Monument musical
Chant romantique par excellence, cet air est également appelé « Lied d'Ossian ». Lied, car le livret de l'opéra est basé sur le roman Les souffrances du jeune Werther de Goethe et parce que cet air est de forme strophique, une structure particulièrement privilégiée par les compositeurs de mélodie pendant la période romantique. La référence au poète Ossian s'explique quant à elle par la présence du poème « Les Chants de Selma » dans le roman de Goethe et concentre l'esthétique romantique du drame de Werther : l'errance du voyageur, célèbre figure que les germanistes ont appelée Wanderer, le rappel de la Nature qui reflète les tourments du narrateur (orage, tempête) mais aussi son amour naissant (le souffle du printemps) et enfin l'issue tragique de cet amour. Musicalement, un petit clin d'oeil au barde qu'était Ossian est figuré par l'accompagnement de la harpe, même si très vite Massenet inclut tout l'orchestre dans un grand crescendo à la fin de chaque strophe. L'oscillation entre le majeur et le mineur n'est pas sans rappeler Schubert, qui joue constamment sur ces deux modes harmoniques dans ses Lieder, mais l'intimité propre au genre du Lied est ici décuplée – scène opératique oblige – par la vaillance des aigus du ténor, et par le débordement des sentiments de Werther.
Que ce soit dans le roman ou dans l'opéra, ce Lied intervient à un moment crucial : Werther est revenu voir Charlotte après avoir attendu jusqu'à Noël, selon les consignes de la jeune femme. Toutefois, les sentiments qu'ils éprouvent tous deux sont loin d'être éteints, et sont au contraire ravivés lors de ces retrouvailles : c'est notamment le cas de Charlotte qui, au début de l'acte, réalise qu'elle aime Werther en relisant leurs correspondances. Bien qu'elle ne lui cède pas vraiment, ce moment est néanmoins décisif dans l'opéra puisque la passion amoureuse est à son comble, à tel point que Werther, face au recul de Charlotte, décide de se donner la mort le soir (« Charlotte a dicté mon arrêt »).
L'extrait du jour est interprété par Jonas Kaufmann et Sophie Koch, dans la mythique mise en scène de Benoît Jacquot.
Werther et Charlotte, dont l'amour est réciproque mais impossible, relisent ensemble les poèmes qui les ont tant émus jadis et se remémorent leur bonheur passé.
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Retrouvez les précédents airs de notre plongée dans Werther de Massenet :
03 - Canon Romantique - Werther
02 - Drame tout compris - Werther