Les Grands Opéras : Aïda, Episode 4 - Lectures politiques de l'œuvre
4. La lecture politique de l’œuvre
Si l’histoire d’amour prend une place importante dans l’opéra, l’œuvre traite également du rapport entre dominant et dominé, colonisateur et colonisé.
Le récit des égyptiens qui partent en guerre contre les éthiopiens et les soumettent peut résonner de plusieurs manières dans le contexte de sa création. L’Égypte, à cette époque, est une province ottomane depuis le XVIe siècle, et le vice-roi est sous la domination du sultan de Constantinople, mais également sous la domination des occidentaux, dont le canal de Suez est un symbole. Pour Verdi personnellement, l’empire égyptien peut représenter l’Empire des Habsbourg qui a longtemps dominé l’Italie ce contre quoi il a lui-même combattu.
Les
bruits de guerre qu’on entend dans Aïda
peuvent avoir encore
une autre
signification : alors qu’il est en pleine composition de son
opéra en juillet 1870, la France déclare la guerre à l’Allemagne. Le
30 septembre 1870, Verdi écrit à son amie, la comtesse Clara
Maffei :
« Il est vrai que l’impertinence, la présomption était et demeure, en dépit de leur malheur, insupportable. Il reste pourtant que c’est la France qui a donné la liberté et la civilisation au Monde Moderne. Ne nous faisons pas d’illusions, si la France tombe, notre liberté, notre civilisation tomberont aussi. Pauvre Paris, ce Paris que j’ai vu en avril dernier si beau, si radieux. [...] 100000 de nos soldats pourraient peut-être sauver la France, et nous sauver. De toute manière, j’aurais préféré un traité avec la France plutôt que cette inertie qui nous attirera un jour le mépris. Nous n’échapperons pas à une guerre européenne et nous y serons dévorées. Cela n’arrivera pas demain, mais cela arrivera. On trouvera toujours un prétexte. »
Tiraillée entre son amour et sa patrie, La Callas chante ici l’air O patria Mia, sous la direction de Tullio Serafin :
Rendez-vous
demain pour
le dernier
épisode de cette première semaine sur le grand opéra de Verdi, Aïda.