Requiem de Verdi aux Invalides : fébrile hommage à Verdi
Scott Yoo arrive d'un pas énergique dans une salle comble (le public avait été prévenu, il ne fallait pas compter sur des places de dernière minute). Après un salut furtif il se place et les quatre solistes font leur entrée par la droite sous les applaudissements. Le silence se fait tandis que l'Orchestre national de Metz entame les premières mesures de l'œuvre. Les cordes sonnent, l'ambiance est intimiste bien que battue avec allant par le chef. L'orchestre offre de très nobles moments durant le reste de la soirée malgré quelques petites imperfections, notamment en début de phrases, de la part des cuivres et des violons.
Le son du Chœur de l’Orchestre de Paris gagne petit à petit en couleur au fur et à mesure du lent crescendo qui amène avec élégance au Kyrie, c'est-à-dire à l'intervention des quatre voix qui portent l'essentiel de la liturgie. Lui aussi fait montre d'une grande maîtrise : le son est ample et puissant, la diction précise et soignée.
La première voix soliste, dans l'ordre d'intervention, est celle de Florian Laconi dont l'auditoire apprécie la projection et le timbre, un rien nasal. Cependant, la ligne de chant est hachée, le registre aigu sonne voilé et un vibrato un peu large s'installe sur les notes extrêmes. De plus, le ténor a une tendance attaquer les sons par en bas ce qui ternit la beauté de ses phrases. Jérôme Varnier apparaît ensuite, et dès ses premières mesures, en grande difficulté : le timbre est comme absent, le son rauque et la ligne de chant entrecoupée de prises d'air parasites. La basse ajoute à cela une gestuelle pleine de tension comme à la recherche d'une prise sur un instrument peu ductile. En vain, le registre aigu sonne creux lorsqu'il n'est pas émis avec violence et le legato est absent de toutes ses interventions. La soprano Teodora Gheorghiu a pour elle un timbre clair mais est elle aussi confrontée à la dimension de l'opus et du lieu : les aigus trop larges détimbrent, les registres ne s'harmonisent pas, le chant souvent en retrait et sans nuances. Reste Valentine Lemercier à la voix charnue mais dont les interventions sont souvent faussées par un manque d'harmoniques aiguës qui rend le son plus noir que brillant (et donc trop bas). De surcroît, un manque étonnant de rigueur rythmique de la part des quatre chanteurs met parfois en péril jusqu'à la cohésion d'ensemble, et ce malgré la gestuelle nette et attentive du chef.
Scott Yoo dirige pourtant l'œuvre sans partition et avec une verve communicative. Toutefois les tempi sont souvent trop rapides, au détriment de l'émotion (mais sans doute pour venir en aide aux solistes comme ses gestes le révèlent souvent).
Le public sort de la Cathédrale Saint-Louis des Invalides après avoir chaleureusement applaudi. Les artistes, quant à eux, font voyager ce programme vers l'acoustique plus propice de l'Arsenal de Metz.