Le Tour de France des productions de la saison 2017/2018
Après notre récapitulatif de saison de l’Opéra de Paris et de la région d’Île-de-France, Ôlyrix vous propose de découvrir, lors d’un Tour de France lyrique, les productions marquantes de la saison 2017/2018 en régions. Comme toujours, un simple clic sur chaque nom et vous retrouverez toute l’actualité, la programmation ainsi que nos contenus exclusifs !
Point de départ de notre excursion, l’Opéra de Lille offre cette saison un programme équilibré, avec pour commencer le sombre Cosi fan Tutte de Mozart par Christophe Honoré avec la Fiordiligi de Ruzan Mantashyan, suivi du rare et puissant Nain de Zemlinski incarné par Mathias Vidal. Place ensuite à la féerie potagère avec une reprise du Roi Carotte d’Offenbach par Laurent Pelly puis La Légende du Roi Dragon d’Arthur Lavandier qui enflamme la jeunesse (l’ouvrage étant interprété par des chœurs d’enfants âgés de 8 à 12 ans). Et tandis qu’à quelques pas, Jean-Claude Malgoire dirige une dernière fois Pelléas et Mélisande avec Guillaume Andrieux et Sabine Devieilhe à l’Atelier lyrique de Tourcoing, la saison s’achève libératrice avec une version dense, forte et intense du Nabucco de Verdi dans la mise en scène de Marie-Eve Signeyrole.
De passage à Reims pour un Cosi fan Tutte donnant le pouvoir aux femmes, notre chemin nous amène à l’Opéra de Metz où brille la Mimi (La Bohème) de Yana Kleyn. Une mise en scène élégante aux jeux de lumière ciselés habille le théâtre pour un somptueux Eugène Onéguine, laissant ensuite la place à la Little Italy new-yorkaise où s’installe l’intrigue du Barbier de Séville par Joël Lauwers puis aux quatre couleurs de Samson et Dalila mis en scène par Paul-Émile Fourny. Après une escale à l'Opéra du Rhin pour des Noces débridées et un déchirant Werther, nous cheminons vers l’Opéra national de Lorraine qui régale son auditoire avec un début de saison en séduction grâce au Don Giovanni de Mozart par Jean-François Sivadier, suivi des costumes non moins séduisants d’Un bal masqué théâtral qui fait la part belle à la mise en abyme. Après un Werther de superbe tenue et l’intense Katia Kabanova de Janacek transposé dans les années 1980, le monde de l’enfance règne avec le conte Hansel et Gretel dans la mise en scène moderne d’Emmanuelle Bastet.
En chemin vers Lyon, nous nous arrêtons à Dijon où se produit un remake des Contes d’Hoffmann puis un Simon Boccanegra de Verdi dans une mise en scène théâtrale de Philipp Himmelmann. Loin d’être au bout de nos surprises, le diptyque Pygmalion / L’Amour et Psyché se dévoile ensuite dans la mise en scène expérimentale de Robyn Orlin dominée par la vidéo. Et alors que notre chemin nous amène sous le regard doré de Notre-Dame de Fourvière, nous découvrons la programmation exceptionnelle de l’Opéra de Lugdunum qui propose, dès l’ouverture de saison, le puissant War Requiem de Benjamin Britten, auspice augurant la thématique belliqueuse avec un grandiose Attila, un Don Carlos au milieu des ténèbres avec la mise en scène de Christophe Honoré, puis un Macbeth emmené au pays des traders et du capitalisme impitoyable. Dans un autre registre, l’institution lyonnaise présente La Cenerentola de Rossini dans la mise en scène de Stefan Herheim, alliant finesse et ridicule, avant de s’inviter au Théâtre national populaire de Villeurbanne pour le Journal d’un disparu de Janacek mis en scène par Ivo van Hove. S'y produit par ailleurs la création de GerMANIA, bouleversant mythe moderne et universel ainsi que la création française du Cercle de craie de Zemlinsky. Après avoir longé le Parc Naturel Régional du Pilat, nous croisons Karine Deshayes en royale Sémiramide à l’Opéra de Saint-Étienne, ce dernier accueillant par la suite la création mondiale de Fando et Lis de Benoît Menut et un chef-d’œuvre du répertoire français : Faust, poétique et terrible dans l’ingénieuse mise en scène de Julien Ostini.
Cap vers le sud ! Après une escale aux Chorégies d'Orange (avec un Mefistofele événement), nous abordons l’Opéra Grand Avignon qui fait rire et sourire avec, outre un Enlèvement au Sérail entre tradition et traduction, les joyeux Mousquetaires au couvent de Louis Varney et une très belle production de l’opérette Le Pays du sourire de Franz Lehár. Le son de la guillotine n’est toutefois pas loin et résonne fatidique lors de bouleversants Dialogues des Carmélites présentés dans une nouvelle production signée Alain Timàr, sonorité qui retentit également en ouverture de saison à l’Opéra de Marseille avec Le Dernier jour d’un condamné écrit par la fratrie Alagna. L’institution rassemble ensuite les registres et les genres avec la folle Vie parisienne mise en scène par Nadine Duffaut, Tancrède, mélodrame héroïque du jeune Rossini, mais aussi Ernani, feu d’artifice vocal porté par un quatuor vocal de premier plan (Hui He, Francesco Meli, Alexander Vinogradov et Ludovic Tézier). Deux rares ouvrages y sont également présentés : Hérodiade dans une mise en scène classique et avec des interprètes remarquables (Inva Mula, Nicolas Courjal, Jean-François Lapointe) et La Favorite de Donizetti en version concertante.
De passage à Toulon pour la truculente Mam’zelle Nitouche d’Hervé produite par le Palazzetto Bru Zane (et point de départ d’une longue tournée) et pour la Lucia de la cantatrice turque Serenad Uyar, nous parcourons le Lavandou pour découvrir à Nice Les Noces de Figaro de Mozart, offrant un beau mariage d’ombre et de lumière qui se retrouve dans la mise en scène sombrement lunaire et romantique de Norma (incarnée par Yolanda Auyanet) par Nicola Berloffa. Après une nouvelle production de Roméo et Juliette de Gounod par Irina Brook avec Vannina Santoni et Jésus León (le drame étant installé dans les années 1940), l’institution offre un Nabucco dont la mise en scène, d'une simplicité biblique, est signée Jean-Christophe Mast. Avoisinant la cité niçoise, des invités d’exception se retrouvent à l’Opéra de Monte-Carlo. Pour le bicentenaire de la création de La Cenerentola de Rossini, l’institution invite Cecilia Bartoli en rossinienne baroque, puis convie Barbara Frittoli et Roberto Alagna pour une Adriana Lecouvreur incandescente et Juan Diego Florez qui s’illustre dans une reprise de la production des Contes d’Hoffmann par Jean-Louis Grinda. L’institution programme également le rare I Masnadieri (Les Brigands) de Verdi dans la mise en scène classique de Leo Muscato (qui avait provoqué le scandale en transformant la fin de Carmen à Florence) et un Peter Grimes tout en intensité.
De retour sur nos pas, nous abordons la capitale héraultaise pour un époustouflant programme Vivaldi par Nathalie Stutzmann et son ensemble Orfeo 55 suivi d’une Carmen avatar copieusement sifflée et d’un Nabucco de Verdi qui fait dialoguer l’hier et l’aujourd’hui dans une mise en scène de John Fulljames. La ville rose de Toulouse propose en ouverture de saison le Tiefland d’Eugen d’Albert porté par une production glaciale et magistrale suivi de la non moins rare Rondine de Puccini. Et après une Walkyrie dans l’inoubliable mise en scène signée Nicolas Joël, place à l’amour teinté de sang avec une Clémentine Margaine en Carmen sombre et sensuelle, puis Macbeth, dans lequel les crimes du couple se révèlent dans une mise en scène ténébreuse et métaphorique. Nos émotions à peine remises, nous retrouvons la capitale mondiale du vin et l’ivresse pour La Vie parisienne d’Offenbach, proposé en début de saison. La programmation de Bordeaux, riche en caractère, allie des robes suaves et corsées, avec le tsunami musical Elektra porté par Ingela Brimberg dans le rôle-titre et une Lucia pleine d’esprit(s). Elles ouvrent la voie à un flamboyant Pirate de Bellini dirigé par Paul Daniel et à un Pelléas événement, l’occasion d’une triple prise de rôle : Chiara Skerath en Mélisande, Stanislas de Barbeyrac en Pelléas et Alexandre Duhamel dans le rôle de Golaud. Et après un voyage dans les contes des Mille et une nuits avec Mârouf, Savetier du Caire d’Henri Rabaud mis en scène par Jérôme Deschamps, le Pinocchio de Philippe Boesmans mêle féerie et drame brechtien en un spectacle éblouissant. À côté de ces productions scéniques, la sublime Elīna Garanča y délivre sa première prestation, en récital !
De retour dans les terres, nous traversons Limoges où une Une Flûte enchantée à la mise en scène post-apocalyptique et des Pêcheurs de perles de Bizet dans une mise en scène exotique et colorée animent la capitale de la porcelaine, de la chaussure et de l'émail, avant faire escale à Nantes où Jean-Paul Davois offre, avant de quitter la direction de l’institution, Le Couronnement de Poppée de Monteverdi par Patrice Caurier et Moshe Leiser, l’occasion pour la soprano Chiara Skerath de prendre le rôle-titre, puis un Rinaldo fantasmagorique exploitant les frontières du rêve et du fantastique, le tout saupoudré des drôles de P’tites Michu (Messager). Et tandis que l’Opéra de Tours présente le rare Philémon et Baucis de Gounod porté par Norma Nahoun et une nouvelle production du Songe d’une nuit d’été de Benjamin Britten dans l’habile et féerique mise en scène de Jacques Vincey, Caen reçoit le titanesque et fastueux Ballet royal de la nuit. Ce Tour de France lyrique s’achève sur les lignes belcantistes d'une Norma émouvante et poétique proposée en guise d’adieu par Frédéric Roels à l’Opéra de Rouen (qu’il a dirigé pendant 8 ans).
Toute l’année, Ôlyrix vous a également proposé des comptes-rendus de spectacles à l’international, avec notamment la prise de rôle de Tosca par Yoncheva au Metropolitan Opera House de New York, le récent Parsifal de Munich avec Jonas Kaufmann et Nina Stemme, mais aussi Luisa Miller au Met avec Placido Domingo. Nous étions à Venise pour l’ouverture de l’année Gounod par le Palazzetto Bru Zane, au Festival de Pentecôte de Baden-Baden pour Le Vaisseau fantôme de Wagner, à Stockholm qui accueille le retour triomphal d'Aïda de Verdi, à La Monnaie de Bruxelles pour les Dialogues des Carmélites de Poulenc dans la mise en scène épurée et magistrale d’Olivier Py, mais aussi à Genève pour la trilogie Figaro (l’ingénieux et absurde Barbier de Séville, les sensibles Noces et l’audacieux Figaro divorce d’Elena Langer), l’Ascanio de Saint-Saëns redécouvert en version concert, et le Faust de Gounod magnifié par John Osborne dans le rôle-titre et par la séduisante Marguerite de Ruzan Mantashyan.