Philharmonia, une série française au cœur de l'orchestre
Intrigue
Seule contre tous, la musicienne prodige et cheffe d’orchestre Hélène Barizet devient la première femme directrice d'un Orchestre permanent, le "Philharmonia" (le chef précédant étant mort en dirigeant Dvořák). Entre jalousies, envies et talents, elle doit sauver l'orchestre et s'appuie pour ce faire sur une autre virtuose, la jeune Selena Rivière qu'elle nomme premier violon. "Mais comment transmettre quand tout ce que l’on souhaite, c’est rompre avec le passé ?"
Le rôle principal de la série est tenu par Marie-Sophie Ferdane, ancienne pensionnaire de la Comédie-Française (2007-2013) mais également diplômée du Conservatoire de Grenoble en violon et chant. Lina El Arabi incarne la violoniste appelée à devenir sa soliste, "comme un footballeur qui serait coaché par Zidane" :
Épuisée par la charge et suivant une certaine représentation du génie torturé, Hélène, victime d'hallucinations craint un trouble génétique transmis par sa mère. Dans le drame familial, elle est épaulée par son père (sous les traits de Jacques Weber), mais trompée par son mari.
Parmi les visages connus, figurent également Tom Novembre (chanteur et acteur, frère cadet de l'artiste Charlélie Couture) en violoniste et Tomer Sisley.
Diffusion
Les six épisodes de la série seront diffusés par deux, les 23 et 30 janvier puis le 6 février.
Chaque épisode, d'une durée approximative de 50 minutes, sera disponible en replay sur le site de France TV (le premier est déjà en ligne).
Nos voisins Belges ont déjà pu l'apprécier le 17 janvier et les Suisses le lendemain, une nouvelle preuve de l'intérêt suscité par les séries françaises, dont certaines donnent notamment du pouvoir aux femmes (Dix pour cent dans le monde des agents artistiques et dont l'un des récents épisodes traitait d'ailleurs de Warlikowski, Mafiosa pour les activités répréhensibles).
"Philharmonia" est un projet qui s'inscrit dans le même univers classique (mais outre-Atlantique) que la série américaine Mozart in the Jungle, produite par Amazon pendant quatre saisons et qui a reçu le Golden Globe en 2016 comme meilleure série-comédie télévisée. Un jeune chef d'orchestre essaye de s'y frayer son chemin dans le monde de la musique, à l'instar de Gustavo Dudamel qui a servi d'inspiration pour les scénaristes.
Tournage
Le tournage de la série a duré six mois environ, dans différents lieux, le plus iconique étant le bâtiment de la Philharmonie de Paris. Sur une quinzaine de jours entre janvier et mars 2018, la grande salle Pierre Boulez a servi de décor pour les concerts filmés à cette occasion. Le rôle de l'orchestre a été joué par l’ONDIF (Orchestre National d’Île-de-France), après avoir préalablement enregistré les extraits utilisés pendant le tournage.
Les producteurs de la série ont même engagé un compositeur pour écrire deux œuvres originales : il s'agit d'Étienne Perruchon dont le catalogue contient pêle-mêle des opéras, œuvres orchestrales, de chambre ainsi que la bande originale du film Les Bronzés 3 (mari de l'héroïne dans la série, le compositeur est incarné par Guillaume Dolmans).
Concernant le jeu des acteurs principaux, les créateurs de la série étaient soucieux de rendre les gestes et le vocabulaire avec le plus grand réalisme possible. Afin d'atteindre cet objectif, chacun des acteurs a été guidé par des coachs professionnels issus du monde de la musique classique, pour éviter toute doublure. À noter également que la violoniste vedette de l'orchestre joue sur la musique enregistrée par Ann-Estelle Médouze, supersoliste de l'Orchestre national d'Île-de-France et dont nous vous parlions justement la semaine dernière, pour un concert... à la Philharmonie de Paris.
Entretien pour Ôlyrix :
Nous avons pu échanger avec Christophe Dilys, un jeune chef d'orchestre (Collegium de l'Orchestre des Jeunes d'Île-de-France et assistant à l'Académie de musique) et chroniqueur sur France Musique ("Tendez l'oreille" dans "France Musique est à vous"). Il était sur place pendant les séquences filmées à la Philharmonie, et nous raconte son travail avec les comédiens et l'orchestre :
« Le rythme du travail était haletant, avec le besoin de filmer beaucoup de plans en très peu de temps. Chaque erreur coûte très cher, donc il fallait être le plus efficace possible. J'ai eu trois rôles : assurer l'interface entre le tournage et l'orchestre pour gagner du temps, enseigner la direction d'orchestre aux acteurs ainsi que diriger l'orchestre pour certains plans, et travailler en duo avec le monteur pour faire bien correspondre la musique et l'image. Sur le plateau, j'étais chargé de vérifier que tout était crédible et précis dans l'exécution des séquences musicales (bandes enregistrées par l'ONDIF). Grâce aux régisseurs et à l'équipe de l'orchestre, tout a fonctionné comme pour une vraie session d'orchestre. Les musiciens que l'on voit à l'écran sont des vrais musiciens de l'ONDIF, avec également quelques instrumentistes habitués à jouer avec l'orchestre.
En ce qui concerne mon travail auprès des acteurs, j'ai eu entre 10 et 15 séances de travail avec Marie-Sophie Ferdane. J'ai également travaillé avec François Bureloup, un acteur qui incarne un autre chef d'orchestre dans la série. L'objectif était d'atteindre un certain niveau de réalisme en rendant les gestes aussi naturels que possible. C'est cela qui est difficile : donner du vécu à un geste fraîchement appris, tout en gardant l'idée que ce ne sont pas les acteurs qui dirigent, mais les personnages, ce qui rajoute une autre dimension et une autre difficulté ! Ce qui m'a impressionné, c'est combien l'acteur est un écorché, obligé de rester dans son personnage en plus de devoir maîtriser les gestes, ce qui est un peu surhumain.
L'équipe de tournage a été très soucieuse d'utiliser un vrai vocabulaire de musiciens dans les dialogues, et chaque suggestion été appréciée. À titre d'exemple, ils disaient "Cette œuvre se joue comme ça", alors que dans l'orchestre nous avons l'habitude d'employer le terme "la partition" ou "la musique". La question s'est posée également de féminiser le terme "maestro" en "maestra"... voire même d'employer ou non ces termes tout court ! À mon avis, ils ont réussi à atteindre un tel degré d'authenticité que tout de suite, un aspect moins réaliste va d'autant plus sauter aux yeux des spectateurs.
Une fois que tout était dans la boîte, ils m'ont invité dans le studio à travailler au montage. Avec les consignes de Louis Chouquette, on a fait un travail de dentelle pour arriver à bien synchroniser l'image et le son. »
Contexte et Enjeux
C'est une question en forme de constat qui est à l'origine de cette série : pourquoi y a-t-il si peu de femmes chef d'orchestre. La fiction renvoie bien entendu à la difficile réalité rencontrée par les femmes dans le monde de la musique classique. Comme le relatait notre article à ce sujet, la Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques pose chaque année la question “Où sont les femmes” dans la culture, sa réponse sempiternelle est : “Toujours pas là” (tous les détails à ce lien).
La série "Philharmonia" met également en scène les tensions avec un syndicaliste, le marketing et la communication envahissant la sphère artistique, la lutte de séduction avec les mécènes.
Objectifs
Démocratiser la musique, combattre son image élitiste en préservant au maximum le réalisme et l'authenticité du propos, tels sont les objectifs fixés par la productrice de la série, Rose Brandford Griffith (Merlin Prod.) qui s'est notamment entretenue avec l'AFP.
Objectifs accomplis ? À vous de le dire dans notre espace commentaires ci-dessous et en créant facilement et librement votre Blog Ôlyrix !