Hommage à Puccini à Liège : une éternelle jeunesse !
Pour l'année Centenaire de la mort de Giacomo Puccini (le 29 novembre 1924), l’Opéra de Liège programme une soirée concertante réunissant deux de ses œuvres de jeunesse, composées alors qu’il est encore étudiant : la Messe de Gloire (ici donnée dans une version pour ténor et baryton) a été écrite pour son examen à l’Istituto Musicale Pacini en 1880 (quand Puccini a 22 ans) tandis que l’opéra-ballet Le Villi (qui trouve son inspiration dramaturgique dans la même légende que le ballet Giselle d’Adolphe Adam) est composée trois ans plus tard (10 ans avant Manon Lescaut) pour un concours auquel Puccini est invité à postuler par Amilcare Ponchielli (cette dernière œuvre est livrée sans surtitrage, ce qui ne permet hélas pas au public d’entrer dans la dramaturgie). Le compositeur est donc encore bien jeune lorsqu’il livre ces deux opus. Il ne terminera que cinquième au concours. Pourtant, tout Puccini est déjà là. Assembler ces deux œuvres a du sens : d’abord par leur durée (1h chacune), par leur effectif, par leur période de composition, mais également par ce qu’elles symbolisent du parcours du compositeur, destiné par ses parents à composer de la musique religieuse, mais qui préfère (et ce dès la Messe de Gloire) s’orienter vers des œuvres plus théâtrales.
La soirée est menée par le Directeur musical de la maison, Giampaolo Bisanti, avec les Chœur et Orchestre de l'Opera Royal de Wallonie-Liège. Si cette version concert ne permet pas de voir le ballet des Villi chorégraphié, le chef compense à sa manière, par son investissement : il saute, s’agenouille, étend les bras en fléchissant les genoux, faisant tourbillonner sa baguette et valser sa main gauche pour assurer à la fois l’expressivité et la précision de l’interprétation. Il apporte un soin constant aux équilibres, ce qui n’empêche pas chaque pupitre de s’exprimer pleinement, avec relief, souffle et légèreté : les traits des cordes sont fins, les percussions sont majestueuses, les cuivres sont chevaleresques et les bois mystérieux. Le Chœur manque certes d’homogénéité, ce qui nuit à son éclat, mais la douceur de ses phrasés chaloupés et l’enchevêtrement de ses voix offrent de beaux passages.
Le ténor Matteo Lippi (Roberto dans Le Villi) est particulièrement salué par le public. Malgré son expression faciale minimaliste, il parvient à se détacher de sa partition pour transmettre l’émotion par son chant et sa diction soignée. Son timbre corsé et chaud monte avec facilité et souplesse dans les aigus, même si les passages de registres montrent une légère fragilité.
Baryton puccinien par excellence (référence notamment dans les rôles de Scarpia dans Tosca et de Rance dans La Fille du Far-West), Claudio Sgura paraît étonnamment peu à son aise dans la Messe, qui semble trop solliciter ses aigus, déséquilibrés par un vibrato trop large. Il est bien plus convaincant en Guglielmo dans Le Villi, où son expressivité, sa prestance et son sens du récit, mais aussi son beau legato et sa couverture vocale, sont mieux mis en valeur.
Maria Teresa Leva, qui chante Anna dans Le Villi, expose une voix large au lyrisme duveteux et à l’expressivité exacerbée. Elle ravit notamment par ses longs aigus, tenus et ronds, ainsi que son timbre riche et nourri.
Si le chef, qui finit la soirée à bout de souffle, interrompt d’un geste sec les applaudissements qui s’élèvent malencontreusement entre deux mouvements de la Messe, le public laisse éclater sa satisfaction à la fin de la soirée, tapant longuement des pieds et des mains pour remercier les artistes.