Biographie
Grace Bumbry
Grace Bumbry est née le 4 janvier 1937 à Saint Louis, Missouri aux Etats-Unis. Sa passion pour le chant est de longue date, nourrie par sa découverte de la contralto Marian Anderson, l’une des premières noires à faire carrière dans l’art lyrique. Son éducation musicale formelle commence après qu’elle remporte une compétition radiophonique à l’âge de dix-sept ans, en chantant « O Don fatale », un air de la Princesse Eboli dans Don Carlo de Verdi. Le prix est une bourse pour le conservatoire local. Malheureusement, celui-ci applique la ségrégation, et la refuse. Qu’à cela ne tienne, les responsables du concours s’accordent avec le College of Fine Arts de l’Université de Boston, où elle rentre en 1955. Elle déménage ensuite à Northwestern à Chicago, où elle rencontre la grande soprano wagnérienne Lotte Lehmann, qui devient son mentor, et la persuade d’aller étudier à l’Académie de Musique de l’Ouest à Santa Barbara en Californie.
Après un premier prix au Metropolitan Opera Council Auditions en 1958, elle part débuter sa carrière en Europe. Elle fait ses débuts sur scène dans le rôle d’Amnéris dans Aïda de Verdi à l’Opéra de Paris en 1960, devenant la première noire à s’y produire. L’engouement critique est tel que Wieland Wagner lui propose de chanter Vénus à Bayreuth dans Tannhäuser de Wagner. Certaines franges du public sont heurtées à l’idée qu’une noire puisse chanter sur la "colline sacrée" (surnom du palais des festivals de Bayreuth). Malgré la controverse, Grace Bumbry ne se laisse pas intimider, et livre une performance si inoubliable que les ovations durent une demi-heure entière. Grace Bumbry, surnommé la « Vénus noire », devient un phénomène. Suivent ses débuts à Covent Garden en 1963 et à la Scala en 1964, les deux fois en Princesse Eboli (Don Carlo). En 1964, elle chante Lady Macbeth dans Macbeth de Verdi pour ses débuts à l’Opéra d’Etat de Vienne. C’est son premier rôle de soprano, alors que jusque-là elle avait surtout chanté les grands rôles de mezzo-soprano verdiens (Eboli et Amnéris dans Don Carlo et Aïda, ainsi qu’Ulrica dans Un Bal Masqué et Azucena dans Le Trouvère), ou des rôles à cheval entre les tessitures tels que Vénus dans Tannhäuser.
Après avoir conquis les plus grandes scènes d’Europe, elle fait ensuite ses débuts sur la plus grande scène de son pays natal, chantant Eboli (Don Carlo) au Met en 1965. L’année suivante, elle donne l’un de ses plus grands rôles, Carmen de Bizet, avec Jon Vickers en Don José, à la fois au Festival de Salzbourg et à l’Opéra de San Francisco.
Dans les années 70, elle donne une orientation à sa carrière nettement plus centrée sur les rôles de soprano, diminuant ses interprétations de rôles de mezzo-soprano, hormis celle de la Princesse Eboli (Don Carlos). Cette décision est controversée, car si tout le monde s’accorde à dire qu’elle est l’une des plus grandes mezzo-sopranos de son époque, sa capacité à assurer des rôles de soprano est parfois mise en doute. Toutefois, elle connaîtra de nombreux succès dans ce répertoire. Elle chante ainsi Salomé de Strauss à Covent Garden en 1970, puis Tosca de Puccini au Met l’année suivante. En 1974, elle donne Jenufa de Janáček en italien à la Scala. En 1977, elle débute même le rôle de Norma de Bellini au Festival Martina Franca. L’année suivante, elle alterne en moins de deux semaines le rôle de Norma et celui d’Adalgisa (face à Montserrat Caballé) dans la même production à Covent Garden.
Plus tard dans sa carrière, elle remet l’accent sur des rôles de mezzo-soprano. L’un de ses derniers grands rôles en est un double, dans les Troyens de Berlioz à l’occasion de l’inauguration de l’Opéra Bastille en 1991. Elle ne devait initialement chanter que Cassandre, mais Shirley Verrett se voyant contrainte d’annuler sa performance en raison d’une grève pour la toute dernière performance, Bumbry assure les deux partitions avec brio ce soir là. Ses adieux à la scène ont lieu à l’Opéra de Lyon en 1997. Elle chante Clytemnestre dans Elektra de Strauss. Elle se consacre ensuite à l’enseignement, donnant des master classes à travers le monde. Toutefois, elle n’abandonne pas tout à fait la scène, ayant été Monisha dans Treemonisha de Scott Joplin au Théâtre du Châtelet en 2010 et la Comtesse dans La Dame de Pique de Tchaïkovski à l’Opéra d’Etat de Vienne en 2013.
Grace Bumbry s'éteint le 7 mai 2023 à l'âge de 86 ans à Vienne (ville d'adoption et d'opéra).