Dialogues des Carmélites à Liège : Constance
« J'aime beaucoup ce personnage de Constance de Saint-Denis, qui est novice comme Blanche. Je pense que tout le monde l'aime (Poulenc le premier), s’enthousiasme son interprète Sheva Tehoval. Elle est profondément humaine, c'est quelqu'un qu'on aime aimer, et à laquelle on s'attache beaucoup (et qui permet jusqu'à la fin qu'on s'attache aux bonnes sœurs) : elle fait vraiment le lien avec les spectateurs aussi. Son caractère est celui d’une jeune fille joyeuse avec une vraie fraicheur, mais pas niaise, très intelligente, très philosophe. Elle est sincère et c'est un côté essentiel pour moi dans l'incarnation.
Leur première scène les montre d’emblée ainsi, Blanche et elle, attachantes et proches de nous, dans leur vie de tous les jours.
Et elle sait aussi parler de la mort de la Prieure, avec des images parlantes : “Qui aurait pu croire qu’elle aurait tant de peine à mourir, qu’elle saurait si mal mourir ! On dirait qu’au moment de la lui donner, le bon Dieu s’est trompé de mort, comme au vestiaire on vous donne un habit pour un autre. Oui, ça devait être la mort d’une autre, une mort trop petite pour elle. Elle ne pouvait seulement pas réussir à enfiler les manches.” C’est bouleversant de vérité. Elle n'a sans doute entendu cela nulle part, c'est certainement sorti de son imaginaire, c'est tellement vrai et beau et profond. »
« Cette scène des fèves est extraordinaire, renchérit la metteuse en scène de cette nouvelle production liégeoise, Marie Lambert-Le Bihan : avec cette coexistence du concret et de la poésie, c'est une offrande de Bernanos (un peu dans l'esprit des textes de Paul Claudel).
Constance est un personnage foncièrement attachant. Elle construit une dynamique de liens et de contrastes avec Blanche. C'est l'ingénuité, l'immédiateté émotionnelle, poétique et musicale, c'est une respiration, une bouffée d'air frais. C'est un personnage solaire et très intéressant à développer. »
« Bien entendu les personnages se construisent ensemble, via l'amitié qui fait évoluer leur relation, une amitié capitale dans la trame de l'histoire, poursuit Sheva Tehoval. L'amitié est un sentiment dont on ne parle pas suffisamment dans la littérature, alors qu'il est tellement fort. Au même titre que l'amour, il peut donner un soutien et des ailes, prenant une place cardinale dans la vie et l'évolution du personnage. Et c'est l'amitié qui permet la vie, dans ce couvent.
Vocalement, ce rôle est pour une soprano plutôt plus légère, elle doit faire ressortir le côté pétillant. C'est une vocalité très bien écrite, très agréable à chanter mais qui reste un défi, l'enjeu étant notamment de parfaitement articuler dans cette tessiture aiguë les paroles (si essentielles).
J'ai chanté beaucoup de mélodies de Poulenc, que j'aime beaucoup, et encore récemment des morceaux liturgiques (le Stabat Mater et le Gloria notamment), avec des caractères qu'on retrouve dans ces Dialogues des Carmélites. »
(Re)découvrez ces personnages poignants au fil des 10 épisodes de cette série, puis du 21 du 29 juin à l’Opéra de Wallonie-Liège.