Les Bouffes de Bru Zane reviennent !
Le Palazzetto Bru Zane, fondé à Venise, fête ses 10 ans, passés à encourager la redécouverte et la diffusion du patrimoine musical français. Ce Centre de musique romantique française offre ainsi des résurrections musicales en tous genres, non pas seulement de grands opéras mais aussi de petites formes distrayantes, cocasses et très spirituelles.
La Bouffonnerie musicale gauloise reprend ainsi ses droits et les routes (à travers la France et bien au-delà) en partant pour la deuxième année du berceau que représente le Théâtre Marigny : c'est en effet sur ce lieu de la capitale que Jacques Offenbach fonde en 1855 son théâtre des Bouffes-Parisiens, là où le maître du genre érige le temple de l'opérette (qu'il aime nommer opéra-bouffe pour le rapprocher de la tradition italienne de l'opera buffa).
La première édition des Bouffes de Bru Zane a été inaugurée la saison dernière, en commençant par quatre week-ends parisiens et un panorama de petits trésors comiques oubliés, qui poursuivent d'ailleurs leur tournée à travers la France l'année prochaine encore.
Le tout premier spectacle avait donné la couleur en proposant deux œuvres, l'une du "père de l'opérette" et l'autre du plus célèbre génie du genre : Le Compositeur Toqué (œuvre à ce point importante qu'elle donna son surnom à Hervé, lui-même pseudonyme de Louis-Auguste-Florimond Ronger) & Les Deux aveugles d’Offenbach (notre compte-rendu)
Le Retour d’Ulysse (compte-rendu) parodie du célèbre mythe antique également signée Hervé, rappelait combien les opus légers pouvaient avoir de fond et s'inscrire dans le noble registre des parodies d'opus mythiques
On demande une femme de chambre de Robert Planquette/Chanteuse par amour de Paul Henrion (compte-rendu) semblait changer de registre, mais questionnait profondément les classes et les genres.
Faust et Marguerite de Frédéric Barbier & Sauvons la caisse de Charles Lecocq, enfin, l'occasion d'apprécier deux autres maîtres de l'opérette, la parodie et le méta-discours : compte-rendu.
Cet opus qui "parodie" le Faust de Gounod (également l'objet actuellement d'une publication originale et originelle par le Palazzetto Bru Zane) a récemment été à l'affiche de "la rentrée en musique" lundi 2 septembre dernier au Lycée Montaigne et au Lycée Racine "avec Lara Neumann et Flannan Obé, afin de sensibiliser les élèves au répertoire de la musique française du XIXème siècle." Une occasion rappelant précisément la vocation de ces formes de spectacles : au XIXe siècle, comme de nos jours grâce au Centre de musique romantique française, ils peuvent être repris très facilement dans divers lieux, avec des moyens modestes, apportant la culture sur un plateau très mobile, qui tient "dans le coffre d'une voiture".
Le Palazzetto Bru Zane Centre de musique romantique française fera re-découvrir une fois encore des œuvres rares avec une seconde édition de ce Festival Bouffe (qui s'ajoute à son travail à Venise, son Festival à Paris, son autre à Montréal, sa radio, ses disques, conférences, etc.). Ce deuxième épisode des Bouffes de Bru Zane repart du Studio Marigny, et confirme l'importance de ce projet en plusieurs points : le répertoire des opéras et opérettes en un acte représente "presque les deux tiers du répertoire lyrique français de l’époque romantique". Le caractère ludique, mémorable et les dimensions mesurées de ce répertoire (souvent porté en une heure et par une paire d'interprètes : pour des raisons d'ailleurs légales à l'époque étant donné qu'un décret de 1807 dans la tradition des privilèges théâtraux limitait les autorisations de spectacles à pas plus de deux ou trois personnages en scène, pas de chœur, pas de ballet), tout cela stimule la créativité des plus grands librettistes et compositeurs de l'époque tout en étant parfaitement accessible à tous les publics (pas besoin d'avoir les codes du Grand Opéra).
Le Docteur Miracle, opéra-comique de Charles Lecocq, ouvre le bal les 26, 27, 28 et 29 septembre 2019 au Studio Marigny (réservations), puis le 4 octobre à l'Opéra de Saint-Etienne, avant les 12, 13 et 14 à l'Opéra de Tours (dans les ateliers duquel sont réalisés décors et costumes). Diversité et richesse sont encore au rendez-vous avec ce livret associant un spécialiste des vaudevilles, Léon Battu, et Ludovic Halévy qui a aussi bien co-signé des chefs-d'œuvre d'Offenbach que Carmen de Bizet.
L'élaboration de ce miraculeux docteur est d'ailleurs aussi savoureuse que son contenu : cet opus est en effet le lauréat d'un concours de composition organisé peu après l’ouverture de son théâtre par Jacques Offenbach. Le concours est d'ailleurs remporté ex-aequo par nuls autres que Charles Lecocq et un certain Georges Bizet, dont il existe donc une autre version du Docteur Miracle, plus célèbre que celle de Lecocq mais bien moins qu'un autre docteur miracle qui n'a certes rien à voir :
La deuxième édition des Bouffes de Bru Zane est aussi l'occasion de s'ouvrir à un autre genre musical en vogue dans Paris dès la fin du XVIIIe siècle et fondamental pour la musique au XIXe, explorant de nouveaux lieux, thèmes et de nouvelles passerelles avec les traditions musicales populaires : le café-concert. Rodolphe Briand (comédien chanteur à l'affiche de grandes maisons internationales d'opéra) sera accompagné au piano par Vincent Leterme dans un programme « J’aime pas les concerts ! Mais j’prendrais bien un café… », les 13-14 et 15 décembre 2019 au Studio Marigny : réservations.
Enfin, le dernier spectacle de la saison reviendra à la rencontre d'opus en diptyque avec le maître Offenbach et la découverte de Frédéric Wachs pour "présenter tour à tour Lischen et Fritzchen, une opérette aux accents alsaciens prononcés puis Un mari dans la serrure, pièce où l’absurde se fera voisin de palier". Avant de se rendre au Studio Marigny du 28 février au 5 mars 2020 (réservations) puis les 28 et 29 Salle Pasteur au Corum de Montpellier, le spectacle sera inauguré pour la Saint-Valentin et le lendemain au Théâtre du Jeu de Paume d'Aix-en-Provence, et fera un pèlerinage dans la villa vénitienne de la Fondation Bru les 21, 22 et 23 février 2020. Lischen/Thérézina seront incarnées par Adriana Bignagni Lesca, Fritzchen/Bigorneau par Damien Bigourdan avec Jean-Marc Fontana piano dans une mise en scène de Romain Gilbert, scénographie et costumes de Mathieu Crescence.