L'Espagne garde ses Opéras ouverts
Si le Teatro Real de Madrid a été contraint d'annuler l'une de ses représentations, c'est en cours de spectacle (après l'avoir commencé et recommencé), sous la pression d'une partie du public mécontent d'un manque de distanciation dans les balcons. Ironie du sort, il s'agissait d'une représentation d'Un Bal masqué (opéra de Verdi) mais la production avait eu lieu avant cette date et elle a repris ensuite : notre correspondant madrilène en a rendu compte en octobre, comme il a rendu compte de Rusalka qui s'est bien déroulée en novembre (et nous vous donnons rendez-vous pour les prochains comptes-rendus de spectacles dans ce Théâtre Royal qui continue ses activités). Autre cruauté du sort d'ailleurs, le seul spectacle annulé cette année est Le Ballet royal de la nuit car les interprètes ne pouvaient venir depuis l'étranger, idem pour le seul annulé prochainement : Elektra le 18 janvier prochain.
La maison ibérique capitale a pu s'appuyer sur les enseignements et l'expérience de son travail mené durant l'été 2020 pour représenter La Traviata dans un protocole et une mise en scène Covid-compatibles. C'est d'ailleurs avec ce même opéra et avec pour même interprète Lisette Oropesa que l'autre grande maison lyrique du pays, le Grand Théâtre du Liceu à Barcelone, poursuit ses activités tout au long de ce mois de décembre 2020. Lisette Oropesa y figure parmi une quadruple distribution en alternance avec Kristina Mkhitaryan, Pretty Yende (notre compte-rendu de sa prise de rôle à Paris, en 2019 il y a longtemps de cela) ainsi qu'Ermonela Jaho (notre compte-rendu de son incarnation en 2015, à Madrid dans la même mise en scène signée David McVicar actuellement reprise à Barcelone).
À travers le pays, l'activité et l'engagement artistique sont tout aussi vivants et remarqués : ainsi par exemple au Palau de les Arts Reina Sofía (à Valence), qui a notamment représenté Così fan tutte (Mozart), Fin de partie (opéra de Kurtag qui a été annulé à Paris), Mitridate, roi du Pont (Mozart) avec Marc Minkowski, Michael Spyres, Julie Fuchs, Elsa Dreisig, Paul-Antoine Bénos-Dijan, Sarah Aristidou, Cyrille Dubois, Adriana Bignagni Lesca, entre autres concerts (dont les débuts maison de Joyce DiDonato, et même un concert choral). La maison de la Horta qui propose en ce moment La Cenerentola de Rossini version Laurent Pelly jusqu'au 23 décembre, puis des concerts (notamment de Noël) et récitals (dont celui d'Anita Rachvelishvili le 17 janvier) et répète Falstaff de Verdi dans la mise en scène de Mario Martone.
L'état d'urgence sanitaire en Espagne se matérialise en effet par un couvre-feu de 23h à 6h, ce qui n'empêche pas la tenue de spectacles (et bien évidemment, aucun cluster n'a été constaté dans ces lieux de culture vivante préservée). Et chez nos voisins espagnols, même lorsqu'un durcissement de règles a entraîné l'abaissement de la jauge au Liceu, le Théâtre a pu échanger directement avec les plus hautes autorités ministérielles de la culture et de l'intérieur, obtenir la certification de son système de ventilation et repasser d'une jauge limitée à 500 spectateurs à une jauge de 50% (la salle a une capacité totale de 2.292 places). Le temps de la discussion, le Liceu refusant de jouer pour seulement 500 spectateurs, 5 représentations ont été annulées, mais l'institution les a remplacé par d'autres dates rajoutées au programme.
Si la France a connu un second pic épidémique bien supérieur à celui de l'Espagne, la situation actuelle y est comparable et nous en sommes réduits à rêver que les autorités consultent des études comme celle de la Philharmonie démontrant que l'air y circule en salle comme dans un lieu non confiné !