L’Oratorio de Noël exalte la Chapelle de Versailles
Les concerts donnés dans la Chapelle royale du Château de Versailles constituent toujours un événement. D’abord pour la magnificence du lieu, mais aussi pour son acoustique très adaptée à la musique sacrée. L’Oratorio de Noël est composé de six parties, soit six cantates, composées par Jean-Sébastien Bach en 1734, pour quatre solistes et un chœur. Le livret de ces six cantates forme un tout narrant la naissance du Christ jusqu’à l'Épiphanie, d’après les évangiles selon Saint Luc et Saint Matthieu. Ce concert est centré sur quatre des six cantates : les deux premières et les deux dernières.
Laurence Equilbey (© Julien Mignot)
Laurence Equilbey dirige l’ensemble du Poème Harmonique sans baguette. Sa gestuelle est tantôt minimaliste et sans chichi, tantôt nerveuse et sautillante, pour impulser une énergie. L’orchestre, composé de très jeunes musiciens, semble habité d’une grande cohésion, les instrumentistes se souriant en jouant, de pupitre en pupitre. La première cantate est rythmée par les acclamations et les appels des trompettes. La seconde laisse place à une douce apesanteur, marquée par le son suave du hautbois et la douce musique de la flûte. La violoniste soliste occupe une partie de la cinquième cantate avec une partie magnifiquement accompagnée par le hautbois, le violoncelle et l’orgue, tandis que des vents impérieux s’imposent dans la sixième.
Le Chœur Accentus dévoile une grande énergie, piquant ses premières notes avec exaltation. L’équilibre des voix est soigné, jusqu’aux hautes-contre chantant en voix de fausset, apportant une pureté vocale angélique. Spécialiste du genre, le chœur joue sur les nuances et sur les résonances pour mettre en valeur ses airs. Les chanteurs articulent parfaitement leur texte, qui en est parfaitement compréhensible aux germanophones, sans recours aux surtitres proposés (ce qui est d’ailleurs rare dans ce répertoire).
Le Chœur Accentus (© Anton Solomoukha)
Les parties solistes sont réparties entre un ténor, interprétant l’Évangéliste, une soprano, une alto et une basse. Le premier, dont le siège est positionné au milieu de la scène (tandis que les trois autres sont sur les côtés), est interprété par Werner Güra, dont le timbre brillant dans l’aigu, qu’il a solide, est typique des voix de ténors mozartiens. Si ses vocalises sont parfois saccadées, sont chant est nuancé et sa prosodie soignée.
Emöke Baráth (© DR)
Emöke Barath interprète la partie pour soprano de sa voix puissante au timbre riche et soyeux. Si la voix est mal assurée lorsqu’elle tient ses notes droites, son vibrato est chaud et régulier, véhiculant joliment l’émotion. Elle gère parfaitement son souffle, reprenant sa respiration avec un grand sens du phrasé. Michaela Selinger interprète le rôle d’alto, tenant sa partition à bouts de bras, loin devant elle. Sa robe pourpre constitue la seule note de couleur sur scène, tous les autres protagonistes étant vêtus de noir. Ses envolées dans les aigus sont très aériennes grâce à un legato parfaitement maîtrisé. En revanche, son souffle peine parfois à la porter jusqu’à la fin de ses phrases lorsque celles-ci se prolongent. Son registre grave souffre par ailleurs d’une projection limitée. Très impliquée, elle chante les parties de ses collègues du bout des lèvres lorsqu’elle est assise sur sa chaise. Elle partage cette caractéristique avec la basse Andreas Wolf. La voix tonnante de ce dernier est parfaitement ancrée sur l’ensemble de sa tessiture, profonde et chaude dans les graves et resplendissante dans le registre medium. Il laisse résonner ses aigus dans lesquels il vocalise avec fluidité, puis projette ses graves avec une douceur suave dans la cinquième cantate (Mon âme ne commettra point de mal). Maîtrisant parfaitement sa partition, il n’y jette que quelques coups d’œil, fixant autrement son regard intense sur le public attentif. Déformant sa bouche vers la gauche lorsqu’il chante, il racle les « ch » du fond de sa gorge.
La distribution, parfaite de bout en bout, offre ainsi un concert d’une grande qualité, servant une œuvre qui plonge le spectateur dans l’esprit de Noël. Vous aussi, prolongez la magie des fêtes en découvrant ici toutes les offres de notre espace billetterie : pour les fêtes et pour 2017 !