Etat civil
- Librettiste
- Metteur en scène
- Créateur décors
Biographie
Le metteur en scène et librettiste américain Peter Sellars naît le 27 septembre 1957 à Pittsburgh, en Pennsylvanie. Enfant excentrique (il possède plusieurs serpents de compagnie) et mélomane acharné, il est très marqué par la croyance scientiste de ses parents, qui aura une grande influence sur sa carrière, l’incitant à produire des œuvres engagées, en dialogue avec leur époque. Vers dix ans, il s'investit dans des spectacles de marionnettes javanaises ou de bunraku à travers les rues de Pittsburgh. À quatorze ans, il part faire son lycée à la prestigieuse Phillips Academy, où son style non-conventionnel divise déjà : certains de ses professeurs le méprisent, le considérant comme un hurluberlu égocentrique, tandis que d’autres sont impressionnés par son imagination.
Il est admis à Harvard, mais il prend une année sabbatique avant de démarrer ses études afin d'aller à Paris, en 1974-1975. Il y fréquente tous les théâtres d’avant-garde et assiste aux mises en scène des Contes d’Hoffmann d’Offenbach par Patrice Chéreau et des Noces de Figaro de Mozart par Giorgio Strehler. À Harvard, où il étudie de 1976 à 1980, ses mises en scène divisent encore, au point qu’il est exclu de l’association théâtrale étudiante. Il crée donc sa propre troupe underground (littéralement, puisqu’elle est basée dans le sous-sol de son dortoir) qui monte Antoine et Cléopâtre de Shakespeare dans une piscine et une version condensée de la Tétralogie de Wagner avec des marionnettes et des acteurs, accompagnés par des enregistrements. Il fait en 1980 sa première mise en scène de Don Giovanni dans un festival d’été dans le New Hampshire (États-Unis). Puis, l’American Repertory Theatre, lui offre la mise en scène d’Orlando de Haendel, qu’il réinvente en une histoire de cosmonautes située sur Mars. Le succès critique et les récompenses sont au rendez-vous : il devient Directeur artistique de la Boston Shakespeare Company en 1983. Il y met en scène des pièces de théâtre mais aussi l’opéra contemporain Le Phare de Peter Maxwell Davies.
Il quitte la Boston Shakespeare Company au bout d’un an pour fonder l’American National Theatre au Kennedy Center de Washington. Le projet est un fiasco, le budget étant allégrement dépassé tandis que le public n’est pas au rendez-vous. Il ne tarde pas à revenir sur le devant de la scène au PepsiCo Summerfare Festival à Purchase. Il y crée d’abord Jules César de Haendel en 1985, qu’il situe à Beyrouth pendant la guerre, avec des Américains coincés dans la piscine du Hilton. Surtout, sa trilogie Mozart / Da Ponte fait date, avec Cosi fan tutte (1987), puis les Les Noces de Figaro et Don Giovanni (1989). Le premier est situé dans un diner de la côte Est, le deuxième dans la Trump Tower, le dernier dans Spanish Harlem. Ainsi, Don Giovanni y est un brutal cocaïnomane et Donna Elvira une junkie. C’est lui qui persuade John Adams d’écrire son premier opéra, qu’il met en scène, et dont il souffle l’idée : la visite de Nixon en Chine : Nixon en Chine est créé à Houston en 1987 et est aujourd’hui l’un des rares classiques lyriques composés depuis.
Dans les années 1990, il se fait connaître en Europe. Il débute à Glyndebourne avec La Flûte enchantée qu’il situe sous une autoroute de Los Angeles. En 1991, une immense controverse entoure la première à La Monnaie de Bruxelles de La mort de Klinghoffer, qui réunit la même équipe Adams/Sellars/Goodman. L’opéra, tiré d’un fait divers, parle d’une attaque d’un bateau de croisière par le Front de Libération Palestinienne, qui aboutit à la mort d’un passager handicapé juif. L’œuvre est accusée d’apologie du terrorisme et d’antisémitisme, et les représentations postérieures de l’œuvre suscitent également des controverses. Il met en scène Saint François d’Assise de Messiaen au Festival de Salzbourg en 1992 avec José Van Dam dans le rôle-titre. Son retour à Glyndebourne en 1996 pour Theodora de Haendel est cette fois-ci un franc succès, qui restera gravé dans les annales. La même année, il place le Rake’s Progress de Stavinsky dans une prison, au Châtelet. Sa mise en scène du Grand Macabre de Ligeti au Festival de Salzbourg en 1997 n’est pas au goût du compositeur, la catastrophe nucléaire étant trop explicite. En revanche, la compositrice Kaija Saariaho apprécie fortement sa mise en scène de son premier opéra L’Amour de loin à Salzbourg en 2001.
Il poursuit sa collaboration avec John Adams en écrivant le livret du Docteur Atomique en 2005 pour San Francisco. La même année, sa mise en scène de Tristan et Isolde de Wagner est donnée à Bastille. En 2006, Adrianna Mater de Saariaho est créée à Bastille sous sa direction : l’équipe se reconstitue pour Only the Sound remains à Amsterdam en 2013. En 2017, il met en scène la création Girls of the Golden West d’Adams à San Francisco. L'année suivante, en 2018, il s'attaque à Kopernikus (Claude Vivier) au Théâtre du Capitole.
Peter Sellars reste aujourd'hui actif dans l'enseignement, notamment à l'Université de Los Angeles. Il affirme par ailleurs souhaiter se consacrer à des projets de création de petites formes mais avec une grande profondeur de réflexion. Il travaille notamment à l'hommage à Joséphine Baker, Perle noire : Méditations pour Joséphine au Théâtre du Châtelet en 2021.