La France veut sauver une saison de Festivals en 2021
Objectif : avoir une saison de Festivals en 2021
Le souhait est clair, le détail un peu moins même si le Ministère de la Culture veut justement donner de la visibilité (malgré les incertitudes de la pandémie), avec l'annonce d'un cadre d’organisation et de mesures économiques.
Le Ministère apporte ainsi des éléments de réponse, mais chacune soulevant d'autres questions, en suspens.
Pour les Festivals, mais lesquels et comment ?
Visiblement la Ministre de la Culture est attachée aux festivals : c’est à eux qu’elle a consacré des États Généraux en octobre dernier, et c’est à eux qu’elle cherche aujourd’hui à donner de la visibilité. Les théâtres disposant de saisons régulières (et tous ceux dont le travail dépend de ces institutions) restent quant à eux en attente d’éclaircissements, de visibilité, de perspectives et d’un “modèle résilient” qui demande de fait, à ceux qui l’attendent, une grande résilience tant il tarde à venir. Pire, ces salles sont aujourd’hui totalement ignorées, rayées du discours du gouvernement qui n’en a plus dit un mot depuis des semaines.
Pour ce qui est des festivals, le Ministère ne souhaite manifestement pas faire la différence entre les différents types d’organisation ou de pratiques musicales, alors pourtant que la différence entre le chant lyrique et les autres disciplines est avancé par ailleurs pour repousser la reprise de cours de chant et de chorales. De même, nulle distinction entre les festivals qui sont aussi des lieux de visites patrimoniales et les autres, alors pourtant que le Ministère de la Culture prévoit de rouvrir les musées avant les salles de spectacle.
Le projet avancé pour l’été 2021 ne fait pas non plus de différence entre festivals en extérieur et en intérieur alors que la circulation du virus peut être très différente (quoique certaine salle ayant démontré que la situation y est comparable à celle en extérieur reste pourtant toujours fermée, sachant également que des études scientifiques ont prouvé la sécurité sanitaire des salles de spectacle).
Les jauges seront limitées à 5000 places assises avec distanciation, ce qui peut sembler un nombre important par rapport à la situation actuelle où la jauge est à 0. Toutefois, il reste à préciser quelle sera la distanciation. Selon le protocole retenu, les lieux pourraient être remplis à 25% voire moins (avec par exemple 2 mètres de stricte distanciation à 360° entre tous les spectateurs) ou jusqu'à 75% (avec un siège d'écart entre groupes). De fait, seuls les immenses Festivals (comme les Chorégies d'Orange avec leurs 8500 places) pourraient rêver de monter à 5000 personnes accueillies (qui est certes la jauge maximale -dans ce premier temps- mise en vente en prévision pour cet été mais aussi la jauge minimale sous laquelle le Directeur Jean-Louis Grinda ne souhaite pas descendre), et tous les autres, petits ou grands, seront bien réduits.
Cette jauge de 5000 pourra toutefois évoluer selon la situation sanitaire : diminuer, augmenter voire même permettre des concerts debout. Mais là encore cela implique que le gouvernement dispose d'un système permettant de moduler ses décisions selon la situation, système qui devrait être communiqué pour donner une perspective claire au monde de la culture en général. Les protocoles sanitaires spécifiques seront établis “en concertation avec les professionnels, et soumis à la validation du Centre de crise sanitaire et du Centre interministériel de crise.”
“Les organisateurs de Festivals (en salles comme en plein air) sont incités à imaginer des formats différents” permettant aux Festivals debout de recevoir le public assis et à tous de trouver une viabilité avec ces jauges (retrouvez notre dossier grand format sur la manière dont les festivals 2020 avaient trouvé des idées et solutions). Mais là encore, puisque le Gouvernement acte la différence sanitaire entre salles accueillant du public assis et lieux debout, comment comprendre que les théâtres soient toujours fermés, n'aient aucune visibilité de réouverture et doivent attendre les résultats d'études scientifiques en avril prochain alors que ces études mêlent les situations assis, debout, assis-debout à sa place distanciée, etc. ? D'autant que des études existent déjà et ont rendu leurs conclusions à l'étranger, sans oublier le recul dont nous disposons sur la situation dans les pays qui ont déjà déconfiné la culture.
Le Ministère de la Culture annonce également un triple soutien financier répondant aux trois scénarios de difficultés rencontrées par les Festivals : pour ceux contraints d'annuler dès maintenant, pour ceux qui seraient contraints d'annuler plus tard en raison d'une dégradation de la situation sanitaire et pour compenser les pertes d'exploitation en cas d'adaptations. 30 M€ seront consacrés à ces deux derniers dispositifs (pour toutes les disciplines confondues). Le Ministère fixe donc d'ores et déjà une aide avant de pouvoir déterminer quelle sera la situation et les besoins d'ici à ce qu'elle soit utile. Cette annonce rappelle également que les intermittents dont “l’année blanche” arrive à échéance dans 6 mois, attendent encore des réponses.
Enfin, 15 M€ seront consacrés aux captations "toutes disciplines confondues (théâtre, musique, danse et autres esthétiques)", mais là encore sans permettre de savoir si l'objectif est de pouvoir atteindre des spectateurs qui seraient sinon allés aux festivals, ou d'autres, et auquel cas il devrait s'agir d'une politique d'accès à la culture pérennisée et non pas d'urgence. D'ailleurs, la chaîne Culturebox sur la TNT ne sait toujours pas à quel point elle sera "éphémère" : elle est financée jusqu'en mai, mais il semble impossible d'imaginer qu'elle ne soit pas absolument essentielle cet été.