Liège, cadre d’une politique Jeune public dynamique
Premier instrument de cette politique « jeune public » : les opéras participatifs, que l’ancien dramaturge de Liège Frédéric Roels a importé à Rouen lorsqu’il en est devenu Directeur, et qui peuplent de plus en plus souvent les programmations françaises. Chaque année, Liège en programme au moins deux, l’une ciblant les maternelles et l’autre les primaires. Cette année, il s’agissait de Cendrillon de Viardot (compte-rendu ici) et Don Quichotte de Massenet (à retrouver ici). S’y est même ajoutée une production destinée aux adolescents : I was looking at the ceiling and then I saw the sky d’après l’œuvre de John Adams (ici en compte-rendu). Ces programmes sont aujourd’hui très attendus : « Les enfants n’ont aucun a priori sur l’opéra, y compris sur la musique contemporaine. Cela leur permet d’ouvrir une porte, de savoir que l’opéra est un divertissement accessible » se réjouit Valérie Urbain, chargée des projets éducatifs. L’Opéra se retrouve même victime de son succès : « Nous sommes en effet limités par nos infrastructures : pour Don Quichotte, nous avons dû refuser près de 2.000 personnes pour 4.600 spectateurs accueillis (soient 200 classes) » ajoute Elisa Vainsel, Directrice de la communication, du marketing et du développement des publics.
Deuxième axe de travail : l’accessibilité financière à la programmation régulière de l’opéra. Là non plus, pas de demi-mesure : les places sont gratuites pour les moins de 14 ans, de 2 à 20 euros pour les moins de 26 ans et de 4 à 40 euros pour les moins de 32 ans. Ces tarifs sont accessibles dès l’ouverture des réservations, concernent toutes les catégories, sans quota limité, et peuvent faire l’objet d’un abonnement (il y a ainsi cette saison 850 jeunes abonnés). « C’est inédit en Europe. Avec ces tarifs, les jeunes peuvent prendre le risque d’une éventuelle déception : il nous arrive d’avoir 30% de tarifs jeune dans la salle » selon Valérie Urbain. « Au début, les jeunes ne venaient pas le week-end. Aujourd'hui, ils viennent le samedi avant d'aller en boîte de nuit. Nous commençons aussi à en avoir un peu le dimanche » explique Stefano Mazzonis di Pralafera, le Directeur de l'opéra. Ces tarifs réduits représentent un effort de 600.000 euros par saison.
Troisième concept travaillé par l’Opéra : les cycles « Un autre ». Il s’agit de créations collectives impliquant sur 18 mois une centaine de jeunes issus de différents milieux. Ils se réapproprient un opéra, le réécrivent, le recomposent, en font les décors et les costumes avant de le présenter au public, dans la grande salle. Un autre Don Juan a ainsi fédéré 4.000 spectateurs en 2018. « C’est une expérience très forte (les répétitions sont le dimanche matin), mais qui a un coût : 200.000 euros sur fonds propres, sans compter les ressources internes mobilisées par le projet » selon Elisa Vainsel. « Nous avons organisé quatre éditions. Nous allons maintenant renouveler ce concept, toujours avec la Fédération des maisons de jeunes. Nous devrions avoir quelque chose sur scène en 2020/2021 ».
D’autres initiatives complètent le dispositif, comme des apéros-spectacles lors desquels sont par exemple proposées des écoutes comparées (un même air chanté par différents artistes), ou l’ouverture des répétitions générales des grands opéras aux écoles. Sont également organisées des soirées « Opéra en pyjama » : 120 enfants en pyjama se voient proposer des activités au cours d’un jeu de piste générant des rencontres avec des artistes du chœur et de l’orchestre. « Ces enfants ne diront jamais que l’opéra est réservé aux autres » espère Elisa Vainsel. Autre concept : les brunchs musicaux, qui sont également l’occasion pour les artistes du chœur ou de l’orchestre de se produire en récital, tandis que les enfants sont pris en charge. « L’écrasante majorité des participants à ces événements ne viennent jamais à l’opéra », constate Valérie Urbain. Enfin, l’Opéra organise des journées portes-ouvertes : « Nous présentons des métiers techniques, car cela ouvre des vocations. Par exemple, des sons et lumière sont l’occasion d’un show de la technique. A l’occasion de Tous à l’opéra (du 3 au 5 mai), une répétition scène-orchestre sera ouverte au public et commentée en direct ».