La nouvelle troupe de l'Opéra de Paris se dévoile (en partie)
Le Directeur de l'Opéra de Paris, Alexander Neef, nous avait annoncé dès sa prise de fonctions souhaiter le retour d'une troupe dans la maison. Différente de celle qui existait par le passé (car il ne s'agit plus d'engager des artistes à vie), elle se présente -aussi- différente qu'annoncée.
Il aura fallu le temps de trouver une solution juridique et contractuelle pour embaucher ces artistes sur une durée déterminée : ce sera finalement par des contrats allant de mi-août à mi-juillet, permettant de ne pas les rémunérer durant la fermeture de la maison et de les renouveler le cas échéant pour une ou deux saisons supplémentaires.
Les "troupiers" seront donc en CDD mais clairement des salariés (avec un salaire mensuel) : une disponibilité complète leur est ainsi demandée durant tout leur contrat (les exceptions devant être l'objet d'une autorisation d'absence écrite).
En contrepartie, la maison annonce qu'elle leur proposera un accompagnement artistique, des concerts, des tournées, des doublures (fait d'être prêt à remplacer un soliste s'il se trouve dans l'impossibilité de chanter son rôle), des seconds rôles… mais aussi des premiers rôles.
Cet objectif sera donc clairement à suivre car pour l'instant les rôles confiés la saison prochaine (certes leur première dans la troupe) aux profils retenus ne semblent pas être de ceux qui mènent à un rôle de premier plan sur une scène telle que Bastille ou Garnier.
Le Directeur expliquait nonobstant à ce sujet dans notre interview inaugurale : « L'idée d'une continuité pour des rôles d’envergure intermédiaire est intéressante mais si nous avons un beau rôle à mettre en avant tant mieux : c'est dans mon idée de nouer la relation entre les artistes et le public, de leur présenter une voix qui deviendra ainsi une vedette. »
La maison a pourtant choisi de retenir, pour la première saison de sa troupe, de jeunes artistes dont les profils et la jeune expérience correspondent plus à ceux d’une académie (même avancée). En cela, la troupe ne semble pas en l’état répondre à une véritable diversité de profils, qui permettrait à des artistes également avancés dans leur carrière d’avoir une exposition leur permettant de franchir le stade qui les sépare de la célébrité nationale et internationale (sans oublier aussi, qu’historiquement, le fonctionnement en troupe servait également à faire travailler des interprètes bien avancés dans leur carrière, y compris dans des rôles de caractères matures, ce qui leur permettait de servir de mentors sur les plateaux).
Restera donc à voir si la troupe accomplit vraiment ces objectifs, et se distingue vraiment de l'Académie maison (dont elle peut être un prolongement logique pour certains, mais sans qu'elle se confonde avec trois années supplémentaires d'un parcours similaire) : tout comme il reste à voir si Alexander Neef fera de l'Opéra de Paris une maison de répertoire comme il l'avait annoncé (les deux sujets étant intimement liés).
Voici notre présentation des 7 membres de la troupe pour 2023/2024, que vous retrouvez bien entendu dans notre présentation de la saison de l'Opéra de Paris, et pour lesquels vous pouvez obtenir toutes les informations supplémentaires en cliquant sur leurs noms :
Alejandro Baliñas Vieites, qui est entré à l’Académie de l’Opéra national de Paris en 2021 enchaînera donc sur la troupe. Rappelons donc d’emblée que l’Académie est l’occasion de concerts et de projets spécifiques mais qu’elle est aussi déjà l’occasion d’un tremplin permettant d’obtenir de petits rôles dans de grandes productions : Alejandro Baliñas Vieites a ainsi tenu le rôle du Cappadocien dans la nouvelle production de Salomé de Strauss en octobre dernier (il reprendra d’ailleurs le même rôle dans la reprise de cette production en mai 2024), puis Zuniga pour Carmen et en ce mois de mars 2023 celui du premier fossoyeur d’Hamlet, le tout à l’Opéra Bastille. La troupe lui permet d’avoir cinq petits rôles au lieu de trois.
Marine Chagnon restera sa collègue à la troupe : elle a rejoint l’Académie de l’Opéra de Paris en même temps. Récemment nommée aux Victoires de la Musique Classique, nous avons publié à cette occasion une grande interview de l’artiste qui aura elle aussi cinq rôles la saison prochaine (dont celui pas si modeste de Zerlina).
Emy Gazeilles, déjà appréciée à Rouen, Lille, à la Philharmonie et programmée cet été sur la Scène Émergente des Chorégies d’Orange n’aura pour sa part que deux rôles sur la scène capitale la saison prochaine : elle servira Massenet en Noémie de Cendrillon et Pedro de Don Quichotte.
Nicholas Jones fera pour sa part figure de révélation pour le public parisien et même européen, lui qui a fait sa jeune carrière en Australie. Lui aussi se verra confier cinq rôles.
Maciej Kwaśnikowski a lui été membre de l’Académie, entre 2017 à 2019 mais il participait lui aussi à la récente production d’Hamlet ainsi qu’à celle de Salomé (dont il reprendra lui aussi le même rôle, parmi ses quatre engagements la saison prochaine).
Ilanah Lobel-Torres qui a rejoint l’Académie de l’Opéra de Paris en 2019 a participé à une demi-douzaine de productions et sera à l’affiche d’une demi-demi-douzaine la saison prochaine.
Florent Mbia n’a pas fait l’Académie mais il est membre des Chœurs de l’Opéra national de Paris (il se voit ainsi doublement crédité dans la brochure) et déjà un habitué des productions de la maison. La troupe lui donnera l’occasion de tenir quatre seconds rôles durant la prochaine saison.
La finale des auditions pour la seconde promotion de la troupe (2024/2025) vient de se tenir : l'objectif est comme l'année dernière de recruter 8 artistes représentant la diversité des tessitures, en vue de former donc une troupe d’une quinzaine de voix.