Stéphane Degout et Alain Planès aux Lundis Musicaux de l'Athénée : la mélodie française au cœur
Depuis leur récital commun au Festival d’Aix-en-Provence en 2018
(notre compte-rendu), Stéphane Degout et Alain Planès poursuivent une
collaboration fructueuse autour des grands compositeurs français de
mélodies, en premier lieu Claude Debussy qu’ils servent tous deux
avec passion et conviction. Ils ne cessent d’ailleurs
de peaufiner leur approche du compositeur pour viser la plénitude dans les Trois poèmes de Stéphane Mallarmé -Soupir, Placet futile,
Éventail- ou l'osmose du Promenoir des deux amants sur des poèmes de Tristan
L’Hermite (osmose que Stéphane Degout transmet aussi en master-classes).
La voix si caractéristique de Stéphane Degout, toute de gravité et aux riches harmoniques, se plie au-delà de sa force de projection -qu’Hamlet d’Ambroise Thomas récemment à l’Opéra Comique a une nouvelle fois soulignée-, aux exigences subtiles et délicates du style, tout en habitant l’intention. Elle s’illumine aux passages les plus heureux. Dans une permanente attention au texte, l’articulation du baryton rend chaque mot simplement compréhensible et en même temps élaboré, maîtrisé sans ajouts ni accentuations inutiles. Il incarne et semble élever certains textes pourtant surannés comme celui de Catulle Mendès pour la Chanson pour Jeanne d’Emmanuel Chabrier ("Puisque les roses sont jolies Et puisque Jeanne l'est aussi [...] Puisque vous gazouillez, mésanges, Et puisque Jeanne gazouille aussi"), succédant à L’Île heureuse sur un texte d’Éphraïm Mikhaël. Les Berceaux ouvrent le large horizon consacré à Gabriel Fauré qui s’écoule avec une sorte de volupté, du Clair de Lune jusqu'Après un rêve. Clou de la soirée, la partie consacrée à Henri Duparc laisse encore s’épanouir une voix sémillante au vif sillage.
La délicatesse du toucher pianistique d’Alain Planès, sa connaissance profonde de la musique française, apportent un soutien indéfectible au chanteur. Les deux artistes se situent sur la même longueur d’ondes, expriment la même volonté interprétative. Reste à souhaiter que cette amitié musicale perdure dans le temps et qu’elle poursuive surtout une exploration si bienvenue. Dans l’attente, Stéphane Degout se produira à l’Opéra de Lyon en mai prochain dans l’opus de George Benjamin Lessons in love and Violence (réservations) qu’il a créé l’an dernier à Covent Garden, puis dans le rôle d’Oreste d’Iphigénie et Tauride de Gluck le mois suivant au Théâtre des Champs-Élysées (réservations).