encore le Festival de Salzbourg en 2018). Dans un autre genre typique et comme Brahms écrivit Un Requiem allemand, Penderecki compose son Requiem polonais et comme un autre compositeur contemporain qui a combattu le modernisme hermétique (John Cage) était passionné de champignons, Krzysztof Penderecki se spécialise dans la botanique.
Krzysztof Penderecki devient une figure majeure de la culture contemporaine polonaise et un nom incontournable parmi les compositeurs contemporains. Il nous lègue un riche catalogue d'environ 150 opus, poursuivant son travail de modernité spirituelle dans des formes traditionnelles (notamment 8 Symphonies), deux quatuors, et toujours un message profondément pacifiste (Thrène à la mémoire des victimes d'Hiroshima est composé en 1960, Dies Irae à la mémoire des victimes d'Auschwitz en 1967), une signature musicale qui (comme Ligeti par exemple) inspira de nombreux réalisateurs de cinéma (notamment Wojciech Has pour Le Manuscrit trouvé à Saragosse, William Friedkin dans L'Exorciste, Stanley Kubrick dans Shining, Andrzej Wajda avec Katyń ou encore Martin Scorsese dans Shutter Island).