Cycles de Mahler et bonheur au Festival Radio France Occitanie Montpellier
Le programme de cette soirée repose sur deux cycles, aux parallèles et miroirs déchirants.
Comme le rappelle justement François-Xavier Szymczak lors de sa présentation du concert diffusé en direct sur les ondes de France Musique, les poèmes choisis par Mahler pour les Kindertotenlieder sur les plusieurs centaines écrits sur le sujet par Friedrich Rückert, meurtri, ne se veulent à aucun moment larmoyants ou plongeant dans la désespérance. Ils évoquent bien entendu la mort tragique et injuste de ces enfants (la traduction littérale du titre du cycle, et qui résonne terriblement avec la mort de la fille aînée de Mahler, atteinte par la scarlatine, deux années après cette composition).
Puis, et décidément, la Symphonie n°4 de Gustav Mahler s’impose dans ce concert et cet été au sein de la programmation des Festivals. Après l’Orchestre de Paris et son chef Klaus Mäkelä à Evian, Mikko Franck aborde ici à son tour cette œuvre qui dégage dans son premier mouvement bucolique et campagnard une humeur presque réjouissante que le chef met pleinement en relief.
Mikko Franck conduit l’Orchestre Philharmonique de Radio France sur ces chemins avec toute la tendresse requise, sans jamais forcer le trait ni surajouter du sentiment. Sa direction n’apparaît jamais affectée et ravive toutes les couleurs de l’orchestre. Il trouve avec la mezzo-soprano Marianne Crebassa une partenaire attentive, s’immisçant dans cette même trajectoire de simplicité et presque d’émerveillement de l’enfance. La voix longue et pleine aux aigus allégés s’inscrit dans des couleurs irisées et déploie un registre grave imposant. Toutefois, elle creuse quelquefois un peu ces mêmes graves afin d’obtenir certains effets plus dramatiques (notamment lors du premier Lied, "Maintenant le soleil va se lever, si brillant") au détriment de l’équilibre de la ligne vocale générale. L’interprète trouve son plein épanouissement dans le Lied final ("Par ce temps, par cette averse") où le chant s’expose à son zénith au niveau de l’émotion et de la transmission.
La violoniste premier solo Ji-Yoon Park entraîne tout l’orchestre dans son lumineux sillage pour la Symphonie. Mikko Franck étire quelque peu le mouvement dit Tranquille mais il permet à tous les bois de l’orchestre de révéler la splendeur de leur sonorité (notamment des contrebasses) et d’amener le public vers un état de grâce.
La soprano Melody Louledjian habite le merveilleux Lied final "Joie de la vie céleste" tiré du cycle Le Cor merveilleux de l’enfant du même Mahler, avec humilité et presque timidité, la voix manquant un peu de relief et de projection pour la grande salle du Corum. Les aigus par contre plus libérés brillent d’un éclat certain.
Une minute de silence traduisant l’émotion du public suit la fin de la symphonie avant que ce dernier n'applaudisse à tout rompre.