Wozzeck à Monte-Carlo : les deux ouvriers
Michel Fau continue sa présentation de tous les personnages de cet opus, jusqu’aux deux ouvriers : “Deux personnages qui tiennent un discours incohérent et désespéré (notamment car ils sont sous l'effet de l'alcool dans la taverne). Comme toute ma mise en scène est vue par l'enfant et que Marie dit à son fils de dormir pour ne pas être enlevé par le voleur d'enfant, j'ai fait ici de ces deux ouvriers le voleur d'enfant et l'ange du sommeil. Ils sont avant tout et eux aussi perdus, sans retour.”
Mathieu Toulouse nous présente son personnage : “Le premier ouvrier apparaît au deuxième acte, traditionnellement dans une taverne ou une auberge, mais dans la mise en scène de Michel Fau, toute l’action se déroule dans la chambre de l’enfant de Marie et Wozzeck. J’apparais donc comme dans un rêve de l’enfant, pas comme un ouvrier. Au début de l’acte II, Marie parle à son enfant et lui fait peur en lui disant que le tzigane voleur d’enfant va venir le chercher. Michel Fau a donc choisi de me représenter en tzigane voleur d’enfant. Dans cette mise en scène, je suis donc torturé entre mon désir d’abuser de l’enfant ou de lui faire peur et la culpabilité causée par ce désir. Il y a donc une première apparition muette au début de l’acte II pour faire peur à l’enfant et une seconde apparition chantée où j’exprime ce mal être. Je suis toujours ivre, comme il est écrit dans la partition. Mon personnage est désespéré, déchiré comme il le dit lui même : « je porte une chemise qui n’est pas la mienne et mon âme pue l’eau de vie…. Pourquoi le monde est-il si triste ? ».
Si un voyageur installé dans le flux temporel pense à la sagesse de Dieu et demande “Pourquoi est l'homme ?” En vérité je vous le dis : il est bien ainsi ! Comment auraient vécu fermiers, tonneliers, tailleurs, docteurs, si Dieu n'avait pas fait l'homme (pudique, envieux, criminel et assoiffé). C'est pourquoi je vous le dis sans doute possible mes frères : tout est pour le bien dans le meilleur des mondes (mais tout sur Terre est vanité : l'argent pourrit, l’âme sent l’eau-de-vie).
“Le rôle est assez exposé, dans la première intervention avec le Second ouvrier suivie d’un long monologue seul pendant lequel je torture l’enfant. Vocalement, comme tous les personnages de Wozzeck, les extrêmes de la tessiture sont sollicités. Je dois chanter du mi grave au fa aigu. Il faut donc avoir une voix longue et assez sombre pour caractériser le personnage et le différencier du Second ouvrier qui est plus baryton. Il faut également maîtriser le style de Berg, entre chanté et parlé, tout en gardant une qualité de son optimale. J’ai eu beaucoup de plaisir à interpréter ce personnage parce que c’est un vrai challenge vocalement, pour la diction aussi. Mais ce qu’il dit, ce qu’il exprime, ce mal être, ce désespoir, la tristesse du monde, c’est formidable de pouvoir exprimer cela et avec cette musique.”
Fabrice Alibert chantera pour sa part “le rôle du Second ouvrier, qui est très court mais très intense musicalement. Les deux ouvriers sont en général fortement alcoolisés. Le Second ouvrier est dans cette mise en scène en costume d’ange, il est un miroir positif, une bonne conscience. Il n’a qu’une seule intervention vocale dans l’ouvrage et elle dure environ trois minutes. En ce qui concerne la difficulté vocale, hormis la tessiture qui est assez soutenue dans l’aigu (voir très aiguë pour un baryton), il s’agit d’être excessivement et rythmiquement précis.”
Nos prochains épisodes poursuivent la présentation des personnages par leurs interprètes et Rendez-vous est pris les 25, 27 et 29 mars 2022 pour l'entrée de Wozzeck au répertoire de l'Opéra de Monte-Carlo.
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1. Wozzeck
2. L'Enfant
3. Le Tambour-Major
4. Le Capitaine et le Médecin
5. Andres
6. Marie et Margret
7. Les deux ouvriers
8. Le Fou
9. Le Chœur
10. L’Orchestre