Depuis plus d'un siècle, faire la queue permettait d'accéder en premier à la Galerie du Royal Albert Hall, offrant aux plus courageux le privilège d'un concert de tout premier plan à prix abordable (l'un des meilleurs rapports qualité-prix à Londres, si ce n'est au monde, se targuent nos voisins). Désormais, il sera possible de pré-payer le privilège d'accéder à une file prioritaire, dont les infortunés de la seconde voie se répartiront les restes. La sur-côte de 1,50£ contribuera à augmenter les recettes des BBC Proms, dont les billets sont déjà récemment passés de 5£ à 6£.

Une tribune d'Adrian Greeman publiée par le grand quotidien britannique The Guardian a trouvé un large écho en dénonçant avec virulence cette décision : "La fin des files d'attente détruit l'esprit des Proms". "L'argent remplace le dévouement artistique !" dénonçait déjà Julian Baggini dans un article paru la veille et rappelant que la file d'attente est un symbole national d'égalité devant la rareté des produits, renvoyant notamment à la solidarité héroïque de la population lors de la Seconde Guerre mondiale.

Les BBC Proms 2017, qui se déroulent du 14 juillet au 9 septembre, ont déjà été l'objet de nombreuses polémiques, notamment en lien avec le Brexit. Lors de la soirée inaugurale, le pianiste Igor Levit arborait ostensiblement un drapeau européen en interprétant pour bis l'hymne de l'Union (un arrangement de l'Ode à la joie de Beethoven). Deux soirées plus tard, le chef Daniel Barenboim proclamait son inquiétude humaniste face au développement d'une très dangereuse vague de nationalisme et d'isolationnisme. Depuis, la BBC a exigé de lire à l'avance les discours de la soirée de clôture. Si le chef invité Sakari Oramo se pliera à cette obligation (qui fait polémique dans un pays de libertés), l'artiste a pourtant déclaré avec malice que personne ne pourrait l'empêcher de changer son discours une fois au podium.

The Last Night (la dernière soirée) des Proms est pourtant un événement populaire et chamarré, diffusé en direct par la BBC, avec des musiques légères et des drapeaux de tous pays agités en rythme.

L'année dernière, les Proms rendaient également hommage aux victimes de Nice, avec Marseillaise et drapeaux tricolores, nouvelle preuve d'ouverture et de solidarité :