Le Tribut de Zamora à Saint-Etienne : 8. le metteur en scène Gilles Rico
« L'Opéra de Saint-Etienne vient clôre d'une certaine manière un grand cycle Gounod, après Faust et aussi une autre rareté qu'est La Nonne sanglante. La musique du Tribut de Zamora m'a immédiatement séduit. Le grand Gounod est au sommet de ses moyens qu'il développe ici encore, dans une palette expressive mêlant des influences italianisantes et le Grand Opéra. La musique et ses moments sublimes m'ont beaucoup porté, mais c'était plus délicat avec le propos du livret et à la manière d'articuler l'intrigue. Ce sont des défis, intéressants à relever, et j'ai en fait davantage considéré la musique comme guide de la dramaturgie. L'histoire est enracinée dans une époque, avec un regain de l'exotisme romantique. Le Tribut de Zamora a été créé en 1881, six ans après Carmen, et nous sommes toujours plongés dans un proche lointain (l'Espagne, arabo-andalouse). On le retrouve également dans la littérature de l'époque, aussi dans les pièces de théâtre du librettiste de cet opéra, Adolphe d'Ennery. L'opéra aussi puise beaucoup dans cette veine : avec Zoraida di Granata et Alahor in Granata de Donizetti, Les Abencérages de Cherubini ou L'Esule di Granata de Meyerbeer.
J’aime beaucoup cette partition musicale, dès l'ouverture, qui est plutôt un Prologue, dans l’économie de moyens. Tous les passages (nombreux) de mysticisme chrétien infusent le climat de cette œuvre, qui est le dernier opéra achevé de Gounod. Les interludes instrumentaux (notamment au début du troisième acte) sont de toute beauté, tout comme les passages choraux.
Je trouve également passionnante la dernière scène entre Ben-Saïd (l'ambassadeur du calife de Cordoue) et Xaïma (Espagnole qui est sa captive). Il lui offre son coeur, éperdu, puis plonge dans une violence inouïe, le tout dans une forme de cyclothymie. Tous les personnages semblent avoir un degré de folie, qui est pleinement exprimé, dévoilé, déployé par la musique, dans un caractère intensément contenu, puis intensément déployé. »
Rendez-vous chaque jour pour un nouvel épisode de cette série où les artistes vous présentent Le Tribut de Zamora par leurs personnages, et réservez vos places pour Saint-Etienne ces 3 et 5 mai 2024 à cette adresse.
1. Xaïma par Chloé Jacob
2. Hermosa par Élodie Hache
3. Iglésia, l’esclave par Clémence Barrabé
4. Manoël par Léo Vermot-Desroches
5. Ben-Saïd par Jérôme Boutillier
6. Hadjar et le Roi par Mikhail Timoshenko
7. l’alcade Mayor et le Cadi par Kaëlig Boché
8. le metteur en scène Gilles Rico
9. le Chœur par Laurent Touche
10. l'Orchestre par Hervé Niquet