Argument
Acte I
Un jour d'avril 1789, le Chevalier de La Force fait irruption chez son père, le Marquis de La Force, à la recherche de sa sœur, Blanche. Il est inquiet car le carrosse de Blanche a été vu par une connaissance, bloqué au milieu d'une foule agitée. Cela rappelle au Marquis le souvenir de sa femme, morte en couche quinze ans plus tôt après avoir été bloquée au milieu d'une foule paniquée par un feu d'artifice dysfonctionnant, tiré à l'occasion du mariage du Dauphin, futur Louis XVI, et de Marie-Antoinette. Blanche, née ce jour-là, en a gardé une imagination et une peur maladives. Blanche arrive enfin. Mais lasse, elle demande à se retirer dans ses appartements. Le Chevalier quitte également les lieux. Quelques instants plus tard, un cri retentit : Blanche a pris peur en entrant dans sa chambre, ayant eu une vision des appartements de son père, dévastés. Afin de s'isoler de tous les stimuli qui provoquent ces accès de peur, Blanche réclame d'entrer au Carmel.
Quelques semaines plus tard, Blanche se rend au Carmel de Compiègne. Elle y est accueillie par la Prieure, qui l'interroge d'un ton dur sur ses motivations, la mettant en garde sur les illusions qu'elle se fait sur la vie de religieuse : le Carmel ne sera pas le refuge recherché, les efforts sont solitaires et le mode de vie ne facilite aucunement l'héroïsme souhaité par Blanche. La seule raison d'être des religieuses est la prière. La Prieure, malade, se prend malgré tout d'une certaine affection pour cette nouvelle venue. Elle lui demande quel nom de religieuse elle souhaite choisir. Blanche lui répond qu'elle souhaite s'appeler Sœur Blanche de l'Agonie du Christ. A ce nom, la Prieure tressaille.
Admise comme novice, Blanche s'occupe des tâches ménagères avec une comparse, Constance, arrivée également il y a peu. Constance est de nature gaie, ce qui irrite Blanche qui juge cette gaité inadaptée, la Prieure étant à l'agonie. Constance lui répond qu'elle ne craint pas la mort, et lui propose d'échanger leurs deux pauvres vies contre celle de la Prieure. Elle a d'ailleurs le pressentiment qu'elles mourront toutes les deux ensembles, dans un futur proche. Blanche juge sévèrement ces enfantillages.
La Prieure est à l'infirmerie, à l'agonie. Elle se lamente sur son état et s'étonne de se trouver si effrayée par la mort, après avoir médité sur ce sujet toute sa vie. Elle demande à Mère Marie, la Sous-Prieure, si Blanche a décidé de conserver le nom de Sœur Blanche de l'Agonie du Christ. Ce choix ayant été confirmé, elle explique qu'elle a elle-même envisagé de se faire appeler par ce nom, avant de renoncer devant le poids des sacrifices évoqués par ce nom. Elle recommande alors Blanche à Sœur Marie. Celle-ci paraît alors. Elle lui confie son affection et lui livre son testament spirituel, la bénie et lui dit adieu. Blanche quitte les lieux. A l'approche de la mort, la Prieure tient des propos blasphématoires et a la vision de la chapelle profanée, en feu et ensanglantée. Elle expire finalement dans les bras de Blanche, tout juste revenue.
Acte II
Blanche et Constance veillent le corps de la Prieure, chantant un requiem. Alors que Constance quitte la pièce un instant, Blanche est prise de frayeur et cherche à s'enfuir. Mère Marie paraît à ce moment et la réconforte.
Constance a été ramasser des fleurs pour décorer la tombe de la Prieure. Elles espèrent que Mère Marie sera élue pour lui succéder. Constance s'interroge sur le sens de la mort pathétique de la Prieure, qui aurait du affronter cette épreuve plus sereinement à ses yeux. Elle imagine que Dieu s'est trompé de mort et lui a donné celle d'une autre, qui, par conséquent, mourra plus sereinement.
L'ensemble des sœurs du Carmel se réunissent pour écouter la nouvelle Prieure, Madame Lidoine, qui explique en des termes imagés que des temps difficiles arrivent, et que les sœurs doivent se concentrer sur la prière et non sur le martyr. Celui-ci n'arrivant que comme une récompense. Mère Marie prend alors la parole pour exhorter la communauté à se conformer aux volontés de la nouvelle Prieure. Toutes entonnent alors un ave maria.
Le Chevalier de La Force se présente au parloir afin de s'entretenir avec sa sœur avant de quitter la France. La Prieure accepte à la condition que Mère Marie assiste à l'entretien.
Au parloir, le Chevalier demande à sa sœur de quitter le couvent pour rejoindre son père, avec qui elle sera plus en sécurité. Blanche refuse, expliquant toutefois qu'elle n'est pas retenue par la peur de l'extérieur et refusant que son frère instille de nouveau le doute en elle. Une fois son frère parti, elle avoue à Mère Marie qu'elle est aussi venue au Carmel par orgueil, ne supportant plus d'être prise en pitié par son père et son frère. Une fois encore, Mère Marie la réconforte.
A la sacristie, l'aumônier vient de dire la messe. Il annonce aux sœurs qu'il a été proscrit et qu'il doit fuir devant la Terreur. Il bénit les sœurs et leur demande de chanter un ave verum corpus. Lorsque le prêtre s'en va, les sœurs devisent. Mère Marie insinue que les sœurs devraient faire vœux de martyr, mais elle est corrigée par la Prieure : Dieu seul décide de cela. L'aumônier reparaît alors, après avoir fait face à des révolutionnaires. Il fuit de nouveau. Les révolutionnaires entrent alors, et leur fait part d'un décret d'expulsion. Les sœurs devront reprendre une vie civile et s'habiller en conséquent. La Prieure doit rejoindre Paris. Alors qu'on lui a confié une statue de Jésus, Blanche la laisse tomber à son grand désespoir, terrifiée par les cris révolutionnaires.
Acte III
Les sœurs sont rassemblées avant leur expulsion. Le Carmel est dévasté, comme la première Prieure en avait eu la vision. La nouvelle Prieure étant absente, Mère Marie prend l'initiative de proposer à la communauté de faire vœu de martyr. La décision doit être prise au cours d'un vote secret. Si une sœur se dit contre, alors le vœu n'aura pas lieu. Lorsque Mère Marie annonce qu'une voix s'est élevée contre le vœu, les soupçons se tournent vers Blanche, aussitôt disculpée par Constance, qui s'accuse et revient sur sa décision. L'aumônier procède au vœu, tandis que Blanche s'enfuit, terrifiée.
Les révolutionnaires procèdent à l'expulsion des sœurs, habillées en civil. La Prieure voulant prévenir l'aumônier qu'il est trop périlleux de dire la messe comme il était prévu, Mère Marie lui fait remarquer que les sœurs ont fait vœu de martyr. La Prieure, qui ne soutient pas le choix de Mère Marie d'avoir proposé le vœu de martyr, laisse chaque sœur répondre de ce vœu devant Dieu, mais décide pour la communauté de privilégier leur sécurité. Les sœurs quittent le Carmel.
De retour chez elle, Blanche est devenue la domestique des nouveaux occupants des appartements de son père, guillotiné quelques jours auparavant. Les lieux sont dévastés, conformément à la vision qu'elle a eu quelques mois plus tôt. Mère Marie lui rend visite et exige qu'elle la suive, pour son salut. Blanche refuse, terrifiée. Elle avoue se mépriser pour cette peur. Mère Marie lui rappelle son nom de Blanche de l'Agonie du Christ et lui donne une adresse où elle sera en sécurité. La conversation est interrompue lorsqu'une voix demande à Blanche d'aller faire les commissions.
Dans la rue, Blanche apprend par hasard que les autres sœurs ont été arrêtées. Celles-ci, dans leur prison, gardent leurs habitudes de religieuses. La Prieure est présente, mais Mère Marie et Blanche n'ont pas été capturées. La Prieure annonce à la communauté qu'elle soutient à présent leur vœu de martyr, et qu'elle en assume à présent la charge bien qu'elle ne l'ait pas prononcé elle-même. Ces mots réconfortent les sœurs. Constance affirme que Blanche les rejoindra pour le martyr. Le geôlier entre et leur lit leur acte de condamnation à mort. Une fois encore, la Prieure réconforte les sœurs.
L'aumônier apprend à Mère Marie la condamnation à mort des sœurs. Celle-ci décide de les rejoindre, mais l'aumônier l'en dissuade.
La foule se rassemble Place de la Révolution. Les bourreaux préparent l'échafaud. Les sœurs s'approchent, ne semblant pas craindre la mort. Elles entonnent un salve regina et marchent l'une après l'autre vers la guillotine. A chaque exécution, un bruit de guillotine se fait entendre et le chœur est amputé d'une voix, jusqu'à ce que Constance chante seule. Elle aperçoit alors Blanche qui s'approche, puis elle monte à l'échafaud, heureuse de mourir avec sa consœur, comme elle en avait eu la vision. Le chant se meure avec elle. Il est toutefois repris par Blanche qui entonne un Veni Creator Spiritus en marchant au supplice, enfin libérée de sa peur. Ce chant est interrompu par le bruit de la guillotine.