Josep-Ramon Olivé et Thibaut Garcia : l'Espagne au Musée d'Orsay
Le Musée d'Orsay propose des concerts dans son Auditorium en lien avec ses expositions. Tandis que les spectateurs peuvent ainsi admirer dans les espaces temporaires jusqu'au 25 février 2018 : "Degas Danse Dessin. Hommage à Degas avec Paul Valéry", les mélomanes sont accueillis par une projection du tableau d'Edgar Degas intitulé Lorenzo Pagans et Auguste de Gas (1871-1872). Edgar Degas s'appelait en effet Hilaire Germain Edgar de Gas, fils d'Auguste de Gas qui faisait salon en recevant des artistes, notamment le célèbre ténor catalan Lorenzo Pagans (1833-1883).
Le concert rend ainsi hommage à l'esprit des salons, avec des mélodies pour guitare et chant parcourant toute l'Espagne : celle rêvée dans les romances en Français d'Hector Berlioz, la Catalogne de Feliu Gasull i Altisent (né en 1959), les Asturies d'Isaac Albéniz (1860-1909) et les chansons populaires composées par Manuel de Falla (1876-1946).
Le baryton catalan Josep-Ramon Olivé et le guitariste franco-espagnol Thibaut Garcia excellent d'articulation et d'inspiration dans ce répertoire, faisant voyager le public d'Orsay en Ibérie. Si la guitare est immédiatement séduisante de douceur et de fine précision, la voix demande à l'auditeur français un certain temps d'adaptation. La prononciation du français, du catalan et du castillan est rehaussée d'une certaine noblesse, par des commissures de lèvres rapprochées. Surtout, la voix est très engorgée mais tout en convoquant des résonateurs de poitrine et les résonances du masque. De fait, les forte sont puissants mais tendus et serrés. Le chanteur fait toutefois merveille dans les sons allégés, notamment en catalan et bouche fermée, ainsi que dans le galant univers hispanique des mélodies populaires.
Du début à la fin du concert, son accompagnateur guitariste impressionne par la délicatesse assurée d'un toucher effleurant les cordes ou les picotant du bout des ongles, toujours parfaitement en place. Il produit tour-à-tour des sons parfaitement lugubres en étouffant les cordes ou de fines harmoniques en les effleurant. Son solo est ainsi un sommet du spectacle : les Asturias d'Isaac Albeniz, pourtant entendues mille fois, n'en finissent pas d'éblouir et de charmer. Si le guitariste perd en précision pour les derniers morceaux, il est toujours aussi appliqué à suivre une voix qui se voile délicieusement et mène désormais en douceur vers une légère voix mixte soulevée.
Le cycle et le programme se referment, sur l'énergie de deux toréadors avant les applaudissements syncopés du public.