De derrière le rideau : Quand dame Nature se met en colère
Un adage, pas toujours pertinent, aime à nous dire qu’ « à tout malheur bonheur est bon ! ». Si seulement ! Les évènements récents qui ont endeuillé notre si beau massif des Écrins et quelques temps après les Alpes-Maritimes en sont malgré tout une illustration et nous font nous pencher avec prudence malgré tout sur ces quelques mots. Une avalanche ici, de terribles inondations là, dame Nature s’est rebellée, et l’Homme, qui croit tout maitriser, se sent soudain petit face aux éléments déchainés. Dans les deux cas, pas de responsabilité humaine, mais des concours de circonstances, des prévisions d’experts certes avancées mais sans alerte absolue malgré une certaine vigilance requise de notre part. Comme toujours en montagne ou lorsque l’orage s’annonce, rien de plus. Et c’est la catastrophe et le nombre de victimes fait peur. Une seule et c’est déjà trop ! La nature reste imprévisible et mérite le respect de chacun. Mais on ne va tout de même pas quitter la région niçoise ou encore la Savoie sous prétexte que les éléments s’y déchainent parfois ! Non, la nature réagit seulement aux évènements de la vie, ni plus ni moins que nous. Au contraire, nous devons y rester et être prêts à intervenir lorsque l’urgence parait.
Et c’est ce qui s’est passé avec les inondations dans le sud ou tant d’accidents en montagne. Les élans de générosité ont été sans limites et beaucoup se sont révélés plus courageux qu’ils ne le pensaient et ont vraiment sauvé des vies. Des héros ordinaires, souvent anonymes, mais des héros exceptionnels, ont agi en Hommes, mus qu’ils étaient par une force insoupçonnée qui les poussait à l’exploit. Costauds, malingres, jeunes, vieux, hommes ou femmes, expérimentés ou non, ils l’ont fait ! A tout malheur bonheur est bon, disais-je…
L’opéra nous montre que ce n’est pas toujours le cas. La Wally d’Alfredo Catalani nous fait découvrir que la montagne peut parfois avoir le dernier mot. Ainsi dans ce si beau Tyrol aux promesses « alpinistiques » sans limites, l’héroïne éponyme verra son amoureux par elle condamné, précipité dans un ravin. Sa colère retombée, horrifiée, au péril de sa vie, elle l’en sortira à l’aide d’une corde. Mais la nature ne s’en tiendra pas là, et l’amoureux transi appelant sa Wally du haut de la montagne, périra dans une avalanche par son cri déclenchée. Elle l’y rejoindra, transformant pour toujours une crevasse providentielle en un écrin massif. A tout malheur, malheur est bon !
Mozart lui-même nous rappellera les dangers de la mer. Idoménée ne sera ainsi sauvé d’une violente tempête que s’il sacrifie à Neptune, en colère et responsable de cette fureur marine, la première personne rencontrée au retour sur le rivage. Horreur, il s’agira de son propre fils. Que faire ? Deux actes et mille péripéties plus tard, la sagesse fera transformer le vœu malencontreux, en un autre sacrifice : qu’Idoménée abdique en faveur de son fils, qui se voit installé sur le trône paternel. Les dieux de l’amour n’étaient pas très loin et sérénité et bonheur réinvestissent les lieux. A tout malheur bonheur est bon.
En France, les catastrophes tissent le lit d’une générosité sans faille, spontanée et totalement gratuite. Les livrets de nos opéras, quant à eux, doivent nous tenir en haleine, ainsi que les chanteurs, pendant plusieurs actes. Alors, ne changeons rien !
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