L'Or du Rhin sur un Parking : Wagner déconfiné à Berlin
Si les théâtres ont dû baisser les rideaux, certains ne baissent pas les bras et se remontent les manches pour faire remonter les artistes, voire même le public sur les planches... ou ailleurs. L'Opéra allemand de Berlin invitera ainsi un nombre réduit de 200 spectateurs et d'artistes (22 musiciens et 12 chanteurs) sur son parking pour le premier opéra de la Tétralogie Wagnérienne (Das Rheingold) le 12 puis les 18, 19 et 20 juin.
L'idée apparaît extrêmement originale (même si l'Opéra Comique a donné un spectacle dans le parking de Beaubourg en janvier dernier, à l'époque où le Coronavirus ne semblait inquiéter personne en Europe). Le Deutsche Oper Berlin reprend et combine en fait deux idées tirées parmi deux projets précédents. L'institution lyrique berlinoise avait déjà réalisé une production scénique sur son parking en plein air : L'Orestie de Xenakis.
La version semi-scénique et chambriste de L'Or du Rhin durant 90 minutes fête pour sa part ses 30 ans : elle fut conçue par le compositeur britannique Jonathan Dove en 1990 (elle est justement pensée pour rendre la Tétralogie accessible en tous lieux et a ainsi pu faire le tour du Monde). Arrangée par Neil Barry Moss, elle sera dirigée Donald Runnicles, avec Derek Welton (Wotan), Padraic Rowan (Donner / Froh), Thomas Blondelle (Loge), Markus Brück (Alberich), Andrew Harris (Fasolt), Tobias Kehrer (Fafner), Annika Schlicht (Fricka), Flurina Stucki (Freia), Judit Kutasi (Erda), Elena Tsallagova (Woglinde), Irene Roberts (Wellgunde) et Karis Tucker (Floßhilde).
Rappelant combien l'Opéra et le monde de la Culture doivent compter sur la générosité du public, le prix des places est fixé sur le principe du "payez ce que vous voulez" (ou plutôt ce que vous pouvez) avec un plancher minimal fixé à seulement 5 €. Cela étant, à peine annoncé, l'événement affichait déjà complet.
Comme dans le domaine du ballon rond, la France apparaît ainsi en retrait en comparaison de ses voisins transalpins, d'outre-Rhin et d'outre-Manche qui permettent au public de retrouver l'Opéra grâce à des propositions originales : Naples aura ses concerts super-stars Place du Plébiscite, Rome reprend bien dès cet été dans un hippodrome (l'occasion de réengager des artistes, de reprogrammer des œuvres, de garder le lien avec le public), l'ENO propose un drive-in lyrique et Zürich fera jouer l'orchestre à distance. Même outre-Atlantique, le Met, qui ne reprendra pas de sitôt, a déjà offert un concert confiné historique.
Sans même un parking lyrique, la France reste pour l'instant dans une voix de garage.