56ème Instant Lyrique Salle Gaveau avec Ambroisine Bré et Stanislas de Barbeyrac
Après le brillant récital de la soprano Jessica Pratt et du pianiste Antoine Palloc le mois dernier, cette seconde soirée proposée par L’Instant Lyrique depuis Gaveau et même dans la grande salle de concert désormais, marque la poursuite d’un partenariat qui ne demande qu’à se fortifier et auquel France Musique s’est associé. Ce concert est ainsi retransmis sur ses ondes :
Quatre des huit mélodies constituant le cycle Love Songs d’Antonin Dvorak ouvrent le programme par la voix suave et particulièrement mélodieuse d’Ambroisine Bré qui pare son chant de superbes demi teintes. Les deux artistes alternent ensuite airs et duos. Dans l’air de Tamino de La Flûte enchantée de Mozart, rôle désormais souvent chanté à la scène par Stanislas de Barbeyrac, il est possible de constater combien sa voix de ténor s’est encore fortifiée voire élargie, moins libre dans l’aigu il est vrai, mais comme accentuée dans ses intentions, plus intensément dramatique aussi. Carmen de Bizet figure également au programme, Stanislas de Barbeyrac devant aborder le rôle de Don José à l’Opéra de Bordeaux à partir du 30 mai prochain sous la baguette de Marc Minkowski au sein d’une production signée par Jean-François Sivadier, Ambroisine Bré y tenant le rôle de Mercédès. Dans l’air de Don José, certaines tensions se font perceptibles sur la quinte aiguë, mais l’engagement et la jeunesse de l’artiste promettent des instants scéniques passionnants à Bordeaux. Le duo final le montre au meilleur, ardent et passionné, face à la remarquable Carmen de sa partenaire, qui démontre avec une Séguédille chantée sans pesanteur, admirablement conduite et d’une haute tenue, qu’elle est fin prête pour interpréter à la scène le personnage. Sa voix de mezzo-soprano s’illustre de belles couleurs justement sombres, au phrasé assuré, au médium consistant et à l’aigu se déployant avec facilité.
Ces mêmes qualités réciproques et complémentaires se révèlent dans les extraits du Werther de Massenet : "Ô nature pleine de grâce" pour le ténor, l’air des larmes pour la mezzo et surtout le fameux duo du clair de lune de l’acte I. Ambroisine Bré aborde par ailleurs l’air final d’Angelina extrait de La Cenerentola de Rossini, "Nacqui all’affanno" avec toute la vaillance requise et des vocalises déliées. Le sourire se rattache à une autre Séguédille, celle de La Périchole d’Offenbach, pleine d’esprit et de saveur, donnée en bis, et dans le duo enchanteur "Oui c’est un rêve" tiré de La Belle Hélène. En sus, les deux artistes ont choisi d’interpréter, même si la trajectoire doit encore s’enrichir et se perfectionner, le magnifique duo "Nuit d’ivresse et d’extase infinie" des Troyens de Berlioz.
Une fort belle soirée lyrique qui met en exergue deux chanteurs sensibles, particulièrement attachants et exigeants. Ils doivent tous deux aussi beaucoup à leur pianiste, Qiaochu Li, à l’attention permanente, dont le toucher précis et chaleureux ne se relâche à aucun moment. Cette dernière livre une lecture ardente de Widmung de Robert Schumann dans la transcription de Franz Liszt.