Etude moins encourageante sur la transmission du virus dans les chorales
Notre précédent article sur le sujet, "Etude encourageante : les musiciens d'orchestre diffuseraient peu le virus en jouant", rendait ainsi compte d'une enquête scientifique menée à Vienne sur la transmission du Covid-19 au sein de l'orchestre, une enquête affirmant que les instruments ne projetaient de virus potentiel qu'à 50 cm du visage (et à 80 cm de la flûte).
Des résultats que notre premier article nuançait, en particulier pour sa méthodologie et concernant la question de la pratique amateure et chorale. Or, justement, le monde choral amateur et professionnel restait particulièrement inquiet pour la situation sanitaire étant donné que "le fort nombre de cas d'infection au Covid-19 en particulier dans les chœurs ne pouvait vraisemblablement pas s’expliquer seulement par des projections de postillons". Ces propos (rapportés par la NDR, Radio de l'Allemagne du Nord) ont été tenus par Susanne Vongries, "Managerin" du Chœur de la Radio Bavaroise qui a de fait commandé une étude sanitaire, sur la transmission par aérosols, au Professeur Matthias Echternach (chef du service de phoniatrie et d'audiologie pédiatrique au CHU de Munich, et chanteur autodidacte).
L'objectif était de savoir comment chanter ensemble en toute sécurité. Cette enquête pose toutefois un double problème méthodologique (exactement les mêmes que nous avions signalés pour la précédente étude concernant les instrumentistes). Tout d'abord, elle a été commandée, réalisée avec et réalisée pour une seule et même entité (c'est le chœur de la Radio Bavaroise qui nous annonce les résultats de cette enquête commandée par le chœur de la Radio Bavaroise, avec des tests effectués par les choristes de la Radio Bavaroise). De surcroît, Susanne Vongries se félicite que l'étude du Professeur Matthias Echternach -qui s'est associé pour l'occasion au Dr. Stefan Kniesburges de l'Hôpital Universitaire d'Erlangen- ait été préparée et réalisée en un temps très court.
Le protocole ressemble à s'y méprendre à l'étude réalisée par le Professeur Docteur Fritz Sterz et l'Orchestre philharmonique de Vienne, mais les résultats sont plus alarmants. Dans les locaux de la Radio bavaroise à Unterföhring, dans le Studio n°2, les scientifiques ont installé deux dispositifs du 20 au 26 mai 2020 avec 10 choristes (et 10 instrumentistes à vent de l'orchestre symphonique maison servant pour les mesures témoin). Les mesures ont été prises à mesure que les musiciens parlaient, jouaient et chantaient de plus en plus fort. Ce sont d'abord les gouttelettes qui ont été examinées, grâce à des caméras ultra-rapides et à des lasers balayant l'espace pour refléter des postillons. Ensuite, une puissante lumière blanche servait à révéler les plus petits aérosols (rendus visibles par les musiciens qui devaient exhaler la fumée de cigarettes électroniques).
Résultats pour les chanteurs : la pièce doit impérativement être ventilée et l'air renouvelé (sans quoi les aérosols peuvent stagner et fausser pour le pire toutes les mesures) et les choristes doivent être plus éloignés les uns devant les autres que les uns à côté des autres. Les aérosols se projettent entre 1 et 1,5 mètre à l'avant lors du chant (la distance de sécurité recommandée est donc de 2 à 2,5 mètres). 1,5 mètre pourrait en revanche être une distance suffisante sur les côtés des chanteurs.
L'étude a aussi été effectuée avec des masques, mais (comme c'est hélas le cas depuis le début de l'épidémie), les résultats ne semblent pas probants : selon les masques, les postillons semblent être filtrés mais les aérosols se propagent, différemment (en hauteur et en biais, suivant la facture de la protection et l'émission forcément changée de l'interprète).
Cela n'a pas empêché l'institution musicale d'en sourire d'une manière artistique : Rupert Huber a composé pour ces choristes une œuvre à chanter masquée. L'œuvre s'intitule U + 1F637, ce qui correspond au code alphanumérique du smiley avec un masque