Peter Schreier, l'Évangéliste mort le jour de Noël
Peter Schreier naît le 29 juillet 1935 à Gauernitz (où son père est chantre et organiste) près de Dresde, dont il rejoint le fameux chœur de garçons de l'église Sainte-Croix (Dresdner Kreuzchor, fondé au XIVe siècle). Enfant il chante soprano puis rapidement alto soliste (l'occasion d'effectuer tournées et enregistrements mais également de faire ses "débuts" à l'opéra en garçon dans La Flûte enchantée dès 1944), puis il fait sa mue de ténor, tessiture dont il sera l'un des meilleurs représentant au XXe siècle. Les deux piliers de son répertoire sont les deux fondations absolues de l'art musical Germanique : le Lieder et l'Oratorio (traditions populaire et religieuse), mais c'est d'abord l'Opéra qui propulse sa carrière.
Le ténor rejoint le Chœur de la Radio de Leipzig, complète sa formation en chant ainsi qu'en direction de chœur et d'orchestre, le tout pour faire son retour lyrique dans sa ville en rejoignant la troupe à l'Opéra d'État de Dresde. Ses débuts professionnels y ont lieu en août 1959 en tant que Premier prisonnier dans Fidelio de Beethoven. Sa position lui offre de nouvelles tournées internationales (jusqu'en Inde et au Mali) et notamment à l'Opéra d'État de Berlin qu'il rejoint ensuite comme premier ténor lyrique. Né en Allemagne de l'Est, l'artiste s'épanouit donc en RDA (République Démocratique Allemande durant la division du pays après-guerre) et chante côté Oriental du rideau de fer. Mais sa renommée lui ouvre également les portes de l'Ouest dans les plus prestigieuses institutions : Festival de Bayreuth (en 1963), Opéra d’État de Vienne (1966), Festival de Salzbourg (en 1967 puis pendant 25 ans, comme chanteur puis chef). Il effectue ensuite ses débuts à Londres (1966), au Metropolitan de New York, à La Scala de Milan (1968) puis au Théâtre Colón de Buenos Aires (1969).
Si sa carrière rayonne et se diffuse avec l'art lyrique, c'est dans l'intimité du Lied qu'il sculpte son héritage. Son répertoire va de Mozart à Mahler, du classique au post-romantique donc, mais surtout au cœur du Romantisme avec des versions de référence pour Schubert et Schumann.
Dès 1970, Peter Schreier revient dans une autre Institution de Dresde : cette fois en tant que chef d'orchestre, à la Staatskapelle de Dresde (fondée par le prince-électeur de Saxe Maurice le 22 novembre 1548). Il dirige Haydn, Mozart mais surtout Bach dont il chante l'Évangéliste (également pour les plus grands chefs). Bouclant la boucle c'est de la même manière, en dirigeant Bach (l'Oratorio de Noël) tout en chantant l'Évangéliste qu'il met fin à sa carrière en 2005. Il se retire près de Dresde (toujours) où il s'éteint 2019 années jour pour jour après la naissance de Jésus qu'il aura si souvent chantée.