Biographie
Astrid Varnay
La soprano dramatique suédoise Astrid Varnay est née à Stockholm le 25 avril 1918. Ses parents sont tout deux d’origine hongroise et chanteurs lyriques : le père est ténor spinto, la mère soprano colorature. La petite Astrid grandit donc pour ainsi dire dans l’opéra. La famille, qui déménage beaucoup, s’arrête un temps à Oslo, où son père fonde l’Opéra-Comique de la ville. L’une des jeunes recrues de leur troupe n’est autre que Kirsten Flagstad, qui deviendra plus tard la mentor de la toute petite fille qui, un soir de spectacle sans babysitter, est couchée par ses parents dans le tiroir capitonné d'une armoire.
Les Varnay partent ensuite en Argentine, puis à New York. Astrid commence par étudier le piano, mais très rapidement ses talents de chanteuse deviennent si manifestes que sa vocation s’impose à elle. Dans cette période d’avant-guerre, Kirsten Flagstad, qui est alors au faîte de sa popularité au Met, persuade le chef d’orchestre et enseignant Hermann Weigert d’apprendre des rôles à Varnay. Le 6 décembre 1941, âgée de vingt-deux ans, alors qu’elle s’apprête à faire ses débuts à la saison suivante, elle doit finalement remplacer la Sieglinde indisposée dans une matinée de la Walkyrie de Wagner, alors même qu’elle n’a jamais fait de répétition en costume. Elle y triomphe, quoique la nouvelle soit éclipsée par l’annonce de l’attaque japonaise sur Pearl Harbour le lendemain. Six jours plus tard, c’est au tour de Brünnhilde de se porter malade, et de nouveau, le succès est au rendez-vous.
Avec son immense voix incandescente allant aisément jusqu’aux aigus les plus perçants, elle s’impose comme l’un des plus grandes wagnériennes du Met, d’autant que Flagstad a désormais quitté le pays. Astrid Varnay se distingue également par ses talents d’actrice, qu’elle apporte aux plus grands rôles wagnériens de soprano dramatique (Elisabeth dans Tannhäuser, Kundry dans Parsifal, Senta dans le Vaisseau Fantôme, Brünnhilde dans le Ring, Isolde dans Tristan et Isolde). La profondeur de sa voix lui permet également d’assurer avec brio des rôles de mezzo-soprano comme Ortrud dans Lohengrin (Met, 1947) ou Venus dans Tannhäuser (Met, 1948).
Néanmoins, dans l’après-guerre, sa position au Met commence à être remise en question, d’autant que Rudolph Bing, qui devient manager du Met en 1949, ne goûte guère la musique de Wagner. Pour s’adapter, elle s’essaye à d’autres rôles, tels qu’Amelia dans Simon Boccanegra de Verdi, qu’elle chante au Met en 1949. Elle préfère toutefois se recentrer peu à peu sur l’Europe, où elle devient notamment une habituée de Festival de Bayreuth. Elle y est Brünnhilde dans un Crépuscule des Dieux (Wagner) dirigé par Hans Knapperbusch à l’occasion de la réouverture du Festival en 1951. Elle y apparaît pendant dix-sept années successives, s’imposant comme l’une des figures de proue du « Nouveau Bayreuth » de Wieland Wagner. Celui-ci, pour défendre ses mises en scène minimalistes aurait d’ailleurs dit : « A quoi bon mettre un arbre sur scène quand on a Astrid Varnay ? », faisant ainsi allusion à son charisme et son jeu de comédienne extraordinaire. Elle excelle aussi dans ses interprétations de Richard Strauss, en particulier du rôle d’Elektra, qu’elle donne notamment au Met en 1952.
Avec le temps, Astrid Varnay se recentre sur les rôles de mezzo-soprano à partir de la fin des années 1960, passant d’Elektra à Clytemnestre (entre autres à l’Opéra d’Etat de Vienne en 1974) et de Salomé à Hérodias (par exemple au Festival d’Edinbourg en 1975), ou sur des rôles plus exigeants sur le plan dramatique que vocalement, comme Kostelnicka dans Jenůfa de Janacek (au Met en 1974) ou Leocadia dans Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny de Kurt Weill (son dernier rôle au Met en 1979).
Elle n’abandonne jamais les scènes lyriques quitte à n’y tenir que de petits rôles. Elle devient également enseignante au Studio de l’Opéra de Munich à partir de 1987. C’est à Munich, ville où elle s’est installée depuis son départ des Etats-Unis, qu’elle donne sa dernière performance, en infirmière dans Boris Godounov de Moussorgski à l’Opéra d’Etat de Bavière 1995. Elle s’éteint à Munich le 4 septembre 2006.