Chants Libres du 22 au 26 juin 2023 à travers la France chorale
Le point commun des ensembles invités à animer ce festival est d’avoir déjà reçu le Prix Liliane Bettencourt pour le chant choral. Pour chacun, ce prix a eu un impact fort et durable : « Le Prix Bettencourt est d’abord la reconnaissance d’un travail et de sa qualité », explique Nicole Corti, qui a la particularité d’avoir été deux fois lauréate du prix, en 2002 avec La Maîtrise Notre-Dame de Paris et en 2010 avec le Chœur Britten (qui en fusionnant avec les Chœurs et Solistes de Lyon devint le Chœur Spirito). Et cette reconnaissance est parfois déterminante : « Monter un ensemble dévolu aux musiques d'aujourd'hui n'était pas simple, nous avons été des pionniers, ce soutien était donc important », explique Roland Hayrabedian de Musicatreize. Léo Warynski des Métaboles insiste lui aussi sur cet impact : « Cette reconnaissance ouvre la porte de Festivals et permet de se faire entendre davantage ».
Bien sûr, le soutien est aussi financier, avec des implications très concrètes : « Le prix nous permet de redonner des programmes dans les meilleures conditions, et plus largement, d’aller dans les détails. Seuls, nous n’aurions pas eu l’assise financière suffisante pour faire un travail de fond si important », admet Nicole Corti comme Mathieu Romano d’Aedes : « Ce prix nous a permis d'enregistrer notre premier disque, qui a contribué à nous développer et nous faire connaître. »
Et en tant que Présidente du Jury de ce Prix Bettencourt, Laurence Equilbey a une vision panoramique : « Il y a de grands talents en France, et le prix contribue à leur éclosion mais doit permettre de structurer davantage encore cette compétence. On observe de très bons groupes, chœurs et maîtrises qui naissent et se développent. La Fondation les aide à se développer mais elle doit faire effet de levier pour de véritables politiques publiques et un coup de pouce de tout le mécénat pour l’art vocal. C’est une pratique onéreuse et exigeante mais qui participe de la création contemporaine, avec le substrat amateurs, la formation professionnalisante (nous soutenons ainsi au Conservatoire à rayonnement régional de Paris le Département Supérieur pour jeunes chanteurs et le Jeune Chœur de Paris). »
Fruit également du soutien de la Fondation Bettencourt, ce Festival Chants Libres n’en est pas à sa première édition : il est né au cœur de la tempête, en pleine pandémie, lorsque les ensembles indépendants étaient en difficulté. « Le titre du premier, en 2020 “Ensemble enchantons l’été” était parfaitement trouvé : nous étions tous confinés chez nous avec cette sensation terrible que nous ne pourrions plus faire de la musique, sans savoir jusqu’à quand. Et la Fondation s’est alors mobilisée pour que nous puissions chanter ensemble en plein air, retrouver le public », se rappelle Léo Warynski. Même son de cloche chez Laurence Equilbey : « Il y avait un sentiment de libération, et nous avions choisi avec Leonardo García Alarcón de chanter Bella Ciao (dont il a chanté le solo) ainsi que de capter un concert de musique sacrée à la Philharmonie ». Puis, « en 2021, l'idée était pleinement d'aller dans les territoires, de chanter pour des gens qui ne sont pas habitués à la musique chorale et même aux concerts », détaille Mathieu Romano. Une évolution qui se poursuit donc cette année avec un Festival concentré sur quatre jours.
Ce nom même de Festival, Chants Libres, « résonne avec la polysémie du mot chant/champ (car la Fondation nous laisse Champ Libre) » indique Léo Warynski des Métaboles, qui insiste sur l’universalité du chant a cappella : « on peut chanter partout tout le temps ». Mieux, « le chant est associé à tous les événements de la vie. Il nous accompagne avec des comptines, chants, chansons », explique Joël Suhubiette des Éléments. Ce nom est aussi l’écho du format de ce Festival, comme l’explique Laurence Equilbey : « il traduit la volonté de Françoise Bettencourt Meyers et de la Fondation d'offrir des surgissements, des happening, des concerts gratuits pour tous les publics y compris en déambulation : une vision surprenante et ouverte sur nos projets. »
Chants Libres en Auvergne Rhône-Alpes avec Nicole Corti et le Chœur Spirito
« Participer à ce Festival Chants Libres avec la Fondation Bettencourt Schueller qui œuvre tant pour la voix est un grand honneur. Le programme de notre concert du dimanche 25 juin à l’église Saint-François de Sales de Lyon mobilise 20 voix d’hommes et est intitulé “ÔM”. Il forme la base dans laquelle nous puisons six pièces pour les présenter avec sept chanteurs du Chœur Spirito en d’autres occasions durant ce Festival : en mai dans une médiathèque et une maison de retraite à Bourg-en-Bresse, et le 23 juin au Musée des Beaux-Arts et à la maison de retraite Thérèse Couderc à Lyon. Il s’agit de quatre “surgissements” (des interventions d’environ une demi-heure), dans un souci de proximité pour ces lieux où l'empathie vient aussi de la présence. L’idée est de rencontrer les gens là où ils sont et là où ils vont naturellement, pour leur apporter en format de chambre un extrait du concert ÔM.
Des chanteurs amateurs avec lesquels nous avons travaillé sur trois pièces de ce programme nous rejoindront également, dans une dynamique d’action culturelle. Aller ainsi au-devant des publics nous apporte la satisfaction de voir notre utilité, ce que nous apportons, et cela change notre prestation musicale. La musique reste la même mais le chanteur reçoit un surcroît d’ouverture humaine avec d’autres publics. Pour ce programme exigeant, nous avons pu travailler très en profondeur sur de nombreuses séances avec les chanteurs amateurs pour arriver à de très beaux résultats pour les concerts.
Ce programme pour voix d’hommes est à l’image de notre ligne artistique : c’est un programme itinéraire qui part de la musique ancienne pour aller à la création contemporaine avec des sonorités extrêmement variées, allant des voix très aiguës chez les contre-ténors, aux voix de basses profondes. La tessiture est immense et le programme est d’un seul tenant, glissant d’une pièce à l’autre : d’un chant corse avec trois chanteurs, à un chant de Poulenc avec 20 chanteurs par exemple, dans l’unité et le contraste. »
Retrouvez à ce lien la Programmation Chants Libres en Auvergne Rhône-Alpes
Chants Libres en Bourgogne-Franche-Comté avec Léo Warynski et Les Métaboles
« Nous proposons trois temps en quatre jours en Bourgogne : nous avons choisi avec François Delagoutte (Directeur de La Cité de la Voix et des Rencontres Musicales de Vézelay où Les Métaboles sont désormais ensemble associé) de présenter trois programmes qui montrent les répertoires que nous aimons aborder. En parallèle, nous formerons des brigades : des quatuors vocaux très mobiles donnant des concerts dans des endroits inattendus à travers la région, pour présenter des extraits du programme.
Le premier concert, jeudi 22 juin à l’église Notre-Dame de Noyers, est le plus intime, dans un format musique de chambre pour une rencontre entre Les Métaboles et le violoncelliste Marc Coppey, sur l'idée des Métamorphoses (programme que nous créons à la Cité Musicale de Metz où nous sommes en résidence).
Le deuxième rendez-vous, samedi 24 juin à Vézelay (après les moments musicaux que nous proposerons la veille dans des EHPAD), est original dans sa forme car dans le programme Vox Naturae, les chanteurs dansent : nous le donnerons en plein air, avec le public autour de nous, car les musiques de ce programme ont toutes trait aux forces de la nature (comme les Magic Songs de Murray Schafer d’après des chants indiens inuits qui en appellent à la faune et à la flore, aux esprits de la forêt).
Le troisième programme, dimanche 25, est le plus participatif, invitant aussi le public à chanter avec nous. Nous allons le donner à Tonnerre dans les usines Dumas (spécialisée dans les oreillers et la literie). C’est un lieu merveilleux avec des machines brevetées uniques au monde. Nous allons donc proposer un programme intitulé “L’Usine à rêve” avec le côté ‘mécanique’ du Boléro de Ravel transcrit pour cœur, et des œuvres parlant de la nuit (une berceuse de Veljo Tormis en estonien, par exemple) : de quoi faire planer avec nous le public qui chantera La Nuit de Rameau (l’idée étant que tous les spectateurs s’y retrouvent) et le “Bonne nuit” de La Grande-Duchesse de Gérolstein.
Le fil rouge est cette polyvalence des Métaboles : la Fondation nous a invités à faire un festival à notre image, avec l’objectif (qui nous convient parfaitement et que nous partageons pleinement) de toucher un maximum de public. La Fondation nous donne les moyens pour inciter les publics à venir aux concerts et faire venir les concerts aux publics. Leur soutien à aux Centres d’art vocal est important pour nous : La Cité de la Voix est ainsi un riche centre de ressources en partitions (que j’utilise pour les programmes et que Les Métaboles enrichissent). »
Retrouvez à ce lien la Programmation Chants Libres en Bourgogne-Franche-Comté
Chants Libres en Occitanie avec Joël Suhubiette et Les Éléments
« Nous avons fait le choix de faire Chants Libres sur trois lieux de notre si belle et grande région d’Occitanie (13 départements, deux fois la Belgique). Nous avons confié des rendez-vous également à deux autres ensembles : La Main Harmonique, ensemble professionnel de solistes dans le Gers, et le Chœur Êkhô, jeune ensemble professionnel émergeant de Montpellier. Il se trouve que le chef de La Main Harmonique, Frédéric Bétous a chanté dès la création et pendant des années dans l’Ensemble Les Éléments (il fait partie de la famille), tandis que j’ai rencontré Caroline Semont-Gaulon qui dirige Êkhô lorsqu’elle a lancé son ensemble peu avant les confinements. Notre label ministériel de Centre National d’Art Vocal nous donne entre autres missions de soutenir les ensembles émergents, je trouvais précieux d’associer leur travail, notamment pour des interventions pédagogiques et de médiation culturelle (ce sont des volets importants dans le soutien de la Fondation aux Centres d’Art Vocal).
Le premier jour, vendredi 23 juin, Êkhô proposera « La Mécanique du chœur », à Lodève : un spectacle musical autour du large répertoire choral, qui, avec la complicité d’un comédien, explique le fonctionnement d’un chœur, techniquement, sur le plan musical, abordant la problématique des couleurs, des répétitions, de la dynamique humaine, sous forme scénique et ludique, en interaction avec la chef de chœur.
Nous donnerons, le vendredi 23 juin également, le spectacle jeune public "La Tempête" à La Cité de Sorèze avec une soixantaine d’enfants d’écoles. Le compositeur Hervé Suhubiette (mon frère) travaille depuis des années pour le jeune public et a créé cette œuvre d’après un livre pour enfants : il a composé des chansons pour des enfants qui ne sont pas nécessairement élèves des maîtrises ou des conservatoires. Le travail se déroule depuis plusieurs mois avec eux, encadré avec des titulaires du Diplôme Universitaire de Musicien Intervenant en milieu scolaire, par des chanteurs du Chœur Les Éléments qui vont dans leurs écoles, et la chef de chœur Laetitia Toulouse. Trois instrumentistes professionnels (clavier, clarinette, violoncelle) s’associent au projet pour l’accompagnement musical. Ce n’est pas la première fois que nous travaillons avec les écoles de Sorèze car nous y avons une résidence depuis des années à la Cité de Sorèze.
Les moments musicaux de La Main harmonique offriront des mini-concerts sur différents lieux du Gers, le vendredi 23 juin au marché de Lectoure, le lendemain sur le marché de Condom et en EHPAD.
Le samedi nous proposons à Sorèze « 5CCC » : Un projet réunissant 5 Créations de 5 jeunes Compositeurs écrites pour 5 Chœurs amateurs (maitrises d’enfants, d’adolescents, deux chœurs d’adultes et un ensemble vocal de quatre femmes solistes) avec leurs 5 chefs. Le compositeur Florent Mamet a écrit la pièce Lux d’une douzaine de minutes interprétée sous ma direction par les 90 chanteurs de tous les ensembles : La Lauzeta (chœur d’enfants de Toulouse), Saltarello (chœur d’adolescents du Conservatoire de Narbonne), Fleur d'Espine de Carcassone, Cacimbo, et Archipels (l’atelier vocal des Éléments).
En 2023, les Centres d’Art Vocal d’Île-de-France, d’Occitanie, d’Auvergne-Rhône-Alpes, de Provence-Alpes-Côte d'Azur et de Bourgogne se sont réunis pour proposer un projet commun de master-classes de direction de chœur. La musique des pays du nord avec accentus, la musique française avec Spririto, la musique anglaise avec La Cité de la voix de Vézelay et Les Métaboles. Pour Musicatreize et Les Éléments, trois jeunes jeunes chefs diplômés ont été sélectionnés parmi les stagiaires pour deux master-classes d’interprétation avec Roland Hayrabedian et Joël Suhubiette qui les emmènera à diriger en concert les deux ensembles professionnels. Le samedi à Sorèze dans le cadre de Chants Libres ils dirigeront Les Éléments dans le programme « Méditerranée sacrée » composé d’œuvres de la Renaissance et de compositions contemporaines.
Les concerts du samedi soir à l'église Saint-Orens d'Auch et du dimanche après-midi à la Cathédrale Saint-Pierre de Condom seront consacrés à Purcell autour du programme “Music for the Queen Mary”, pour lequel La Main Harmonique invitera des chœurs amateurs qui auront travaillé en stage choral durant le week-end à se joindre à ses chanteurs professionnels.
Nous avons placé ce Festival sous le signe de la jeunesse, des rencontres entre professionnels, amateurs et scolaires, avec le désir d’en faire une grande fête du chant choral, de l'école à la pratique professionnelle. Le projet « Chants Libres » de la Fondation Bettencourt Schueller nous offre la merveilleuse opportunité de promouvoir le chant choral auprès de publics de tous horizons. »
Retrouvez à ce lien la Programmation Chants Libres en Occitanie
Chants Libres en PACA avec Roland Hayrabedian et Musicatreize
« Pour notre programme Chants Libres, je me suis approché de la communauté de communes de la Dracénie, à Draguignan. Les villages souvent haut perchés ont une âme incroyable et y faire résonner les voix est une chance inouïe. Le choix des lieux a été compliqué devant tant de beauté ! Ce sont des villages magnifiques, trop peu connus où les gens ont envie de musique. Les propositions de parcours artistiques se sont faites en lien avec les lieux : les programmes à l'extérieur sont d’essence plus populaires, ceux en intérieur, comme les chapelles par exemple, propices aux musiques plus intimes.
Nous avons ainsi construit un grand parcours vocal qui s’étend sur deux jours pleins, Musicatreize proposant les concerts d’ouverture et de clôture, ce dernier étant partagé avec le Chœur de chambre 1732 (dirigé par Bruno Habert). D’autres chœurs animent ce festival : Les Dissonantes, l’Ensemble La Sestina, l’Ensemble Vocalita et la Camerata Vocale de Draguignan. Chacun ayant carte blanche, le programme de ce long week-end du 23 au 25 juin sera donc éclectique, de la Renaissance à nos jours et la voix sonnera d’un village à l’autre comme autant d’annonces pour les concerts suivants.
Dès le concert d’ouverture (vendredi 23 juin au Pôle Chabran - Draguignan), nous donnons en création mondiale trois pièces d’envergure : Il Giardino delle Mele d'Oro [Le Jardin des pommes d’or] de Gianvincenzo Cresta, Il Toro di Creta [Le Taureau crétois] d’Ivan Fedele, et Birds d’Édith Canat de Chizy, lançant le cycle Les 12 Travaux d’Hercule - 12 allégories pour la planète. Les compositeurs ont choisi de s’inspirer de l’un des travaux d'Héraclès, la dimension écologique devenant bien sûr une évidence que chacun des compositeurs traite à sa façon. Le Festival Chants Libres nous permet ainsi de lancer un cycle qui va perdurer et se déployer sur trois ou quatre années : de nouveaux compositeurs s'emparant d’un des travaux du demi-dieu grec. Cette dynamique mythologique conçue pour le festival imprègnera la suite de la saison : nous allons créer Hercule, dernier acte cet été au Festival Berlioz de La Côte-Saint-André avec une conception scénique, musique et vidéo de Zad Moultaka sur un livret de Bruno Messina, et puis nous poursuivrons en septembre avec une création de Benjamin Dupé pour Musicatreize et des choeurs amateurs, d'après Ovide, traitant elle aussi des Travaux d’Hercule.
Dans le concert de clôture (dimanche 25 au cloître du domaine Sainte-Roseline aux Arcs-sur-Argens où se côtoient des œuvres de Chagall, Ubac etc.), nous donnons une pièce dernièrement créée au Festival Mars en Baroque : Noir, Lumière et Outrenoir, Hommage à Pierre Soulages composé par Dominique Lièvre pour violoncelle et 16 chanteurs. Le Chœur de chambre 1732 fera la première partie et nous chanterons ensemble en bis l’Hymne Bettencourt. L’esprit d’ouverture, l’invention sont la marque de ce week-end. Puisse l’année prochaine nous permettre de continuer cette démarche en Dracénie où tant de lieux restent à découvrir ! »
Retrouvez à ce lien la Programmation Chants Libres en Provence-Alpes-Côte d'Azur
Chants Libres en Île-de-France avec le Chœur accentus de Laurence Equilbey
« Pour ce Festival, accentus propose deux moments musicaux, en compagnie du chœur de Grenelle, dans la cathédrale Saint-Louis des Invalides. Ils seront dirigés par le chef anglais Stephen Layton, qui dirige beaucoup de musique a cappella. Seront notamment jouées des pièces de Pierre Villette, un compositeur français qui n'est pas connu dans l'Hexagone, mais que les anglais ont su valoriser (comme ils l'ont fait pour Berlioz). C'est un compositeur qui écrit de manière très polyphonique, orchestrale pour le chant souvent à huit voix réelles, dans une technique d'écriture très "scandinave" ou nordique : le chœur est un instrument, un orchestre de voix. Ces morceaux seront accompagnés par le grand cycle Sacred and Profane (l'un des cycles les plus beaux et techniquement difficiles pour chœur) de Britten. Britten et Poulenc (qui est aussi dans ce programme qui sera donné ensuite à Radio France et à Rouen) ont offert des répertoires qui ont marqué une poussée créatrice pour les chœurs au début du XXe siècle.
Le chœur de Grenelle chantera avec Stephen Layton la partition Immortal Bach de Knut Nystedt (que nous aimons aussi donner en bis, car sa spatialisation donne un effet impressionnant dans les églises). Et nous conclurons avec l'Hymne (dans la version double chœur) composé pour ce Festival par Franck Krawczyk .
Nous avons appelé ce programme “Cathédrale sonore”, à la fois car Pierre Villette déploie dans ses œuvres religieuses la richesse technique d'un orchestre mais aussi car le programme est donné dans la Cathédrale Saint-Louis des Invalides, qui a une acoustique très large, offrant d'intéressantes façons de remplir le son.
Nous sommes en contact avec la communauté des chœurs amateurs, notamment via notre centre de ressources, le Cen : une plateforme de partage dédiée aux chœurs amateurs, étudiants et professionnels sur laquelle nous partageons du matériel, répondons aux questions, publions des vidéos de master-classes. Les Centres Nationaux d'Art Vocal soutiennent le chant a cappella, le partage des ressources et l'éducation/inclusion. C'est pourquoi la Fondation Bettencourt a voulu soutenir des projets qui les réunissent. »
Retrouvez à ce lien la Programmation Chants Libres en Île-de-France
Franck Krawczyk, nous présente l’Hymne qu’il a composé pour ce Festival Chants Libres, hymne qui sera créé au fur et à mesure des événements en région avant de se déployer dans sa pleine mesure au grand concert final. Cet hymne s’appuie sur des citations d’œuvres très connues du répertoire lyrique : « Ce sont des emprunts modifiés. Le premier d’entre eux est l’introduction du chœur des prisonniers dans Fidelio : ce moment où ils vont vers la lumière (ce sont les premières mesures, confiées au chœur Aedes). Vient ensuite intégralement le “Va, pensiero”, avec une petite modification formelle (Verdi compresse la reprise, elle sera ici reprise à l'identique). Il y a un certain nombre de modifications de paroles : avec un double texte en italien (les paroles originales) et en français (une réécriture qui joue comme un souvenir de la version en français qu’a chantée Nana Mouskouri). J’ai également écrit une partie sur les couplets, dans un français qui colle le plus possible, au sens mais surtout à la prosodie de Verdi. »
Mais comment mettre sa patte esthétique entre Beethoven, Verdi et Nana Mouskouri ? « Déjà dans le lien organique entre Beethoven et Verdi. Je pense en toute modestie avoir mis la main sur un lien établi [le compositeur nous chante les thèmes pour en montrer les liens, ndlr]. Verdi n’ignore sans doute pas l’idée musicale de Beethoven sur le thème de la liberté : un lien d’incubation, de rémanence. C’est là que j’ai trouvé ma place, de couture, d’oreille. Mettre la main sur ce lien m’a touché et je me suis appliqué à l'entretenir sur les différents plans sonores avec une forme et un contenu totalement différents : a cappella, entre des chœurs professionnels (Aedes venant incarner l’orchestre d’une certaine manière, Beethovenienne) et des choeurs amateurs (EVE, la Maîtrise de Sainte-Anne d'Auray, la Maîtrise de l'Opéra de Lyon et la Maîtrise Populaire de l'Opéra Comique). C’est une réécriture rythmique aussi pour que les phrases instrumentales deviennent vocales (comme ce que j’ai beaucoup fait pour Laurence Equilbey et accentus).
Je me suis aussi senti très concerné par la manière de faire entrer les 200 choristes, par c(h)œur, dans la partition. Ils auraient pu tous commencer ensemble par le thème connu du Va, pensiero, mais j’ai choisi cette entrée qui me touche beaucoup dans la musique médiévale et de Ligeti (et qui est aussi Mahlérienne), celle du talea (ce déploiement par infimes variations) avec des entrées successives, en l'occurrence sur un moïto (bouche fermée) par ce geste qui permet aux amateurs de prendre le diapason et de faire sentir leur présence, celle de 200 voix et 200 corps, celle du chœur des prisonniers et des esclaves.
Chants Libres c’est la liberté reconquise par le chant.
C’est aussi avec cet Hymne une partition faite pour que tous les chœurs puissent puiser dans toutes les configurations : il y a du deux voix, trois voix, quatre voix… ils peuvent sélectionner des configurations, pour hommes, femmes, amateurs débutants, plus éclairés, élèves, pour tous les âges, tessitures, niveaux. Mais j’ai dû aussi composer une réadaptation complète pour le chœur d’hommes de Nicole Corti (à 15 voix, spécifiques). Elle a très bien défendu ce projet, rappelant qu’il était important de recruter des amateurs mais qu’il y avait aussi un grand enjeu à recruter des chanteurs hommes dans les chœurs. C’est la vertu d’un hymne que d’être fédérateur.
Il sera proposé avec une chorégraphie de Blanca Li. Cela faisait partie de la commande et du challenge. Blanca a été embarquée dans l’idée que tout le monde puisse apprendre une chorégraphie par des tutos sur le thème de la liberté. Elle a divisé la pièce en neuf périodes (après l’introduction), très probantes pour faire une mise en action : comme une marche primitive, simple, qui se déploie progressivement, de plus en plus éloquente et expressive (et elle est partie de ma maquette, en prenant donc mon tempo, celui en lien avec cette musique, son sens). J’étais touché de voir les répétitions, le soin, la préparation : c’est là aussi très pédagogique et didactique, chaque choriste peut être autonome dans son apprentissage. »
Enfin, Mathieu Romano nous présente le Concert Final de Chants Libres 2023 qu’il dirigera dans la Grande salle de la Philharmonie de Paris lundi 26 juin à 20h :
« Ce projet est un point d'orgue du Festival Chants Libres qui se déroule à travers les régions : allant à la rencontre des publics. Pour le finale parisien, la Fondation Bettencourt Schueller a fait appel à mon Ensemble Aedes et m’a demandé d’assurer la direction artistique de cette grande soirée qui réunit des Maîtrises lauréates du Prix Bettencourt : la Maîtrise de Sainte-Anne d’Auray (dernière lauréate en date du Prix des Maîtrises), la Maîtrise de l’Opéra de Lyon, la Maîtrise Populaire de l’Opéra Comique mais également le chœur EVE (Exister avec la Voix Ensemble), un projet très fort de la Philharmonie et de la Fondation.
Ces maîtrises réunies ont leur propre historique, répertoires et personnalités artistiques très fortes (c'était aussi là le défi de proposer des pièces en commun, et j'ai jonglé entre leurs répertoires et des répertoires communs) mais ces maîtrises partagent le même idéal choral et sonore : porter cette musique et ces effectifs au plus haut niveau. Ces maîtrises se rejoignent dans ce travail du son, du répertoire, dans ce but de cohésion.
Les spectateurs découvriront le programme le jour même : il montrera toute l’étendue du chant choral, avec des moments pour chaque ensemble, mais aussi des moments communs, le tout avec des enchaînements de tonalités, de déplacements. Le programme est en effet mis en espace par Christine Bonneton, pensé comme un déroulé continu : l'idée est de faire des rencontres. Nous avons plutôt exploré le répertoire profane (le répertoire sacré étant plus connu) extrêmement riche et varié. Nous nous baladerons dans beaucoup de pays : l’Amérique, le Canada, la Finlande, l’Estonie, la France bien sûr, la Grèce, la Hongrie. Ce sera très varié également dans les caractères. C’est un concert très familial et tout public, fait pour que tout le monde passe un très bon moment avec des œuvres marquantes, que chacun soit surpris et ému. Et il y aura le grand finale, et bien sûr l’Hymne composé par Franck Krawczyk, auquel participera le public.
C'est toujours un défi de faire chanter et bouger tant de choristes, mais nous avons pensé des mouvements simples et sobres qui fassent leur effet, avec bien sûr les entrées, sorties et positionnements mais qui seront tous différents, et puis certaines maîtrises dansent et bougent en chantant. Le travail des lumières accompagnera également le spectateur, pour le plonger dans le spectacle. »