Biographie
Birgit Nilsson
La soprano dramatique suédoise Birgit Nilsson est née le 17 mai 1918. Märta Birgit Svensson de son vrai nom, elle naît dans un petit village au nord de Malmö du nom de Västra Karup. La pratique du chant lui est instinctive. Elle affirme même avoir commencé à chanter avant même d’avoir fait son premier pas. Dès l’âge de trois ans, elle s’accompagne d’un piano miniature offert par sa mère, elle-même très mélomane. Pendant son enfance et son adolescence, elle chante dans la chorale de l’église locale. Elle rejoint l’Académie Royale de Musique de Stockholm en 1941, et commence à utiliser son nom de scène à cette époque. Toutefois, elle garde un très mauvais souvenir de son apprentissage formel, et se considère comme une autodidacte. Son premier professeur, Hislop, n’est en effet pas très encourageant, lui conseillant de retourner dans sa campagne.
Elle fait sa première apparition sur scène en 1946 à l’Opéra Royal de Stockholm, remplaçant au pied levé Agathe dans le Freischütz de Weber. Là non plus, l’expérience n’est pas concluante, le chef d’orchestre Leo Blech se montrant peu élogieux à son égard. L’échec sape totalement la jeune Birgit, qui traverse un moment difficile. Heureusement pour Nilsson et pour la postérité, un autre maestro allemand ayant fui le nazisme, Fritz Busch, lui donne sa chance un an plus tard, lui confiant le rôle de Lady Macbeth (Macbeth de Verdi). Cette fois-ci, le succès est au rendez-vous, et Birgit Nilsson devient une vedette dans son pays. Pendant ces années de formation, si elle commence à montrer une affinité pour les rôles dramatiques, son répertoire reste assez varié, puisqu’elle chante aussi bien Suzanna (Les Noces de Figaro de Mozart), que Senta (Le Vaisseau fantôme de Wagner), en passant par Tosca (Puccini) et la Maréchale (Le Chevalier à la Rose de Strauss).
Sa première grande apparition à l’étranger a lieu en 1951, quand elle est Electre dans Idoménée de Mozart au Festival de Glyndebourne. Elle fait ensuite ses débuts à l’Opéra d’Etat de Vienne en 1953, puis au Festival de Bayreuth en 1954, où elle incarne Elsa dans Lohengrin (Wagner). La même année, elle assure le rôle de Brünnhilde dans le Ring durant le Festival de Munich.
Elle s’impose ainsi comme l'héritière naturelle de Kirsten Flagstad au titre de soprano dramatique suprême. Sa puissance vocale volcanique, soutenue par une endurance à toute épreuve, en fait une wagnérienne rêvée. Suivent ses débuts américains à San Francisco en 1956 en Brünnhilde dans La Walkyrie (Wagner). En dehors de Wagner, et des grands rôles dramatiques straussiens, son plus grand rôle est sans conteste Turandot (Puccini). C’est dans ce rôle à la fois très bref et très exigeant qu’elle ouvre la saison 1958 de la Scala, et devient la première non-italienne à tenir cet honneur dans l'histoire de l'institution. L’année suivante, elle débute au Met dans le rôle d’Isolde (Tristan et Isolde de Wagner). De 1958 à 1965, elle participe également au premier enregistrement studio complet du Ring, chantant Brünnhilde sous la direction de Georg Solti. Parmi ses enregistrements de référence comptent également deux autres collaborations avec Solti, Salomé en 1962 et Elektra en 1967 (tout deux de Strauss), ainsi que son interprétation d’Isolde à Bayreuth en 1966 sous la direction de Karl Böhm. Pourtant, Nilsson elle-même a toujours été déçue par ses propres enregistrements, considérant que le studio ne permet pas de se rendre pleinement compte de la force de sa voix.
Sa carrière se caractérise par sa longévité exceptionnelle, alors même que ses rôles fétiches sont de ceux qui usent leurs interprètes. Elle se montre en revanche assez rétive à essayer de nouveaux rôles. En dehors de la scène, Birgit Nilsson est très appréciée pour sa nature terre à terre et son franc-parler redoutable. Elle n’hésite pas à tenir tête aux plus grands maestros, et se montre fine négociatrice pour ses contrats. Ses bons mots et répartie sont d’ailleurs légendaires. Ainsi, à un journaliste qui veut savoir ce qu’il faut pour chanter Isolde, elle répond : « De bonnes chaussures ». Lorsqu'on lui demande si elle a des personnes à charge, elle réplique : « Rudolph Bing » (le directeur du Met). Les exemples de ce type sont nombreux.
Alors même qu’elle touche à la fin de sa carrière, approchant de la soixantaine, sa voix n’accuse guère les ravages du temps. Ainsi, en 1975, elle apprend même un nouveau rôle, et non des moins exigeants : la Teinturière dans La Femme sans ombre de Richard Strauss, qu’elle débute à Stockholm. Après une longue absence des Etats-Unis suite à des querelles avec le fisc américain en 1975, elle fait son retour triomphal au Met en 1980 dans Elektra (Strauss). Sa performance au Gala du Met de 1983 n’a rien à envier à celles des jeunes talents d’alors. Elle prend cependant sa retraite l’année suivante, revenant au calme dans sa campagne natale. Elle continue occasionnellement à donner des master classes jusqu’à sa mort, le 25 décembre 2005.